« Les jouissances de demain sont absolument indispensables pour fournir une raison d’être de l’austérité d’aujourd’hui » John Maynard KEYNES un des plus grand économiste du XXème siècle
Le gouvernement algérien doit présenter son programme devant les deux chambres à compter du 19 mai 2009. L’objet de cette modeste contribution est d’analyser les défis de l’Algérie entre 2009/2014 qui doivent être axés essentiellement sur le retour à une croissance durable hors hydrocarbures condition sine qua non de l’amélioration de l’emploi et du pouvoir d’achat des Algériens.
I- L’Algérie et la situation de l’économie mondiale
Le nombre de chômeurs augmente d’une manière exponentielle face à la crise mondiale et aucun pays n’est épargné. Pour la zone euro, le nombre de chômeurs s’élève à 8,9% de la population active, contre 8,7% en février selon une estimation révisée de Eurostat en date du 30 avril 2009, s’attendant à ce qu’il s’aggrave encore pour atteindre 10%, d’ici la fin de 2009 et 11% pour 2010 ,avec un pic inégalée en Espagne le pays le plus touché (plus de 20% de la population active) ces taux étant proches également pour les USA qui devrait connaitre en 2010 également un accroissement du chômage. Cela est encore plus dramatique pour les pays pauvres et émergents comme la Chine, l’Inde ou le Brésil (population élevée et en décroissance) qui tirait par le passé l’économie mondiale et qui ont vu régresser leurs exportations.
Aussi, comme durant la période 1929/1936 mais avec plus d’intensité du fait de l’interdépendance accrue des économies, l’on assise au début des mouvements sociaux de plus en plus persistants qui sont des révélateurs de la lente aggravation des malaises des sociétés et de l’inquiétude croissant vis-à-vis de l’avenir face à l’ampleur de la crise mondiale. Celle-ci n’épargne pratiquement aucun pays, en fragilisant de manière inquiétante les plus pauvres. Car, il est maintenant établi par les la majorité des experts et des instituions internationales dont la dernière en date est celle de la communauté économique européenne en date du 15 mai 2009,(contraction du PIB de 2,5% au premier semestre 2009, dont 3,8% pour l’Allemagne premier exportateur mondial avant la Chine ) que la crise actuelle est structurelle et non conjoncturelle, devant entraîner de profonds bouleversements géo stratégiques et économiques ,que la reprise sera très lente, l’ensemble des pays développés et émergents étant entrés en récession en 2009 avec un taux de chômage inégalée depuis la seconde guerre mondiale, pouvant avoir des incidences à la fois sociales et politiques.
Car il faut savoir qu’un taux de croissance se calcule par rapport à la période antérieure et une croissance après à un taux négatif de l’année précédente donne toujours un taux faible. Comme après une grave maladie, la convalescence durera de longues années, au minimum jusqu’en 2014/2015 si les thérapeutiques s’avèrent efficaces et donc qu’une légère reprise soit effective fin 2010 début 2011, pour que l’économie mondiale retrouve son niveau antérieur mais avec des bouleversements technologiques et organisationnels, les bourses mondiales ayant perdu en sous capitalisation plus de 52.000 milliards de dollars. Et ce n’est qu’un bilan provisoire car l’on n’a pas évalué encore l’ensemble des actifs toxiques.
Aussi, il faut être attentif à l’évolution de l’économie mondiale et surtout américaine qui est le premier importateur d’hydrocarbures et reste la locomotive de l’économie mondiale avec plus de 14 300 milliards de dollars de PIB trois fois plus que le second du classement mondial, le Japon tous deux en récession. Car il ne faut pas être utopique , voire en l’Asie le sauveur , la Chine représente à peine le PIB de l’Allemagne, la reprise devant impérativement provenir entre 2010/2014 des USA , du Japon, et de l’Europe , d’autant plus que la Banque mondiale ayant revu à la baisse le taux de croissance de la Chine en le ramenant à tout juste 7,5 pour cent, son niveau le plus bas en près de 20 ans, inférieur au niveau de référence de 8 pour cent qui est généralement considéré par les responsables chinois comme étant le minimum indispensable pour créer suffisamment d’emplois et maintenir ainsi la stabilité sociale. Qu’en est-il donc pour l’Algérie qui devrait méditer cette expérience négative de l’Espagne qui voit son économie s’effondrer ayant reposer sa croissance sur le bâtiment et les infrastructures en marginalisant le savoir et les nouvelles technologies. Car l ’Algérie étant une économie essentiellement rentière, ne doit pas prendre à la légère cette crise qui touche tous les pays, les hydrocarbures représentant 98% des exportations et pour l’essentiel du plan de financement reposant essentiellement sur les infrastructures via la dépense publique.
