L’opération «dignité», nom donné à l’offensive lancée par les forces du général Khalifa Haftar, ex-protégé de la CIA, contre les islamistes à Benghazi et le Congrès général national (CGN, Parlement) vendredi et dimanche derniers, va-t-elle changer la donne en Libye ? Le gouvernement intérimaire libyen a recommandé une mise en congé du Congrès, après l’adoption du budget 2014.
Depuis, un calme précaire règne dans la capitale libyenne. Quant au CGN, il a dû s’installer à l’hôtel Radisson Blu de Tripoli en attendant un hypothétique retour au calme. Pour l’heure, le nom de Khalifa Haftar, à la tête de cette force militaire autoproclamée «armée nationale libyenne», est sur toutes les lèvres. Il veut, affirme-t-il, purger son pays de la présence des milices islamistes ayant pignon sur rue à Benghazi, Tripoli et plusieurs autres villes.
Qualifié de «général putschiste» par les autorités transitoires de Tripoli, ce dont il se défend, Khalifa Haftar bénéficie en revanche de l’appui des anciens officiers du régime de Kadhafi ayant fait défection en mars 2011 et rallié la protestation populaire, y compris de l’armée de l’air, et de tout ou partie des redoutées milices de Zenten basées dans l’ouest. Pas plus tard que lundi, les soldats et les officiers de la base aérienne militaire à Tobrouk, dans l’est, ainsi que les forces spéciales, ont décidé de se placer sous son commandement. Arrivé en mars 2011 dans les fourgons de l’Otan en provenance des États-Unis où il était réfugié, avant de succéder, à la tête des «rebelles» libyens, au général Fatah Al Youniss, assassiné en juillet de la même année, Haftar, désigné chef d’état-major d’une armée libyenne alors en construction, semble bien parti pour s’imposer comme un acteur incontournable de la crise libyenne.
C’est sans doute à ce titre qu’il a lancé vendredi une opération particulièrement sanglante (79 morts et 141 blessés) contre les groupes islamistes, dont Ansar Charia, qui ont fait de Benghazi leur fief. Malgré un appui aérien, les troupes de Haftar, qui a promis «de revenir avec force», ont dû se replier de la deuxième ville libyenne. Et que 48 heures après, cette fois-ci à Tripoli, des milices de Zenten (ouest du pays), connues pour leur hostilité aux islamistes, aient attaqué le Congrès général national (CGN), Parlement libyen, annonçant même sa dissolution. Aux yeux d’un de leurs chefs, le colonel Mokhtar Fernana, qui a fait allégeance au général Haftar, cette institution n’a aucune légitimité puisque son mandat devait s’achever en février 2013. Selon lui, le CGN doit remettre le pouvoir aux membres de la commission chargée de réécrire la Constitution.
S’ajoute à cette extrême confusion, celle de cet ex-commandant «rebelle», l’obscur Ibrahim Jathran, chef d’une milice de 3 000 hommes chargée alors de la protection des installations pétrolières de l’Est libyen. Voilà qu’en août dernier, il a décidé d’en prendre le contrôle, menaçant même de commercialiser le pétrole, sans l’aval de Tripoli.
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