Moubarak rejette les accusations, manifestation placet Tahrir

Redaction

L’ancien président égyptien Hosni Moubarak, renversé le 11 février par une révolution de rue, est sorti dimanche de son silence pour rejeter en bloc les accusations de corruption portées contre sa famille et lui.

Le parquet a peu après annoncé la convocation de Moubarak dans le cadre d’enquêtes sur la mort de manifestants et le détournement de fonds publics.

Le procureur Abdel Maguid Mahmoud a fait savoir que les fils de Moubarak, Gamal et Alaa, étaient aussi convoqués dans l’enquête pour détournements de fonds et que les dénégations de l’ancien « raïs » n’affecteraient pas les investigations.

Le parquet a en outre annoncé la mise en détention pour quinze jours d’Ahmed Nazif, ancien Premier ministre de Moubarak, dans le cadre d’une enquête pour gaspillage de fonds publics.

Ces développements sont intervenus alors que des milliers de manifestants étaient revenus sur la place Tahrir, haut lieu de la « révolution du Nil », pour demander un retour de l’armée dans les casernes et une purge des anciens dirigeants de l’ère Moubarak soupçonnés de corruption.

« Je ferai respecter mon droit légal à défendre ma réputation ainsi que celle de ma famille », a dit l’ancien « raïs », assigné à résidence à Charm el Cheikh, dans une déclaration enregistrée diffusée par la chaîne de télévision Al Arabia.

Moubarak a dit que les informations qu’il avait transmises au parquet égyptien montreraient qu’il ne possède ni avoirs financiers, ni biens immobiliers à l’étranger et que les détails fournis sur les comptes en banque de ses fils, Alaa et Gamal, montreraient qu’ils n’ont réalisé aucun profit illégal.

L’ARMÉE ACCUSÉE DE COLLUSION

Plusieurs pays ont gelé les avoirs de Moubarak et de certains de ses proches depuis qu’il a été contraint à la démission.

La famille de Moubarak et certains alliés politiques ont été interdits de déplacement pendant que le parquet égyptien enquête sur les accusations portées contre eux.

Les manifestants à l’origine du vaste mouvement de protestation qui a abouti à la mise à l’écart de Moubarak ont réclamé des mesures plus fermes pour récupérer les avoirs qui, selon eux, ont été soustraits à l’Etat par Moubarak et des personnes de son entourage.

Un millier de manifestants ont bravé dimanche l’ordre de l’armée égyptienne d’évacuer la place Tahrir, dans le centre du Caire. Ils réclamaient pour le troisième jour consécutif un transfert rapide du pouvoir à la société civile et une purge des dirigeants corrompus.

« Révolution ! Révolution ! », « Nous voulons un conseil civil », « Renversons le ministre de la Défense », ont scandé les manifestants en brandissant un portrait du maréchal Mohamed Hussein Tantaoui, le ministre de la Défense qui dirige le conseil militaire au pouvoir en Egypte.

Un douzaine de véhicules de transport de troupes stationnaient à proximité de la place, mais hors de vue.

L’armée bénéficie d’un large soutien depuis qu’elle assume les pouvoirs à la suite de la démission de Moubarak, mais les plaintes se multiplient bien qu’elle ait promis des élections législatives libres et démocratiques en septembre.

Un noyau dur de manifestants accuse l’armée de collusion avec des proches de Moubarak et affirme qu’elle cherche à éviter que certains de ses ex-collaborateurs soient traduits en justice.

Selon des sources médicales, 13 hommes ont été blessés par des armes à feu et deux autres tués dans la nuit de vendredi à samedi lors du plus grand rassemblement organisé depuis le 18 février, lorsque des millions d’Egyptiens avaient célébré la chute du président Moubarak.

Dans des scènes renvoyant aux manifestations qui ont eu raison de l’ancien chef d’Etat, soldats et policiers ont utilisé des tasers et des matraques pour tenter d’évacuer de la place Tahrir les manifestants.

ACCÈS À LA PLACE CONTRÔLÉS

N’y parvenant pas, l’armée s’est finalement retirée de la place. Elle a ensuite annoncé qu’elle ferait évacuer la place samedi soir. « Mais rien ne s’est passé », a rapporté Ahmed el Moqdami, 25 ans, membre d’un groupe de jeunes de Haute-Egypte.

« Nous poursuivrons le sit-in jusqu’à ce que nous obtenions satisfaction, a-t-il ajouté. Avant tout, le maréchal doit partir. Moubarak doit être traduit en justice et un conseil civil doit être formé pour la période de transition. »

L’armée a affirmé que les violences intervenues pendant la manifestation étaient le fait d’éléments « appuyant la contre-révolution » pour tenter de « semer la discorde entre l’armée et le peuple ». Elle a assuré que les soldats n’avaient pas tiré à balles réelles.

Dimanche matin, seule la carcasse d’un véhicule incendié rappelait les affrontements. La présence des forces de sécurité était réduite à son minimum.

Des manifestants vérifiaient l’identité des personnes entrant sur la place, mais ils ont par la suite cessé de le faire, retiré une partie des barbelés qui en interdisaient l’entrée et brièvement autorisé certaines voitures à passer.

Reuters