Le chef de l’Etat montre une progression constante de son état de santé après son retour au pays, ainsi que les audiences qu’il a accordées, tour-à-tour, à Abdelmalek Sellal et à Gaïd Salah. Le gouvernement favorisé par la période des vacances, n’a aucune priorité autre que la préparation de la rentrée sociale. Néanmoins, une sorte de vide est installé.
Cela ne doit rien au fait que le président de la République soit en convalescence, car comme on l’a vu, cela ne le prive pas de suivre les grands dossiers et de donner ses instructions aux hauts responsables de l’Etat. Aucune institution n’est à l’arrêt, d’El Mouradia jusqu’à la dernière commune de l’arrière-pays, et le vide dont on parle n’a rien d’institutionnel, contrairement à l’insistance avec laquelle certains acteurs et commentateurs nous rabâchent que le pays est figé.
Le problème est ailleurs, il est dans le cap politique que le pays a pris depuis l’éclatement du printemps arabe, à partir de la Tunisie en janvier 2011. Ce fut un contexte exceptionnel qui a vu l’amorce de réformes politiques, dont l’agenda est complètement épuisé aujourd’hui, en dehors d’un seul point, la révision de la Constitution.
Les réformes législatives liées à des lois organiques de premier ordre (code électoral, à la loi sur les partis politiques, à la loi sur les associations, à la loi sur l’information), tout cela c’est du passé, en effet, et cela au moins depuis qu’elles ont été mises à l’épreuve avec un relatif succès lors des élections législatives et les locales de 2012.
Pour autant, le reste à réaliser de cet agenda n’est pas négligeable, au vu de l’importance d’une révision constitutionnelle, surtout que la tendance générale auprès de l’opinion et des élites, est de considérer que le président Bouteflika était partant pour une profonde révision, impliquant son adoption par voie référendaire.
Quelque part à ce sujet, la logique a été respectée. Une fois les élections de 2012 dépassées et à mi-chemin entre celles-ci et l’élection présidentielle de 2014, le chef de l’Etat a installé une commission d’experts pour rédiger la nouvelle Constitution.
La communication officielle qui a entouré cette initiative laissait comprendre par ailleurs, que la démarche était promise à un traitement des plus rapides et on s’attendait alors, à vite découvrir le détail de la future Loi fondamentale.
Il se trouve que la maladie du président Bouteflika est intervenue pour donner un coup d’arrêt au processus et il faut bien constater que la révision constitutionnelle est mise entre parenthèse depuis avril dernier, aussi bien dans les faits que dans le discours officiel et même dans le débat public.
La question ici est de savoir si cela est momentané ou définitif. Rien, en effet, n’empêche de croire que le président Bouteflika attend de se rétablir totalement, sinon au mieux possible, avant de remettre l’ouvrage sur le métier, pour la bonne raison qu’on ne peut pas proposer une révision constitutionnelle sans faire une campagne nationale en sa faveur.
Ce qui, au vu de son état de santé d’aujourd’hui, serait trop demander à Abdelaziz Bouteflika. En même temps, on ne peut négliger des interventions comme celle de Abderahmane Belayat qui, dans une interview à un journal arabophone, disait que cela ne servirait à rien de réviser la Constitution si un autre président que Bouteflika devrait arriver au pouvoir en 2014 et qu’il voudrait à son tour la modifier.
Entre les deux options, soit entre le simple report et l’abandon définitif, il faut tout de même dire que c’est plutôt la première qui demeure la plus probable, connaissant la ténacité du chef de l’Etat, mais aussi, parce qu’on ne se souvient pas qu’il ait annoncé un projet politique sans le concrétiser, que cela se termine par le succès ou se conclue par l’échec.
On peut malgré cela, estimer que tant qu’Abdelaziz Bouteflika n’aura pas annoncé la révision constitutionnelle, c’est – entre autres – parce qu’il ne sait pas encore si effectivement il sera candidat ou non à sa propre succession.