Le départ, ou la fuite, de Chakib Khelil à l’étranger a suscité une vague d’indignation en Algérie. Cité dans plusieurs affaires et scandales de corruption, cet ancien ministre détient les secrets qui peuvent éclairer l’opinion publique algérienne. Une opinion publique qui désire connaître, une fois pour toute, la vérité sur ces scandales politiques et financiers. Mais cette vérité, visiblement, ne verra pas le jour dans les semaines à venir à l’heure où la justice algérienne semble vouloir s’emparer de ces scandales de corruption pour démêler le vrai du faux.
On nous promet des procès équitables, une justice impartiale et des enquêtes approfondies. Le Président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a promis, lui-même, chose qu’il a rarement faite durant son règne, de poursuivre « toute personne coupable de corruption ». « La loi s’appliquera dans toute sa rigueur, car l’Etat est déterminé à imposer le sérieux et l’intégrité dans le travail et n’hésitera pas à demander des comptes à toute personne coupable aux yeux de la loi, tout en veillant à recouvrer les droits spoliés », s’est-il, ainsi, engagé devant le peuple le 19 mars dernier. Mais qu’en est-il de fait ? Sur le terrain, c’est un spectacle désolant auquel les Algériens sont conviés à y assister. Un ministre s’en va le plus normalement possible via l’aéroport de la deuxième ville du pays au moment où ses domiciles sont perquisitionnés. Convoqués par la justice, Chakib Khelil préfère répondre à la convocation de l’exil doré qui l’attend en Suisse où il a, selon plusieurs sources concordantes, décidé de se réfugier en attendant que la tempête se calme un peu en Algérie.
Pendant ce temps-là, l’ancien ministre, cité par les dirigeants de Saipem comme étant l’un des intermédiaires dans les affaires de pots-de-vin versés à des dirigeants algériens, aurait pris le soin de vendre ses prestigieux biens immobiliers à Oran et à Alger. Des ventes qui lui ont permis d’empocher un impressionnant pactole. Chakib Khelil aurait bien préparé son départ. Il n’a donc pas fui. Mais, on l’a laissé partir. La différence est de taille. Ni la Justice, ni les services de sécurité ont tenté de l’empêcher de quitter le territoire national. D’ailleurs, des sources bien informées ont pris le soin de préciser qu’il n’est pas sous le coup d’une interdiction de quitter le territoire ni d’un quelconque mandat d’arrêt. Pour quitter l’Algérie, Chakib Khelil est même passé « par le salon d’honneur mis à sa disposition par les autorités locales » ! Ce traitement de faveur, les défenseurs des droits de l’homme et des syndicalistes autonomes refoulés, comme des malpropres, par la Police des frontières à Tébessa, à la frontière tunisienne, ils n’y ont pas eu droit ! Ces militants ont été empêchés de rejoindre la Tunisie pour participer aux travaux du Forum Social Mondial. On ne leur, d’ailleurs, même pas fourni des explications ou des justifications. « Nous avons reçu des instructions », leur a-t-on répondu sèchement. Ces mêmes instructions ont fait, cruellement, défaut lorsque le gentilhomme Khelil a pris la tangente…