Les défis sociaux futurs sont d’autant plus importants que l’Algérie compte 35,1 millions d’habitants au 1er janvier 2009 contre 34,4 millions au 01 janvier 2008 dont près des deux-tiers avaient entre 15 et 59 ans et 28% moins de 15 ans, selon l’Office national des statistiques (ONS).L’augmentation en valeur absolue observée en 2008 est de 663.000 personnes, d’où un taux d’accroissement naturel (TAN) de 1,91%, en hausse par rapport à celui de 2007 (1,86 %) et L’espérance de vie à la naissance se stabilise à 74,9 ans pour les hommes et 76,6 ans pour les femmes. Les moins de 15 ans constituent 28% de la population totale, contre 64% pour ceux étant en âge d’activité (15 à 59 ans) et 7,6% pour les 60 ans et plus. Face à cette pression démographique, selon l’officiel, depuis 1999 la création d’emplois a été de 3,5 millions d’emplois durant la période 1999-2008, dont 54.8% dans le secteur de l’agriculture, le commerce, les services et le BTPH, le reste dans le secteur de l’administration, de l’industrie de l’artisanat et dans d’autres secteurs.
Durant la période 2005-2008, 1,970 millions d’emplois ont été déjà créés, ce qui représente 89.5% de l’objectif de création d’emplois. Par ailleurs, et s’agissant des perspectives 2009-2013, l’objectif est la création de 3 millions d’emplois dans le secteur économique, le bâtiment, les travaux publics, l’industrie, l’agriculture et les services, et les micro entreprise et ce grâce aux dispositifs Ansej et Cnac,et d’aide à l’insertion professionnelle à savoir le contrat d’insertion des diplômés (CID), le contrat d’insertion professionnel (CIP), et enfin le contrat de formation- insertion (CFI) ; ce dernier prévoit des avantages qui seront accordés suite au recrutement. Il est à noter que le contrat d’insertion des diplômés prévoit des subventions de salaire pendant 3 ans, deux ans pour le CIP et 1 an pour CFI. Pour sa part, le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, le taux du chômage est en baisse de l’ordre de 11.3%, l’Algérie étant en mesure de créer 400 000 emplis par an. Dans la même lignée, le rapport récent du CNES fait état d’un rythme de création d’emplois de l’ordre de 6,6% en moyenne par an, correspondant à la création de plus de 1,8 millions d’emplois nouveaux ayant permis de réduire le stock de chômeurs de près de 900.000 personnes et de réduire le chômage, qui était de 15,3% en 2005, à 12,4% en 2006.
II- La problématique de l’emploi et du chômage
S’il faille éviter la sinistrose gratuite et les dénigrements, il faut également éviter l’autosatisfaction source de névrose collective, les autorités du pays ayant besoin d’un rapport objectif afin de corriger les erreurs. Car face à l’effritement d’une manière générale du système d’information, qui induit forcément une politique socio-économique incohérente, il ne s’agit pas de produire une information biaisée, d’où l’urgence d’une institution indépendante du gouvernement à l’instar de l’INSEE en France)
Aussi, il faut éviter de se référer aux masses globales de peu de significations pour toute politique concrète mais réaliser une analyse à la fois structurelle, sectorielle et qualitative liant le processus de l’accumulation à la dynamique de l’emploi, de la répartition du revenu par couches sociales. L’indice du développement humain IDH plus fiable que le produit intérieur brut PIB , étant la synthèse de trois aspect (A) la santé] /longévité, le savoir ou niveau d’éducation (B) mesuré par le taux d’alphabétisation et enfin aspect ( C) est le niveau de vie (logarithme du produit intérieur brut par habitant en parité de pouvoir d’achat), donnant ainsi IDH = A + D + E/divisé par trois ( 3) devant à l’avenir inclure le taux de participation de la femme, signe du développement à la gestion de Cité et des indicateurs environnementaux et démocratiques dont la liberté de la presse et les indices de corruption.
