Officiellement, Nicolas Sarkozy n’a pas fait son retour en politique. Mais en se rendant au bureau national extraordinaire de l’UMP ce lundi, comme publicsenat.fr l’avait révélé, Nicolas Sarkozy a fait beaucoup plus que « booster » la grande souscription lancée par Jean-François Copé pour combler les caisses vides de l’UMP, après l’invalidation des comptes de campagne 2012.
Devant le siège de l’UMP, c’est l’ambiance des grands jours. Comme si la campagne 2012 avait repris. Back to the futur. Les militants sont venus en nombre. Ils crient « Hollande en Corrèze, Sarkozy à l’Elysée ! ». Le soleil tape. La grisaille de la crise interne du mois de novembre semble loin. « Sur les chaînes info, on se croirait un soir de présidentielle », s’étonne même un proche de Jean-François Copé.
Festival de Cannes
L’arrivée de tous les ténors de l’UMP prend des allures de festival de Cannes. Les journalistes sont parqués derrière les barrières et tentent d’accrocher un mot. Difficile avec les fillonistes. François Fillon ou Eric Ciotti rentrent directement. Pécresse lâche quand même que « tout le monde est main dans la main ici ». Elle partira pourtant avant la fin… Jean-François Copé et ses soutiens sont plus bavards. « C’est la famille unie », assure le président de l’UMP. La poignée de main – furtive et froide – entre les deux anciens candidats à la présidence de l’UMP trahit pourtant ces propos policés. Nadine Morano salue le geste de Sarkozy qui « revient voir sa famille. C’est normal. L’UMP vit une épreuve ». Elle reste encore et apprécie le moment. Derrière Copé, elle attend l’ancien président de la République, son smartphone à la main, prête à faire une photo comme une groupie. Le voilà.
Surprise, on imaginait un Nicolas Sarkozy s’engouffrer dans le parking de l’UMP derrière ses vitres teintées. L’ex-chef de l’Etat préfère s’adonner à un bain de foule. Comme avant, lorsqu’il était candidat. Un choix qui ne doit rien au hasard : il montre qu’il a toujours la cote auprès des militants. Il recommencera à la sortie, dans une bousculade de haut vol.
Compte Twitter réactivé
Il ne donne pas un mot à la presse. Il réserve ses déclarations aux plus de 400 responsables de l’UMP réunis à l’intérieur et… à Twitter. C’est l’autre surprise : le compte officiel de Nicolas Sarkozy a été réactivé pour l’occasion pour un véritable live-tweet de la déclaration de l’ex-Président.
« Ceci n’est pas ma rentrée politique », assure Nicolas Sarkozy. Avant d’ajouter aussitôt : « Le jour où je reprendrai la parole ce sera pour parler aux Français de la France », a dit l’ex-chef de l’État. Pas de conditionnel, mais du futur. Presque une annonce.
« Ceci n’est pas ma rentrée politique. Le jour où je reprendrai la parole ce sera pour parler aux Français de la France. »
— Nicolas Sarkozy (@NicolasSarkozy) July 8, 2013
« Vous pourrez compter sur moi à chaque fois qu’il y en aura besoin », dit-il, tout en prévenant : « Mais il y a quelque chose d’indécent à parler du rendez-vous de la présidentielle alors que les Français souffrent ». C’est un peu le retour du patron. Devant Copé et Fillon, qui se sont déchirés fin 2012, il fait la leçon : « Devant l’inquiétude des Français, toute division est inacceptable. Se diviser, c’est s’affaiblir. Quand on gagne c’est ensemble ». Revenant sur la décision du Conseil constitutionnel, il affirme : « Respecter les institutions, ce n’est pas en accepter toutes les décisions ».
Sarkozy parle Europe, croissance et immigration
Si Nicolas Sarkozy évoque 2017, il n’a en revanche pas lancé d’appel aux dons. Il a préféré se lancer dans des considérations sur l’Europe, la croissance ou l’immigration. Et même des gaz de schiste. Il s’inquiète « de la crise des idées politiques ». Comprendre : lui en a. Il parle du fond, là où on ne l’attendait pas.
Si ce n’est pas un retour politique, ça y ressemble donc beaucoup. Les proches de l’ancien Président avaient pourtant répété tout le week-end que Nicolas Sarkozy revenait simplement au sein de sa famille politique. « C’est une réunion de famille. Et souvent dans les réunions de famille, on parle politique », sourit un responsable de l’appareil. A défaut de réel retour, Nicolas Sarkozy peut rappeler à Copé et surtout à Fillon qu’il est toujours le favori des militants…
Guaino le sourire jusqu’aux oreilles
Les sarkozystes de la Droite forte insistent sur sa stature d’homme d’Etat à la sortie. Le député Sébastien Huyghe salue ainsi « sa maturité exceptionnelle ». Soit le crédo choisi par son ancien premier ministre, pour qui Sarkozy a eu quand même un mot gentil. L’ex-plume Henri Guaino ne parle pas à la presse pour une fois. Mais il affiche un sourire jusqu’aux oreilles. « Il m’a laissé sans voix », lâche-t-il seulement. « Génial » pour l’ami Patrick Balkani. Ils sont aux anges de voir leur « Nicolas » de retour, ou presque.
Alain Juppé, qui avait prévu de ne pas venir avant de changer d’avis, reconnaît que l’UMP « a besoin de sa présence pour mobiliser toutes les forces ». Jean-Pierre Raffarin et François Baroin, eux, ont séché la réunion de famille. Le filloniste Eric Ciotti parle quand même à la presse en sortant : « François Fillon est là car il privilégie l’unité de la famille politique ». L’ancien premier ministre a lui quitté les lieux sans un mot. « J’imagine qu’il avait un impératif », glisse un copéiste.
« Ce n’est pas encore l’heure de la présidentielle. Mais ça y ressemble… »
Ce retour qui ne dit pas son nom de l’ancien Président ne fait pas le jeu de François Fillon ni, dans une moindre mesure, de Jean-François Copé. Pour l’heure, Nicolas Sarkozy va de nouveau se mettre en retrait. L’horizon des affaires est loin d’être éclairci. Mais l’invalidation des comptes de campagne l’a poussé à sortir du bois un peu plus tôt que prévu et à tester sa popularité. Elle reste intacte. « Ce n’était pas le discours d’un retraité », constate le député et ancien ministre Eric Woerth. « Je ne sais pas si je sais faire encore un discours », a plaisanté Nicolas Sarkozy, qui a pu s’offrir une bonne mise en jambe pour la suite. Le député Pierre Lellouche le reconnaît : « Ce n’est pas encore l’heure de la présidentielle. Mais ça y ressemble… »
Lu sur Public Sénat