Jusqu’à mercredi dernier et l’amendement du code pénal marocain, les violeurs pouvaient échapper à la prison en épousant leur victime, y compris des mineures.
Le Maroc a réalisé mercredi 22 janvier une avancée majeure dans la protection des droits et de la dignité de la femme. Jusqu’alors, un violeur pouvait éviter une peine de prison en épousant celle dont il avait abusé, y compris si la victime était mineure au moment du crime. Mais, mercredi, les députés marocains ont mis un terme à l’impunité des auteurs de viol, en amendant un article du code pénal. L’article 475 prévoit une peine de prison pour les violeurs mais, selon une seconde clause, aucune poursuite ne pouvait être enclenchée lorsque la victime marie son bourreau. Pour éviter la honte et l’humiliation, parce que leur fille avait perdu sa virginité avant le mariage, les parents des victimes consentaient à offrir la main de leur fille à son bourreau. Mais, les législateurs marocains ont supprimé mercredi cette seconde clause si bien que les auteurs de tels crimes n’ont plus aucun recours pour échapper à une peine d’enferment.
« Un pas très important mais qui n’est pas suffisant »
La révision du code pénal intervient au terme d’une bataille longue de deux ans, menée par la société civile marocaine, notamment le mouvement féministe. Le milieu associatif marocain n’a cessé de se mobiliser sur la question depuis qu’un fait divers a suscité un vif émoi à travers tout le royaume. La polémique autour de l’article 475 a effectivement été relancée en 2012 lorsqu’une jeune fille de 16 ans, Amina Filali, mariée de force à son violeur et victime de violences conjugales, s’est donnée la mort après 7 mois de mariage, en avalant de la mort aux rats. Des accusations que son époux et bourreau, Moustapha Fellak, 25 ans, rejette en bloc.
La nouvelle de la modification du code pénal marocain a été accueillie avec le sourire chez les militants pour les droits et la dignité de la femme. « Aujourd’hui on peut enfin dire qu’Amina al-Filali peut se reposer en paix. Depuis 2012, il a fallu attendre, et c’est grâce à la lutte menée par les ONG et la mobilisation de certains groupes parlementaires que nous avons pu aboutir », s’est réjoui Khadija Rouissi, députée du parti Authenticité et modernité (PAM).
Tout aussi heureuse de cette avancée, Fatima Maghnaoui, responsable d’une ONG venant en aide aux victimes de violence, estime néanmoins qu’il reste encore beaucoup à faire dans le domaine. « C’est un pas très important mais qui n’est pas suffisant (…). Nous appelons à une révision complète du code pénal pour les femmes », affirme cette militante.