Châabi, rai, andalous… nos musiques enchantent-elles encore les Algériens ?

Redaction

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Des sons de luth, ou des vocables à n’en plus finir. Musique de fête, déclaration d’amour, les musiques traditionnelles algériennes sont-elles encore les favorites des Algériens ? Le châabi, le raï, l’andalou, le gnawi sont des genres encore très appréciés, mais dans quelle mesure ? Que reste-t-il de la musique traditionnelle algérienne ?

Il s’agit plutôt de musique d’occasion, de souvenir et de fête. La musique traditionnelle algérienne est en 2013 une musique de cœur et d’histoire, mais surtout de respect. La chanson populaire et traditionnelle est encore très écoutée en Algérie par toute la population. Rencontrés dans la rue, des Algériens ont partagé avec nous leurs goûts musicaux et qu’ils aient 20, 30 ou 60 ans, ils gardent un amour invétéré pour la musique typiquement algérienne :

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En dépit d’un matraquage des musiques internationales, notamment les sons commerciaux qui ont fini par « globaliser » la musique dans le monde, la culture algérienne persiste mais dans une certaine limite. Ce sont surtout les anciens noms de la musique traditionnelle et classique qui font encore balancer les cœurs et les corps des Algériens. La musique traditionnelle s’apparente encore à la culture des parents et des grands-parents mais ne laisse pas place aux nouveaux noms.

Châabi figé par le passé

Le châabi est le premier touché par ce phénomène. Ce genre né dans les rues de la Casbah, est définitivement perçu comme la musique des ancêtres. En recul pendant la décennie noire, le châabi est revenu tout doucement et a explosé avec El Gusto, en Algérie mais aussi dans le monde. Abdelkader Chercham, membre du groupe El Gusto reconnaît que le succès rencontré après la diffusion du long-métrage et lors de la tournée était surprenant et il s’en émeut même. « Nous avons fait une tournée à guichets fermés », explique-t-il avec fierté. « Avec El Gusto, le châabi est sorti dans la rue. C’était une joie, et un honneur de représenter l’Algérie et cette musique « , raconte Chercham qui revient de plusieurs festivals de musique dont le célèbre festival Mawazine 2013 qui s’est déroulé au Maroc en mai. Le public était au rendez-vous pour cette tournée de châabi et parmi le public il y avait tous les profils, assure le musicien algérien. Une réussite pour lui qui a vu le châabi naître, puis s’éteindre pour enfin ressusciter.

L’icône du châabi est rassuré que le genre fasse encore partie de la culture algérienne et se dit ravi de toujours rencontrer de nouveaux talents. « Il y a beaucoup d’orchestres dans toutes les wilayas du pays », mais ils ont du mal à percer sur la scène nationale, remarque Abdelkader Chercham.

Raï 2013

Le raï de son côté échappe à cette contrainte temporelle, il parvient à se renouveler. Une pléiade de chanteurs de raï sont révélés chaque année, grâce à leur passage dans des cabarets du pays et au bouche-à-oreille. Mais ce sont toujours les anciens chanteurs qui parviennent à conquérir le public. Les grands noms de la musique algérienne font encore danser les Algériens, même s’ils ont clairement adapté leurs sons aux goûts universaux et aux besoins commerciaux. L’exemple le plus flagrant est celui de Cheb Khaled, et du titre « C’est la vie » qui a été la chanson la plus écoutée en 2012 en Algérie. Le nouvel album de Cheb Khaled a mélangé le raï du passé aux sons électroniques en vogue, pour cibler tout particulièrement un public jeune. Mais le retour réussi de Khaled sur le devant de la scène est en grande partie dû à sa célébrité.

Pourquoi les jeunes talents d’aujourd’hui ne parviennent pas à construire la même carrière qu’un Cheb Hasni ou un Cheb Khaled ? Est-ce un manque de curiosité de la part du public algérien ? Pas vraiment. Les chanteurs sont nombreux mais ont du mal à être produits, faute de label et à cause de la frilosité de certaines maisons d’éditions minées par le piratage en masse.  «73 éditeurs sur les 75 que compte la région ouest du pays ont été contraints de mettre la clé sous le paillasson et de changer d’activité. Un chômage forcé dicté par la fermeture de plusieurs sociétés confrontées au phénomène du piratage artistique et intellectuel», rapportait Le Quotidien d’Oran en avril.

Bien heureusement d’autres genres parviennent à s’adapter au temps qui passe. Le gnawi, par exemple, cette musique plébiscité par les jeunes Algériens, laisse la place à des nouveaux groupes et chanteurs tels que Aissa Soudani ou le groupe Gaada Diwan. Rassurant ? En effet, là est la preuve que la musique algérienne a toujours une place unique dans le coeur des Algériens malgré les difficultés qu’elle rencontre pour se professionnaliser et être médiatisée. Mais les contraintes techniques et financières n’enlèveront pas de la culture algérienne ces chants qui ont traversé les âges.