Diffusés et rediffusés sur toutes les chaînes satellitaires arabes, à longueur de journée et pendant toute l’année, les feuilletons turcs se sont imposées comme le programme le plus suivi dans les pays arabes et l’Algérie ne fait pas exception.
Ils ont envahi les foyers, bouleversé les habitudes et les comportements. La fièvre des séries turques s’empare des Algériens qui règlent, désormais, leur temps en fonction de la programmation de ces séries qui happent l’esprit des hommes, des femmes et même des enfants, aussi bien dans les villes que dans les coins les plus reculés du pays.
Les acteurs, les personnages principaux du moins, toujours bien coiffés, huppés et romantiques, font fureur. Nos filles veulent toutes être mariées à Mouhaned. Quant à nos garçons, ils rêvent, tous, de Nour, Lamis, Samar ou, du moins, d’une copine qui leur ressemble.
Ces séries portent, généralement, sur une histoire d’amour contrariée, une femme aimée par deux hommes (parfois plus), une vengeance « héritée. » Et le public est toujours au rendez-vous.
« Je me suis toujours posé la question de savoir pourquoi le niveau scolaire de ma fille Selma qui préparait son bac cette année, a régressé, surtout après avoir été convoquée par le directeur de l’établissement où elle poursuit ses études. Une petite enquête m’a fait découvrir que ma fille est accro des séries télévisées turques », témoigne Nacéra, cadre dans une banque à Alger. « Ce qui nous a contraints, son père et moi, à la priver de certains programmes télévisés », a-t-elle ajouté.
Mais que peut bien découvrir Selma dans ces films ? Après insistance auprès de sa maman, la jeune fille âgée de 17 ans a affirmé que c’est pour elle «une sorte d’évasion». «C’est en entendant mes copines raconter toutes ces belles histoires d’amour des feuilletons turcs et le romantisme et les sacrifices des héros, que je me suis mise, moi aussi, à suivre ces feuilletons et là, sincèrement, ils me font rêver», a-t-elle témoigné.
Au point de faire des ravages dans les couples. Abdelhamid, enseignant, se pose la question : « Ma femme est-elle aussi bête pour préférer La vallée des loups au dîner ? J’ai failli commettre l’irréparable ce jour-là. Je n’ai rien compris quand je me suis aperçu que la marmite avait été oubliée sur le feu. Pour moi c’était une négligence de sa part sachant que je l’avais avertie à maintes reprises. La dispute entre nous allait prendre un tournant qu’on aurait regretté par la suite, n’était ce bol d’air que je suis allé prendre », a-t-il avoué.
Et cette fièvre ne touche pas uniquement les femmes. Certains hommes ont avoué, de leur côté, qu’après les matchs de football , notamment les tournois européens, les séries turques sont les programmes les plus suivis. Pour Abdennour, le feuilleton Harim Es Sultan «reflète une partie de l’histoire de l’Empire Ottoman qui mérite d’être connue». C’est dire que quelles que soient les raisons invoquées ici et là, les séries télévisées turques créent un engouement sans précédent pour « la culture, le mode de vie et la destination turque».
C’est un choix qui est loin «d’être seulement un passe-temps», estiment les sociologues. Pour eux, «au-delà d’un simple hobby, se cache un vide culturel immense dont souffrent les algériens et les peuples arabes d’une manière générale». A quand le remède ?