Aujourd’hui, le mercredi 20 mars, c’est la journée mondiale du bonheur. Qui le sait en Algérie ? Presque personne ! Et pourtant, cette journée a été adoptée et décrétée par l’ONU à l’unanimité des pays membres. Et l’Algérie, en sa qualité de pays membre, a certainement participé à cette résolution. En plus, la résolution de l’assemblée générale de l’ONU est explicite, elle invite chaque état-membre à célébrer cette Journée comme il se doit, notamment dans le cadre d’initiatives éducatives et d’activités de sensibilisation.
Mais sur le terrain, rien n’est fait pour célébrer cette journée, un évènement, apparemment, trop extravagant pour être vulgarisé en Algérie, un pays où la notion de bonheur reste tout de même mystérieuse. En effet, force est de constater que le bonheur est devenu un sentiment étrange dans notre pays. La sinistrose, le pessimisme, l’aigreur et la mauvaise humeur règnent en maître incontesté sur cette terre irradiée de soleil, mais boudée par la joie de vivre. Dans leur quotidien, les Algériens, ce peuple méditerranéen naguère connu pour son amour incommensurable pour la vie et ses saveurs, adoptent le négativisme comme une ligne de conduite. Ils critiquent absolument tout. Rien ne leur plaît. Ils consacrent la majorité de leur temps à dresser les tableaux les plus obscurs de leur vie. Râleur, l’Algérien est réputé aussi pour sa légendaire nervosité. Pour un rien, il s’énerve. La violence, son langage préféré. Les bagarres, peu importe leurs mobiles futiles, font rage et tournent souvent au drame. En Algérie, on peut tuer pour le sourire d’une fille, une poignée de dinars ou une place de parking.
La mort s’est même banalisée. A tel point qu’au cours des funérailles et des enterrements, les Algériens s’amusent à raconter des blagues. Oui, les blagues, en Algérie il y en a toujours à profusion. Mais le sens de l’humour n’est pas forcément au service du bonheur. Même de nos blagues, un sentiment général d’amertume se dégage. Soyons honnêtes et sincères, dans un pays aussi jeune, aussi vaste, aussi riche et aussi diversifié, est-il normal que la population soit accablée par tant de malaises sociaux ? Les Harragas, le chômage, la promiscuité dans les maisons, les banlieues inhumaines et désolantes, l’exclusion sociale, la pauvreté, le partage inéquitable des richesses, l’illégitimité des autorités, la liste des maux qui martyrisent les Algériens est longue à dresser. Mais leur réaction, leur attitude face à cette adversité se résume, quant à elle, en un seul mot : la résignation ! Le fatalisme, « Allah Ghaleb », la devise nationale en Algérie, étouffe les volontés et obscurcit la lucidité.
L’auto-flagellation remplace l’esprit critique. La haine de soi annihile l’ambition et la passion. Le complexe de l’infériorité longtemps cultivé par des générations d’Algériens finit par enfoncer notre société dans les abysses de la tristesse. Certes, une certaine jeunesse tente de résister, d’innover et et fait de son mieux pour s’accrocher au train de l’espérance. Mais cela suffit-il pour réconcilier un peuple avec son pays, son histoire et ses institutions ? Malheureusement, non. Plus de libertés publiques et davantage de tolérances et d’ouverture d’esprit favoriseront un éveil national. Mais pour cela il faudra que l’Etat comprenne cette ultime vérité : avec ses milliards de pétrodollars, on peut tout acheter et importer pour son peuple… Sauf le bonheur !