Ibrahim Boubacar Keïta, dit IBK, le nouveau président du Mali

Redaction

IBK président du Mali

Les résultats du scrutin n’ont pas encore été officiellement proclamés, mais Ibrahim Boubacar Keïta est assuré d’être le nouveau président du Mali : son rival Soumaïla Cissé a reconnu sa défaite lundi soir.

À 63 ans, l’ancien ministre des Finances a jeté l’éponge avant la publication des résultats du second tour, mais des estimations portant sur les deux tiers des bulletins dépouillés donnaient une très large avance à Ibrahim Boubacar Keïta, dit IBK, ancien Premier ministre de 68 ans. Sur la foi de ces premiers chiffres, Soumaïla Cissé s’est donc spontanément rendu dans la soirée au domicile de son rival, avec femme et enfants, pour le féliciter selon le verbatim publié par la radio RFI :

Plutôt qu’un coup de téléphone, j’ai préféré la tradition malienne. J’ai rencontré mon grand frère Ibrahim Boubacar Keïta. Je l’ai félicité et je lui ai dit : « Félicitations, Monsieur le président de la République ». Je n’ai pas attendu parce que, justement, j’ai vu l’écart des voix. J’ai vu les résultats provisoires portant sur plus des deux tiers du dépouillement des bulletins de vote et j’en ai conclu que je ne pouvais pas rattraper mon retard.

L’entourage d’IBK se refuse lui à tout commentaire pour le moment. « Si quelque chose doit être annoncé, c’est à l’autre camp de le faire, ce n’est pas à nous » a déclaré un collaborateur d’Ibrahim Boubacar Keïta au micro de RFI.

À l’issue du premier tour du 28 juillet, Ibrahim Boubacar Keïta avait obtenu 39,79% des voix, contre 19,70% à Soumaïla Cissé. Il partait largement favori au second tour grâce au ralliement de 22 des 25 candidats éliminés.

Un scrutin conforme aux règles démocratiques

L’annonce de Soumaïla Cissé est d’autant plus surprenante que son camp n’a cessé de mettre en doute la légalité du scrutin. Des voix se sont élevées pour dénoncer des fraudes, parmi lesquelles celle du directeur de campagne Gouagnon Coulibaly. Le candidat lui-même a réitéré ces accusations ce lundi, se disant « lésé »par l’organisation du second tour.

Pourtant, dans son rapport préliminaire publié lundi, la mission de l’UE évalue « positivement (…) les opérations de vote à hauteur de 99% » des bureaux observés. Elle estime que la présidentielle malienne est conforme aux « normes internationales pour l’organisation d’élections démocratiques ». Louis Michel, chef de la mission d’observation de l’Union européenne qui a lui-même surveillé le scrutin dans plusieurs bureaux de vote de Bamako, estime qu' »il n’y a absolument rien de douteux ou de suspect à signaler, ça s’est déroulé dans de bonnes conditions, dans un climat serein, calme ».

Des déclarations qui n’auraient pas plu à Soumaïla Cissé, qui a également rencontré des représentants des Nations unies et des observateurs internationaux. Selon un diplomate africain, la réunion a été houleuse et a duré une heure. Soumaïla Cissé a en tout cas prévenu qu’il faudra compter avec lui à l’avenir : « Je ne quitterai pas la politique », a-t-il répété.

Réconcilier le Mali

IBK, nouveau président malien, aura la très lourde tâche de redresser un pays affaibli par dix-huit mois d’une profonde crise politique et militaire, qui avait débuté en janvier 2012 par une offensive des rebelles touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) dans le Nord. Aujourd’hui, la stabilité de la région est régulièrement menacée par les réseaux de contrebande et des groupes islamistes de la mouvance Al-Qaïda.

Le conflit a plongé le pays dans la récession, accentué la pauvreté, ravivé les tensions entre communautés touareg, arabes et noires, et provoqué un exode massif de population. On estime à 500 000 le nombre de déplacés internes et réfugiés. 30 000 d’entre eux ont trouvé asile en Algérie selon le ministre de l’Intérieur Dahou Ould Kablia.

« J’ai une obligation de résultats » déclarait Ibrahim Boubacar Keita quelques jours avant le premier tour, à l’hebdomadaire français L’Express. Les États-Unis ont d’ores et déjà assuré qu’ils étaient prêts à reprendre leur aide au Mali, compte tenu du retour de la démocratie à la faveur de l’élection présidentielle.

Neila Latrous