Edito du Monde. Merci, monsieur Madoff

Redaction

Un nouveau scandale frappe la finance. Les français BNP Paribas et Natixis, l’espagnol Santander, le japonais Nomura, le suisse Union bancaire privée… Sur tous les continents, les banquiers les plus réputés se sont pendant des années, voire des décennies, laissé berner par celui qui apparaît d’ores et déjà comme l’un des plus grands escrocs de Wall Street : Bernard Madoff, gérant d’un fonds d’investissement qui a reconnu avoir fait perdre à ses clients la bagatelle de 50 milliards de dollars.

Alors que la crise des subprimes nous avait démontré le danger des produits financiers trop sophistiqués, l’affaire Madoff prêterait à rire si elle ne mettait en danger les économies de nombreux épargnants, loin d’être tous milliardaires. Elle repose sur un mécanisme d’une simplicité enfantine : la rémunération des investisseurs d’hier non pas avec les profits réalisés par leurs placements, mais avec l’argent apporté par les investisseurs plus récents, attirés, eux aussi, par la promesse de profits mirifiques. Tant que les investisseurs initiaux ne cherchent pas à récupérer leur mise, tout va bien. Mais qu’ils se retirent du jeu, et la pyramide s’écroule.

Qu’un homme d’affaires abuse de la confiance qu’il inspire n’est pas nouveau. Que les plus grands noms de la finance mondiale se laissent avoir comme de simples particuliers colombiens, victimes ces dernières semaines d’un scénario comparable, est nettement plus inquiétant. Cela prouve qu’ils placent l’argent de leurs clients sans se préoccuper de la façon dont les gains sont réalisés. Que la SEC, la Securities and Exchange Commission, que l’on n’ose plus qualifier de gendarme de la Bourse américaine, n’y voie que du feu, alors même que des articles de presse s’interrogeaient sur les performances du « fonds Madoff » même par mauvais temps boursier, est tout aussi scandaleux.

A l’heure où des voix s’élèvent pour que les réglementations à venir ne brident pas trop la créativité des petits génies de la finance, l’affaire Madoff tombe bien. Elle rappelle qu’il est de l’intérêt de chacun que les marchés soient régis par des règles claires et transparentes et que les gendarmes de la Bourse soient dotés de véritables pouvoirs d’investigation et de sanctions. Bernard Madoff est loin d’être le seul coupable du scandale auquel son nom est désormais attaché.

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