La presque totalité des joueurs algériens au Mondial évolue hors du championnat national. Un fait qui en dit long sur l’évolution du pays et de ses mentalités.
Prophètes en leur pays ou en celui de leurs aïeux… Durant le Mondial brésilien de football, l’Algérie fera partie des équipes dont la presque totalité des joueurs évolue hors du championnat national. De fait, seuls les deux gardiens remplaçants, Cédric Si Mohamed et Mohamed Lamine Zemmamouche viennent de clubs locaux (CS Constantine et USM Alger), le reste des Verts et Blancs opérant en Europe (Angleterre, Bulgarie, Croatie, Espagne, France, Italie, Portugal), dans le Golfe (Madjid Bougherra à Lekhwija au Qatar) ou en Tunisie (Abdelmoumene Djabou au Club Africain).
Dans un football de plus en plus mondialisé où les joueurs se transforment dès leur plus jeune âge en globe-trotters, cette situation n’est certes pas exceptionnelle. Elle vaut pour l’Uruguay dont la sélection ne comporte aucun représentant du championnat national, pas même issu de l’emblématique Club Atlético Peñarol. Dans le même cas, on peut aussi citer la Côte d’Ivoire, le Ghana et la Bosnie-Herzegovine (un seul joueur) ou même le Cameroun (2 joueurs), voire le Brésil (4 joueurs).
La question longtemps taboue de la binationalité
Pour autant, le profil de son équipe nationale de football en dit long sur l’évolution de l’Algérie et de ses mentalités d’abord parce qu’il est très rare que des Algériens de l’extérieur soient ainsi sollicités et considérés comme indispensables. Ensuite, parce que la question de la binationalité a longtemps été taboue dans un pays au nationalisme exacerbé surtout si « l’autre » nationalité était celle de l’ex-puissance coloniale. En ce qui concerne le premier point, on ne sait pas exactement combien d’Algériens vivent à l’étranger car nombre d’entre eux sont des binationaux, notamment français, et ne sont pas inscrits dans les consulats. Mais on estime aujourd’hui que 2 millions de personnes nées en Algérie ont émigré depuis 1962, date de l’indépendance. A cela s’ajouteraient de 3 à 5 millions de personnes nées à l’étranger mais ayant une origine algérienne.
Si cette diaspora demeure disparate, peu organisée et souvent très individualiste, une caractéristique majeure domine. Attachée vaille que vaille au pays d’origine malgré ses turpitudes politiques, sa grande majorité déplore le manque d’attention dont elle fait l’objet de la part des autorités algériennes. Contrairement au voisin marocain qui veille à ce que « ses » MRE (Marocains résidant à l’étranger), pourvoyeurs de précieuses devises, gardent un lien fort avec le royaume, le pouvoir d’Alger n’a jamais mis en place de politique pour attirer les talents et encourager les retours même temporaires. Nombre d’Algériens vivant à l’étranger sont d’ailleurs persuadés que ce pouvoir fait tout pour les dissuader de rentrer au pays et cela afin de minimiser les risques de remise en cause du système.
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