Nous savons que le taux de croissance du PIB représentant environ 1/3 dans le calcul de l’indice, a été d’environ de moins de 3% entre 2006/82008 en Algérie et que les 80% hors hydrocarbures sont eux mêmes tirés indirectement par l’effet des dépenses publiques via les hydrocarbures, les entreprises autonomes créatrice de valeur étant très faibles.
D’où l’importance en dynamique de tenir compte des effets de la crise mondiale structurelle, donc durable qui se répercute sur le cours des hydrocarbures donc sur les recettes futures de l’Algérie ce qui aura un impact sur le calcul futur de l’indice .Ce qui implique d’analyser le pourquoi structurel du 2% du total des exportations hors hydrocarbures entre 2005/2008 et de la non corrélation entre l’importance des dépenses monétaires plus de 150 milliards de dollars entre 2004/2008 et son impact relativement faible sur la sphère économique et sociale devant intégrer les normes de coûts/qualités par rapport aux normes internationales pour déterminer les surcoûts et donc la mauvaise gestion.
Les derniers rapports du PNUD montrent que l’Algérie est classée à la 102ème position sur un total de 177 pays, améliorant timidement sa position par rapport à 2005/2006 (103ème) au niveau de l’indice du développement humain et avec le PIB hors hydrocarbures la position reculerait d’environ de 20 points la ramenant à la 153ème position sur 177 soit parmi les pays les plus pauvres de la planète.
Un calcul objectif de l’indice implique d’ analyser le ratio global masse salariale sur le PIB total qui passe de 22,10% en 1991 à 20% en 2001 et à moins de 19% entre en 2006/2008 ce qui permet de montrer que la salarisation est en nette baisse ( qui est d’ailleurs une des explications de la crise mondiale actuelle) accusant une régression au profit des emplois rentes alors que pour 2006/2007 le ratio masse salariale sur le PIB est supérieur à 30% au Maroc et 37% en Tunisie, et varie entre 40/60% selon les pays développés car le salaire est un prix mais que le travail est la seule source de la richesse .
Ce qui nous renvoie à l’indicateur du calcul du taux de chômage devant tenir compte de la dynamique féminine (entre 400.000/450.000 de demandes par an qui s ‘ajoute au stock de chômage actuel ), où selon l’officiel, il serait passé de 29% en 2000 à 23,7% en 2003, de 17,7% en 2004 , de 15,3% en 2005 et à moins de 12% en 2008 contredit par des organismes internationaux . C’est dans ce cadre qu’il est utile d’analyser le rapport sur le chômage en Algérie mené par Kangni Kpodar, responsable du département Afrique au sein de l’administration du FMI publié fin 2007 qui a tenté de diagnostiquer le «cas algérien».
Pour ce rapport, le chômage en Algérie était de 7 points de pourcentage plus haut que la moyenne de MENA. M. Kpodar émet des doutes sur l’efficience des différents mécanismes de création d’emploi (Ansej, contrat préemploi, les emplois salariés d’initiative locale…) mis en place par le gouvernement algérien. « Preuve que les programmes d’emploi public aidé pour abaisser le chômage ne sont pas clairs. Plus d’information est nécessaire », selon cet économiste qui précise que ces programmes ont créé certes des millions d’emplois d’emplois mais la majorité était des postes provisoires et souvent non rentables.
Le FMI estime que l’informel alimente de façon soutenue le marché du travail algérien. Sans le travail irrégulier, souligne le rapport, le taux de chômage serait supérieur à 20% et sans la dépense publique fonction du prix du pétrole, qui demeure le moteur principal de la création d ‘emplois, ce taux serait largement supérieur. Toujours selon cette étude les universitaires sont les plus touchés par le chômage (24% de femmes et 12,5% d’hommes) suivis par les chômeurs ayant un niveau secondaire (20,5% de femmes et 16% d’hommes) et ceux ayant un niveau primaire (11,5% de femmes et 5,5% d’hommes).
