Les résultats des élections législatives en Libye ont été annoncés lundi 21 juillet, alors que le pays est en proie à de violents affrontements entre milices rivales. Les pays voisins, sous l’impulsion active de l’Algérie qui craint des répercussions sur son territoire, tentent de trouver des solutions pour éviter que le pays ne bascule dans une guerre civile. Explications.
Victoires des libéraux et recul des islamistes. Les résultats des élections législatives libyennes ont été communiqués lundi 21 juillet par la Haute commission électorale, et il n’y aurait qu’une trentaine d’élus pour le Parti de la justice et de la construction (islamistes), contre 50 députés pour l’Alliance des forces nationales (libéraux) et de 25 à 28 pour ses alliés, partisans d’une Libye fédérale. Des scores à prendre avec des pincettes, puisque les candidats ne pouvaient se présenter qu’individuellement, ce qui avait conduit lors du dernier scrutin à un renforcement du camp islamiste favorisé par le jeu des alliances politiques et la loi sur l’isolement (impossibilité pour les fonctionnaires du régime kadhafiste d’occuper des postes à responsabilité pendant 10 ans).
Les élections législatives, qui se sont tenues le 25 juin dernier, ont été marquées par une faible participation – 630 000 votants sur 1,5 million d’inscrits, soit un taux de participation de 42% -, la fermeture de plusieurs bureaux de vote, et surtout l’assassinat de Salwa Bougaighis, avocate et militante des droits de l’homme très active dans le renversement de Mouammar Kadhafi en octobre 2011.
“Les plus violents affrontements depuis la chute de Kadhafi”
L’annonce des résultats électoraux intervient alors que “les plus violents affrontements depuis la chute de Kadhafi” ont fait au moins 47 morts et 120 blessés depuis le 13 juillet à l’aéroport international de Tripoli. Deux événements étroitement liés l’un à l’autre, selon la rédactrice en chef de l’hebdomadaire libyen Mayadiin, Fatma Ghandour, qui déclarait avant le scrutin : “Les islamistes veulent avoir une place proportionnelle à leur poids militaire et non à leurs résultats aux élections.”
Le contrôle des infrastructures publiques comme privées est au cœur d’intenses luttes de pouvoir entre les différents milices qui essaiment dans le pays depuis trois ans. L’aéroport de Tripoli est ainsi tenu depuis 2011 par un groupe originaire de la ville de Zenten, 170 kilomètres au sud-est de la capitale libyenne, ce que conteste depuis dix jours des katibas islamistes de Tripoli et de Misrata.
A l’est du pays, la ville de Benghazi, qui doit accueillir les nouveaux députés du Conseil national transféré depuis Tripoli, connaît également une situation très instable depuis l’offensive lancée le 16 mai par l’ex-général Khalifa Haftar, dans le but de contrer l’influence du “Conseil de Choura des révolutionnaires de Benghazi ». L’opération a déjà fait 16 morts et 85 blessés, essentiellement des militaires. Dans ce climat de guerre civile, les 160 membres de la délégation spéciale de l’ONU pour la Libye (UNSMIL) ont évacué le territoire et la plupart des entreprises pétrolières étrangères sur place ont rapatrié leurs travailleurs -faisant chuter la production d’or noir à 400 000 barils par jour, soit des pertes estimées à 30 milliards de dollars.
L’Algérie présidente d’un comité des affaires sécuritaires et militaires
Pour tenter de trouver une issue au conflit et éviter le chaos total, le gouvernement libyen a demandé une aide internationale mi-juillet. Depuis Alger où il a rencontré dimanche le ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra, l’envoyé spécial de l’Union africaine (UA) Deleita Mohamed Deleita a lancé un appel au dialogue. Lors du Conseil ministériel des pays voisins de la Libye, réuni la semaine dernière à Hammamet (Tunisie), l’Algérie s’est attribuée la présidence d’un comité chargé des affaires sécuritaires et militaires, qui doit permettre à son grand voisin de l’est de retrouver la sécurité et la stabilité de ses frontières.
Jeudi dernier, le ministre des Affaires étrangères de la Libye, Mohamed Abdelaziz, a alerté le Conseil de Sécurité des Nations Unies sur “la situation des réfugiés et des déplacés, les conflits tribaux, la fuite de certaines personnes et de groupes entiers, par crainte des poursuites qui pourraient être lancées contre eux, la passivité de l’opinion publique et la crise de confiance entre le peuple et le gouvernement libyen.” Le diplomate a évoqué un “stade critique qui menace de faire de la Libye un État failli.”
Pour plus d’explications sur l’instabilité en Libye, voir cette vidéo de France 24.