C’est la première fois depuis l’indépendance que le président de la République manque le cérémonial national et la rituelle promotion des officiers supérieurs de l’ANP.
C’est la première fois depuis l’indépendance que le Président manque le cérémonial national et la rituelle promotion des officiers supérieurs de l’ANP, qui se déroule chaque 4 juillet au ministère de la Défense nationale, qui relève exclusivement des prérogatives du président de la République et chef suprême des forces armées. C’est le chef d’état-major, Ahmed Gaïd Salah, qui s’est chargé de présider une cérémonie qui n’est pas seulement protocolaire, mais aussi un moment de réaffirmation de la souveraineté nationale qu’incarne le président de la République. Cette absence relance le débat sur l’état de santé de Bouteflika et sa capacité à revenir aux commandes du pays.
Son apparition sur les écrans de la télévision nationale, le 12 juin passé, n’a fait qu’alimenter le doute sur ses capacités physiques. Les images ont montré un Président extrêmement affaibli par la maladie. Mais tout de suite après cette opération médiatique, le black-out a repris ses droits et l’opinion publique est replongée dans l’ambiance floue. Face à cette vacance du pouvoir où le palais d’El Mouradia est inoccupé, les autorités du pays déploient, à travers le gouvernement, un discours selon lequel «le pays continue de fonctionner normalement et que les institutions de l’Etat ne sont pas affectées» par l’absence prolongée du chef de l’Etat, lequel concentre d’énormes pouvoirs.
Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, avait exhorté les médias et la classe politique à ne pas «se focaliser » sur la maladie du Président.
BOUTEFLIKA SILENCIEUX, ZEROUAL PARLE
Le pays peut-il donc se passer du Président ? Sa présence n’est-elle finalement pas nécessaire ? En tout cas, c’est le message que renvoie ce genre de déclarations. Mais au regard des prérogatives que confère la Constitution au président de la République, il serait difficile de faire fonctionner les institutions de l’Etat en son absence sans tordre le cou à la Loi fondamentale. Certains acteurs de la classe politique posent, à juste titre, la question de la prise de décision en pareilles circonstances. Si en apparence, l’appareil bureaucratique national donne l’impression d’un fonctionnement des plus normaux, il n’en demeure pas moins que l’Etat est sans visage et le gouvernement, dont Bouteflika en est le chef, vit au rythme des discordances.
Abdelmalek Sellal, qui ne dispose pas d’un parti politique pouvant lui assurer un soutien, peine à imposer une «discipline» et une solidarité d’une équipe gouvernementale hétéroclite. Tout sur fond de tractations en vue d’une succession qui s’annonce difficile. L’absence de l’actuel président, Abdelaziz Bouteflika, et son silence sont «comblés» par la sortie inattendue, à la veille du jour-anniversaire de l’indépendance, de l’ancien président Liamine Zeroual tenant un propos qui tranche avec le discours dominant.
Aux quelques citoyens qui sont venus perturber sa retraite dans les Aurès, le «suppliant » de revenir au pouvoir, il a gentiment décliné en encourageant à «donner» la chance à la nouvelle génération. Un message qui coupe court aux voix qui défendent vigoureusement, depuis quelques semaines, l’option d’un retour de l’ex-chef d’Etat pour assurer une transition en douce. Au contraire. Le pays s’apprête à vivre une autre succession à haut risque.
Le pouvoir n’envoie aucun signal rassurant. Les tractations dans les salons feutrés du régime le disputent outrageusement à un débat national démocratique associant tous les acteurs politiques du pays dans la perspective de trouver un accord politique amorçant une sérieuse transition démocratique tant réclamée.