Or, le budget de l’État risque d’être sous pression en raison des effets de la crise financière mondiale et de la montée des besoins sociaux urgents d’autant plus que le ministre de l’Intérieur a indiqué courant janvier 2009 que 400 000 diplômés sortent de l’Université algérienne. Or dans cinq ans l’université accueillera 2 millions d’étudiants contre 1,2 million d’étudiants aujourd’hui et le risque est que les universités deviennent des usines à fabriquer des chômeurs.. Donc toute étude sur l’emploi doit élucider ce point fondamental : est ce les emplois rentes fictifs, ou est ce qu’ils contribuant à la création de valeur d’une part , d’autre part, est ce que les emplois précaires dominants ( 3 à 6 mois pour un jeune parfois universitaire à 6000 dinars par mois ) sont ils un signe d’amélioration de la situation sociale ? D’où l’importance d’une analyse objective de l’essence de l’historique de l’évolution du comportement des centaines de milliers de ces jeunes qui au départ tiennent les murs puis de l’extension des harragas qui bravent la mort qu’il faille éviter de banaliser et de culpabiliser car traduisant un profond malaise social.
Or, l’un des pilier du développement du XXIème siècle, l’éducation inclus dans le calcul de l’indice est la revalorisation du savoir et l’urgence de la réforme de l’école, mère de toute les réformes en insistant sur la qualité et non en se limitant aux dépenses monétaires. Les enquêtes sur le terrain montrent clairement l’effritement du niveau scolaire, ayant plus de chance d’être chômeurs au fur et à mesure que l‘on gravite dans la hiérarchie scolaire, des sureffectifs dans les classes et amphithéâtres, des déperditions croissantes du primaire, secondaire au supérieur constituant un coût élevé pour la collectivité nationale, une gestion défectueuse des établissements scolaires avec des bâtiments délabrés et un environnement sans âme. Dans ce cadre, comment ne pas rappeler l’enquête de l’Unesco pour 2006 que le nombre de chercheurs par habitant est de 236 en Algérie, 540 en Tunisie et 2.000 aux USA, la norme internationale selon l’Unesco étant de 600, car les laboratoires actuellement servent beaucoup plus comme supplément de salaires. En ce qui concerne le système de santé, inclus également dans le calcul de l’indice, il y a lieu de dépasser l’analyse globale quantitative, loin des réalités, en ignorant des aspects qualitatifs fondamentaux. Bien qu’existe des compétences avérées,(mais est ce que le professeur de médecine a-t-il un réel pouvoir ?), la gestion du système de santé est défectueuse, bon nombre algériens prenant en charge souvent médicaments,couvertures, et nourriture ). Paradoxalement certains à faibles revenus, se dirigent vers des cliniques privées n’ayant pas de relations de clientèles, la médecine gratuite et donc n’ayant de gratuit que le nom.
III- La problématique de l’inflation et du pouvoir d’achat
S’agissant d’un problème aussi complexe que celui de l’inflation, il me semble utile de préciser que ces phénomènes doivent tenir compte de la structure et des particularités de l’économie à laquelle ils sont appliqués, les aspects de structures de l’économie internationale, de l’économie interne résultant de l’option de la stratégie de développement économique, aux schémas de consommation générés en son sein pour des raisons historiques, d’influences socioculturelles et aux composantes des différentes forces sociales pour s’approprier une fraction du revenu national.
L’inflation depuis fin 2007 est de retour en Algérie, risquant de remettre en cause les équilibres macro-économiques qui ont nécessité d’importants sacrifices de la population algérienne depuis 1994 date du rééchelonnement, , car ayant accusé un retard dans les réformes micro-économiques et institutionnelles, et ce, bien que le niveau des réserves de change de 143 milliards de dollars US , le stock de la dette tant intérieure qu’extérieure, ce dernier est en nette baisse, selon la Banque centrale d’Algérie, de 4,9 milliards de dollars, non pour des raisons de gouvernance interne, mais grâce à l’envolée du cours du pétrole. L’Algérie risque de revenir à la case départ si l’on a cette vision du passé que le développement s’assimile aux dépenses monétaires et aux réalisations physiques sans se préoccuper des impacts et des coûts.
