Notre Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a parlé ! Et quand il parle, il faut bien écouter, décrypter, analyser et lire entre les lignes. Parce que quand Sellal parle, c’est la sagesse qui dégouline de sa langue. C’est le bon sens par excellence qui trouve sa place dans ses phrases. Les déclarations de Sellal, c’est toute une philosophie encore inaccessible au commun des mortels.
Avec Sellal, les Algériens ont compris que la politique est l’art de promettre. A chacune de ses sorties sur le terrain, Sellal fait danser son verbe. Ses phrases aux tournures excentriques étonnent les Algériens. Certaines de ses déclarations épatent mêmes les plus sceptiques. Quelques fois, notre Premier ministre donne l’impression qu’il ne vit pas sous le même ciel que nous. Pour preuve, «aujourd’hui, vous pouvez être fiers de votre pays. Le monde entier reconnaît que l’Algérie maîtrise la situation dans tous les domaines», a-t-il dit lors de sa visite de travail et d’inspection dans la wilaya de Sidi Bel-Abbès. Quelle situation maîtrise réellement l’Algérie et dans quels domaines exactement ? Les importations s’envolent, le dinar chute vertigineusement, le pouvoir d’achat est laminé, l’économie demeure encore rentière, aucun produit fini n’est presque fabriqué en Algérie, de quelle maîtrise parle réellement notre Premier ministre ?
Est-il conscient de la dangerosité de notre situation, celle qu’il croit maîtriser avec ses ministres ? Des réserves de changes placées à l’étranger, des projets d’investissement bloqués depuis des années, un chômage toujours massif, des transferts sociaux qui creusent le déficit budgétaire de l’Etat, l’Algérie maîtrise tout sauf le développement économique, la croissance utile, la création de la richesse ou la réduction des inégalités sociales. Mais Sellal pense autrement. Ou plutôt ne vit pas dans la même Algérie que nous.
Son Algérie à lui, c’est l’Algérie du bilan positif depuis 1999. Son Algérie à lui, c’est l’Algérie des grandes réalisations et des méga-projets qui ont englouti des milliards. Son Algérie à lui, c’est l’Algérie qui affiche sa puissance financière avec insolence à l’international, qui prête au FMI et qui pirate Al-Jazeera pour punir la vanité du petit Qatar.
Quant à notre Algérie à nous, c’est l’Algérie des fortes disparités sociales, l’Algérie des cancéreux qui meurent à défaut d’un rendez-vous en radiothérapie, l’Algérie des harragas, des jeunes diplômés mal-payés, mal-logés et désespérés à cause de l’exclusion sociale dont ils sont victimes. Le bilan n’est guère positif pour nous. Une économie en panne d’idées, des autorités qui boudent les technologies, des lourdeurs bureaucratiques d’un autre âge et une scène politique verrouillée, qui dit mieux pour un pays fier ? Mais Sellal ne s’arrête pas là. Il va jusqu’à nous berner de nouvelles promesses. Les mêmes de 1999. Vous serez tous logés, employés, bien payés et heureux dans votre vie.
Mais comment faire ? Avec quel système politique ? Avec quelle méthode de gestion et mode de gouvernance. Non, ceci ne vous concerne pas, semble nous dire notre Premier ministre bien aimé. Aux yeux de Sellal, le peuple algérien est comme cette mariée promise à un prince charmant. Elle doit porter sa robe blanche, sourire et partir la nuit avec son heureux élu. Elle doit rien faire d’autre, ni demander des explications, ni savoir le pourquoi du comment. « Sois heureuse et toi », dit-on sans cesse à cette femme qu’on veut absolument qu’elle soit écervelée. Les Algériens, un peuple écervelé qui n’a besoin que de logement, voiture et stade de football. La vision qu’ont de nous nos dirigeants reflète parfaitement leur mentalité et leur perception du réel. Quant au reste, ce sont que des « paroles, paroles, paroles »…