A Londres, une exposition rend hommage aux musulmans qui ont porté secours aux juifs durant la Seconde Guerre mondiale. Objectif : rappeler le rôle sous-estimé de ces hommes et femmes au cours de cette sombre période de l’Histoire et relancer le dialogue entre les deux communautés.
On les appelle les « Justes ». Tous ceux qui ont bravé l’interdit au péril de leur vie pour venir au secours des Juifs, alors pourchassés par les SS de l’Allemagne nazie. Et parmi ces courageux, on reconnait depuis peu qu’il y en avait de confession musulmane.
Ces « Musulmans Justes » sont à l’honneur depuis mercredi 17 avril dans les locaux du Conseil des députés des juifs britanniques à Londres. En guise de célébration, une exposition retraçant en photos l’histoire de quelques 70 personnes croyant en Allah. Pour détruire les clichés et rétablir « l’empathie » entre les deux communautés, affirme le rabin Nathan Levy, coordinateur de l’exposition. « Ce programme constitue un pont unique entre les deux communautés, afin qu’elles puissent célébrer ensemble, se souvenir ensemble et ne pas s’éloigner davantage », a-t-il déclaré à la BBC.
Co-auteur du livret d’accompagnement intitulé « Le rôle des Musulmans Justes », Fiyaz Mughal veut lui rétablir grâce à ce rendez-vous les liens entre les deux communautés, pour le moins distendus aujourd’hui. « Quelques petites sections dans les communautés juives essayent de réécrire l’histoire et dire que les musulmans ont en grande majorité aidé les Nazis », a-t-il expliqué. Et pendant ce temps, poursuit-il, « une petite partie de la communauté Musulmane évite de parler de l’Holocauste parce qu’elle ne veut pas créer de l’empathie vis-à-vis des communautés juives ». « C’est inacceptable, parce qu’en fait c’est faux ! », lâche Fiyaz Mughal.
Les organisateurs espèrent que, suite à cet événement, de nouvelles recherches concernant le rôle positif, et souvent tu, des musulmans pendant la Seconde Guerre Mondiale seront entreprises afin de « contrebalancer les récits émergents qui mettent les deux religions en désaccord ». « Ces communautés ont été dispersées après la Seconde Guerre mondiale et quand la vieille génération ne sera plus, ces histoires seront perdues », avance Fiyaz Mughal, pour qui la poursuite des recherches est la « meilleure chose qui soit, pour qu’il y ait davantage d’ « empathie et [de] cohésion » entre juifs et musulmans.
Un autre pas vers la reconnaissance du secours historique des musulmans aux juifs durant la Seconde Guerre mondiale a été effectué par le mémorial aux victimes de la Shoah de Jérusalem. Récemment, le nom de ces quelques 70 musulmans a été ajouté à la liste des 25 000 personnes honorées sur le mémorial Yad Vashem.
Et on se souvient également du film réalisé par le franco-marocain Ismael Ferrouki, « Les Hommes libres ». Sorti en 2011, ce long-métrage révélait la contribution de la Mosquée de Paris dans le sauvetage de plusieurs juifs persécutés. De Paris à Londres, on semble fin prêt à se réconcilier avec l’Histoire pour mieux réconcilier les communautés juives et musulmanes dans le présent.