Et surtout, si l’on continue dans cette voie hasardeuse de l’assainissement répété des entreprises publiques, plus de 40 milliards de dollars US entre 1991/2008 et l’inefficacité des dépenses publiques conséquence d’un manque de cohérence et de visibilité dans la politique économique et sociale, avec la corruption socialisée qui engendre une démobilisation générale se répercutant sur la productivité globale -Pour le gouvernement, le taux d’inflation a été de 1,6 % en 2005, 3% en 2006, à 3,5 % en 2007 et 4,5% en 2008 (selon l’officiel pour cette dernière période des raisons essentiellement externes dues à l’envolée des prix comme le blé, la farine sur le marché international), ayant prévu des subventions pour la farine, la semoule et le lait et une somme colossale des transferts sociaux représentant plus de 10 % du PIB pour assurer la paix sociale et une inflation selon l’ONS de plus de 6,1% au premier semestre 2009.
Or, selon un document important relatif à une étude sur l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient, du centre de recherche américain, Casey Research en date du 6 mars 2008, le taux d’inflation en Algérie serait 12 % en 2007 et supérieur pour l’année 2008 contre une moyenne de 7/8% au niveau de la région Mena. Car le besoin est historiquement daté et doit tenir compte de la structuration sociale, les ménages algériens étant confrontés à la dure réalité quotidienne.
Ce processus inflationniste est amplifié par l’emprise de la sphère informelle, produit de la bureaucratie centrale et locale qui entretient des relations diffuses de corruption avec cette sphère, (expliquant que les rapports internationaux des trois dernières années 2005/2008 classent l’Algérie à un niveau de corruption élevé), qu’il s’agisse d’intégrer intelligemment, loin des mesures bureaucratiques peu efficaces, contrôlant 40 % de la masse monétaire en circulation avec une intermédiation financière informelle.
Tout se traite en cash, alors que la base de l’économie moderne se fonde sur le crédit, et qu’au-delà de 100 dollars, la carte de crédit est souvent exigée. Cette sphère contrôle quatre segments-clefs : celui des fruits et légumes, de la viande, celui du poisson pour les marchandises locales et pour l’importation, le textile – chaussures (posant le problème du contrôle de la douane).
Cette domination de la sphère informelle contraste avec le niveau de la salarisation entre 2000/2008 en nette baisse, accusant une régression au profit des emplois rentes passant, selon mes calculs, moyenne 2006/2008 de 22,10% en 1991 à 20% en 2001 et à moins de 19%, ce ratio étant supérieur à 30% au Maroc et 37% en Tunisie, et varie entre 40/60% selon les pays développés, oubliant ainsi que le salaire est un prix et que le travail est la seule source de richesse permanente. Le constat en Algérie est l’absence d’une véritable concurrence, avec une tendance à la substitution d’un monopole d’Etat un monopole privé plus néfaste , faisant que les circuits entre le producteur et le consommateur (les grossistes informels) ont tendance à se rallonger, la marge commerciale pouvant représenter 2 à 3 fois le prix de production (surtout dans le domaine agricole), ce qui ne peut que décourager le producteur immédiat et l’orienter vers des activités spéculatives et fait que la politique d’encadrement des prix peut s’avérer d’une efficacité limitée, en fonction des moyens mis en œuvre, dans la mesure où le contrôle des prix repose sur le détaillant qui ne fait que répercuter ces surcroîts de distribution. On ne peut invoquer, pour expliquer l’inflation, uniquement les effets des augmentations au niveau de la Fonction publique en 2008 , (le montant étant estimé à environ 170 milliards de dinars annuellement, soit environ 1,8 milliard d’euros, somme dérisoire), la baisse du cours du pétrole, pour preuve, le cours du pétrole a atteint un cours entre 110 /140 dollars , les salaires ayant stagné à une période et l’inflation relativement maîtrisée, ou l’extérieur car avec la crise mondiale nous constatons une déflation (baisse de l’activité, chômage, baisse des prix ) alors qu’en Algérie nous assistons à une stagflation ( récession , chômage et hausse des prix ) . Dans les pays émergents, certes le taux d’inflation est relativement élevé comme en Chine, Inde, Brésil ou la Russie, mais le taux de croissance est supérieur à la moyenne mondiale.
