Une partie de la communauté musulmane des États-Unis, invitée à la réception, a boudé le ftour donné à la Maison blanche par Barack Obama pour protester contre les promesses non tenues et l’inertie du Président américain face au massacre du peuple palestinien.
Ce devait être une grande fête, un dîner de gala comme la Maison blanche sait en organiser. Pour la 6e fois, le Président Barack Obama accueillait lundi dernier l’élite de la communauté musulmane américaine pour rompre le jeûne à la tombée de la nuit, en ce mois de Ramadhan. Si jusque là le ftour de la Maison blanche s’était déroulé sans encombre, ce lundi, des invités, triés sur le volet, ont brillé par leur absence durant ce dîner hyper sélect.
Répondant à l’appel du Comité anti-discrimination contre les Arabo-américains (ADC), une partie des invités a refusé de s’asseoir à la table présidentielle. Dans la matinée, le Comité avait enjoint les invités à boycotter ce dîner afin de dénoncer le soutien infaillible des États-Unis à Israël, qui mène depuis une semaine une opération militaire meurtrière sur la bande de Gaza. « Nous exhortons tous les invités du ftour du gouvernement à s’unir au nom de notre communauté et à rejeter la normalisation de la violation perpétuelle de nos droits fondamentaux », a ainsi déclaré la plus importante organisation arabo-américaine du pays dans un communiqué cité par le Washington Post. « L’engagement politique est important et avoir une place dans ce cercle est crucial – mais seulement si cette place sert à faire entendre la voix de notre communauté et pas à nous soumettre ».
Guantanamo, espionnage, Israël…
Cela fait un moment déjà que le successeur de George Bush au bureau ovale n’est plus populaire auprès de la communauté arabo-musulmane des États-Unis. Il y a d’abord eu le maintien du centre de détention de Guantanamo, où plusieurs prisonniers musulmans croupissent depuis des années sans procès ni avocat. Barack Obama s’était engagé à faire fermer ce camp militaire il y a cinq ans alors qu’il s’installait à la Maison blanche. Depuis le dossier est resté lettre morte. Récemment, les musulmans américains se sont offusqués de l’espionnage intensif et anticonstitutionnel de cinq leaders de leur communauté par la NSA, l’agence de sécurité nationale, selon des informations secrètes révélées par un ex-agent, Edward Snowden, et un journaliste, Glenn Greenwald. Autre grief : le soutien inépuisable des États-Unis à Israël alors que près de 200 civils palestiniens ont perdu la vie en une semaine sous les bombes de Tsahal.
Le ftour de cette année était donc l’occasion parfaite pour exprimer une vive colère contre l’administration américaine. En plus de l’appel au boycott, une pétition a été lancée dans les milieux académique et militant américains pour bouder cet évènement. « Nous sommes un groupe de chercheurs, d’avocats, de militants et d’organisateurs communautaires, et nous sommes tous scandalisés et profondément préoccupés par la violence que les États-Unis, qui prétendent être une démocratie, s’autorisent à infliger à la communauté musulmane sous couvert de sécurité nationale. Nous sommes scandalisés de voir que tant de personnes, dont le seul crime est d’être musulman, ont souffert du profilage, de la détention, de la torture et ont été même assassinées », écrivent ainsi les porte-paroles de cette pétition. Pendant que Barack Obama recevait ses invités lundi soir à la Maison blanche, des Américains hostiles au maintien de Guantanamo et à la mise sur écoute de leurs concitoyens organisaient au même moment un sit-in à l’extérieur.
De son côté, le Président américain est resté sourd à cette colère. Prenant soin de ne pas évoquer le boycott du ftour par une partie des invités, Barack Obama a toutefois tenu à préciser sa position sur le dossier israélo-palestinien. Encore une fois, le chef de la diplomatie américaine s’est rangé derrière une neutralité de face. « Maintenant, je vais dire très clairement, aucun pays ne peut accepter que des roquettes soient tirées au hasard sur les citoyens. Nous avons été très clairs sur le fait qu’Israël a le droit de se défendre contre des attaques du Hamas que je considère inexcusables […] Notre objectif a été et continue d’être la paix et la sécurité pour les Israéliens et les Palestiniens », a-t-il tenté de contrebalancer. Insuffisant pour apaiser les rancœurs de la communauté arabo-musulmane des États-Unis.