Au lendemain des élections locales qui devront donner à Alger un nouvel élan de développement, la ville continue à suffoquer au milieu de ses fléaux. Insécurité, trafic, informel. Les nouveaux élus auront fort a faire pour changer la donne. Voyage à la découverte d’Alger sans hayek.
Notre reportage commence au niveau du champ de manœuvre vers 20h, au milieu des dizaines de clandestins stationnés en face de la grande fontaine du quartier qui attendent patiemment leurs premiers clients. A en croire leurs préparatifs, le rush est pour bientôt, surtout que les arrêts de bus mitoyens sont vides, et que les taxis sont aussi nombreux dans la ville que les touristes danois. Pendant que les derniers retardataires continuent à lorgner sur les derniers cars bourrés d’espérance, les plus pragmatiques négocient déjà avec les « clandos ». Les magasins ferment les uns après les autres, et la circulation commence à se fluidifier dans les ruelles de plus en plus sombres de la commune de Sidi Mhamed.
Nous entamons dès lors notre périple, avec comme issue, le quartier de Belcour, en prenant bien soin d’éviter les grandes avenues au profit de ses plus vielles venelles. Là, des vendeurs ambulants, qui ne se démontent pas face à la lutte contre l’informel engagé contre eux, « plient » leurs boutiques de fortune, laissant derrière eux, des tas de détritus.
Éradication des marchés informels ? Mon œil. Savates, vêtements, sous-vêtements et survêtements sont toujours en vente libre ici. Les éboueurs pourront en témoigner. Il est alors presque 21h.
Soirée cinéma
21h, c’est aussi l’heure à laquelle ouvrent les vidéothèques à Alger. Ces dernières années, les magasins spécialisés pullulent dans la capitale, et le boom des séries américaines fait le bonheur de leurs propriétaires.
L’un d’eux qui officie au niveau de Belcourt s’est forgé une telle réputation qu’il gère désormais les commandes de ces clients à distance via un compte Facebook ! Au niveau de son magasin, il y a foule et une petite file se forme même à l’entrée aux heures de pointe. Derniers films à l’affiche, séries, documentaires exclusifs, il faut dire qu’il y en a pour tous les goûts chez Samir, et le gérant semble être de bons conseils.
Pour échapper aux contrôles des impôts, il ouvre exclusivement la nuit. Sa marchandise étant officiellement interdite, il évite ainsi les autorités et l’administration. Comme Samir, ils sont nombreux à s’être lancés dans la vente de films et de séries à Alger ces derniers temps. Le business est non seulement juteux, mais surtout facile à mettre en place. En effet, tous n’ont pas investi dans une boutique comme l’a fait Samir à Belcourt.
Au niveau de Bab El Oued par exemple, ce sont les trottoirs qui servent de vitrines à ces as du téléchargement illégal.
Au niveau des trois horloges, les jeunes se sont partagés des centaines de mètres de trottoirs et chacun d’entre eux s’est spécialisé dans un genre. Séries américaines à gauche, films étrangers à droite, films algériens et séries turques au centre. Un vendeur ambulant y expose même des films érotiques, en pleine rue, au vu et au su de tout le monde. Sachet de chique dans une main, casse-croûte à la Garantita dans l’autre, il veille sur ces CD adossés sur une voiture stationnées.
Et les affaires ont l’air de bien marcher. Les jeunes vendeurs, dont l’âge ne dépasse parfois même pas les 16 ans s’échangent des liasses épaisses de monnaie fiduciaire à l’heure de la recette, et ce n’est pas du cinéma…
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Amine F.