Les dérapages de Ghannouchi en Algérie

Redaction

Le chef du parti islamiste tunisien Ennahdha, Rached Ghannouchi, a déclaré lors d’une conférence tenue, lundi dernier au siège du MSP à Alger, qu’il soutient la candidature du nouveau président du Mouvement de la société pour la paix, Abderrezak Mokri, et que le dernier mot revient au peuple algérien.

Cette sortie médiatique est étonnante de la part d’un homme politique d’un pays voisin que les autorités algériennes avaient très bien accueilli, lors de sa première visite en Algérie. Soutenir un candidat aux présidentielles d’un autre pays, alors que même le concerné, Abderrezak Mokri, ne s’est pas prononcé officiellement sur le sujet, cela ne peut être interprété du point de vue diplomatique, que comme une ingérence dans les affaires internes du pays. Ainsi, on se demande si Ghannouchi veut transmettre indirectement le modèle islamiste de son pays qui n’a pourtant pas réussi à instaurer la stabilité, après  » la révolution du jasmin  » ?

Le chef du parti islamiste tunisien Ennahdha est en visite en Algérie depuis vendredi dernier, à l’invitation des responsables du MSP, pour prendre part au colloque sur Mahfoud Nahnah qui s’est déroulé vendredi dernier à Alger. Jusque là tout est normal, puisque ce colloque est connu pour la participation des courants islamistes des pays arabes et musulmans, mais c’est la première fois, qu’un représentant islamiste se prononce sur une élection en Algérie, et en particulier, avec tous les enjeux qui entourent les prochaines présidentielles dont les cavaliers ne sont pas encore visibles, hormis l’ancien chef du gouvernement, Ahmed Benbitour, et Moussa Touati, président du Front national algérien (FNA).

Interrogé lors d’une conférence de presse animée dimanche à Alger, s’il soutiendrait la candidature du nouveau leader du MSP à la présidentielle de 2014, Ghannouchi a indiqué que l’actuel président du MSP « est capable d’assumer le poste de président de la République en Algérie ». « Il (Abderrezak Mokri) est qualifié pour cette mission », avant de se rattraper « Les élections algériennes ne me concernent pas directement. C’est aux Algériens de choisir le Président qu’ils veulent ».

Comme première réaction officielle aux propos de Ghannouchi, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Amar Belani, dira :  » Monsieur Rached Al Ghannouchi est un homme politique expérimenté, clairvoyant et avisé, je suis convaincu qu’il n’ait pas tenu ce genre de propos qui lui sont prêtés et qui pourraient être considérés comme une ingérence dans les affaires intérieures de l’Algérie « .

Du côté du MSP, le jeu du nouveau président continue, car en même temps, il mène de larges consultations sur les prochaines présidentielles et semble satisfait des propos de Ghennouchi. Le Mouvement de la société pour la paix a indiqué qu’il « ne s’est pas encore prononcé sur l’élection présidentielle de 2014 du fait de l’ambiguïté qui caractérise la scène politique ». Intervenant lors d’une conférence de presse animée en présence de Rached Ghannouchi, Mokri a fait savoir que sa formation menait actuellement, des consultations avec des partis politiques influents en vue d’adopter une position à l’égard de la Présidentielle de 2014, soulignant que sa formation « ne s’est pas encore prononcée sur la question compte tenu de l’absence d’indicateurs relatifs à cette importante échéance ».

Selon le patron du MSP, «son parti tient compte des circonstances que connaissent les partis participant à ces consultations, et veut se donner le temps nécessaire pour ce faire, car nous sommes tenus par des échéances », appelant à « conférer transparence et liberté » à la prochaine élection présidentielle. Face à la polémique suscité, Rached Ghannouchi, a affirmé hier, que « l’Algérie a un président qui occupe la place qui lui sied et qu’il ne peut y avoir de prétendants à ce poste déjà occupé ».

« Je ne vois pas pour quelle raison l’Algérie ira chercher aujourd’hui un Président puisqu’elle en possède déjà un qui occupe la place naturelle qui lui sied et qu’il mérite. Il s’agit du frère et ami, le président Abdelaziz Bouteflika, puisse Dieu le Tout-Puissant hâter son retour dans la plénitude de ses forces pour poursuivre ses missions », a précisé Ghannouchi dans une déclaration à la presse à l’aéroport international Houari-Boumediene avant de quitter Alger. Par ailleurs, il a qualifié de « pure affabulation » les propos qui lui ont été attribués sur son soutien à des personnalités politiques à la prochaine présidentielle en Algérie, soulignant qu’il ne lui, revenait pas « de proposer la candidature de telle ou telle personne ». « Je ne suis pas un électeur dans ce pays, mais je dirai que le poste de Président est occupé par quelqu’un qui le mérite », a-t-il dit.