Se pose la question face à la déflation (baisse des prix au niveau mondial,) pourquoi le consommateur algérien n’en bénéfice pas ? La raison essentielle de la non répercussion de cette baisse des prix au niveau mondial est que la banque centrale d’Algérie a dévalué simultanément ( et c’est un paradoxe puisque la cotation de ces monnaies n’évolue pas dans le même sens) le dinar par rapport à la fois au dollar et à l’euro , mais comme le montre les dernières statistiques douanières d’avril 2009 n’ayant pas eu d’impact évident sur la valeur des importations. La raison du processus inflationniste, liée profondément à la logique de l’accumulation en Algérie est structurelle ballotté entre deux logiques, la logique rentière portée par le lobbys des importateurs, 13.000 importateurs recensés mais avec une concentration pour moins d’une centaine qui se sont appropriés les 40 milliards d’importation en 2008, et la logique dite entrepreneuriale minoritaire au sein du pouvoir.
C’est la raison principale que c’est en période de chute des cours du pétrole que les réformes sont menées certes timidement et que depuis 1986, l’Algérie est dans une interminable transition n’étant ni une économie étatisée, ni une véritable économie de marché concurrentielle, d’où le peu d’efficacité tant de la régulation politique, sociale et économique. Si le processus inflationniste continue à ce rythme entre 2009/2010, cela aura des incidences sur le taux d’intérêt des banques qui devraient le relever au moins de deux à trois points par rapport aux taux d’inflation réel, si elles veulent éviter la faillite. Où, alors l’Etat devra recourir à nouveau à leur assainissement qui a coûté entre 2002/2008 au Trésor plus de 5 milliards de dollars US. Cela freinerait à terme le taux d’investissement utile, la plupart des opérateurs économiques préférant se réfugier dans les activités et spéculatives à court terme.
Cela explique la faiblesse du pouvoir d’achat, le Smig étant à 120 euros contre une moyenne de 150/200 au Maroc et en Tunisie. Lié à l’aspect précédent , doit être pris en compte l’analyse des couches moyennes productives pilier de tout développement en voie de disparition , des enquêtes sur le terrain montrant en comparaison au Maroc et à la Tunisie (il existe des disparités par strates du fait que la politique salariale dans ces deux pays favorise les couches moyennes productives et non les rentières comme en Algérie), que le niveau de vie des fonctionnaires algériens en termes de parité du pouvoir d’achat (tenant compte qu’en moyenne 80/90 dinars = 1 euro, avec la dévaluation récente ) est plus élevé au Maroc et beaucoup plus en Tunisie. Et que la mensualité d’une manière générale d’un enseignant du primaire au supérieur supposé former les cadres de demain, en fin de carrière, est environ d’un tiers de celles de ses collègues marocain et tunisien, avec les nouvelles augmentations de 2008( moins du un tiers par rapport au salaire d’un simple député ou sénateur pour un professeur d’université ) et 80% de ce montant en retraite,( donnant un écart de un quart du fait que retraite des hauts cadres est de 100%) sans compter les conditions de travail bien plus meilleures et surtout la considération (statut de l’élite au niveau de la société en Algérie dévalorisé).
Et, phénomène nouveau, il s ‘agit de prendre en compte les crédits à la consommation, où on assiste à l’endettement constant des ménages pour certains biens durables (prêts voiture, logement par exemple), un prêt de 100 millions de centimes algériens en 2009 traduit un remboursement, tenant compte des intérêts composés, de 150 en 2012 dont l’effet à terme est une détérioration du pouvoir d’achat ce qui implique d’analyser les liens dialectiques entre la concentration du revenu source d’injustice sociale au profit de couches spéculatives au détriment à la fois des producteurs de richesses et de la majorité des ménages algériens et le processus d’accumulation du capital.
Paradoxalement, la crise du logement (même marmite, même charges) et des distribution de revenus sans création de valeur au nom de la solidarité (bien que la destination des transferts sociaux ne concerne pas toujours les plus défavorisées) permettent à une famille de disposer de plusieurs revenus reportant dans le temps provisoirement les tensions sociales dans la mesure où toute Nation ne distribue que ce qui a été préalablement produit.
IV- Quel taux de croissance pour créer 3 millions d’emplois et améliorer le pouvoir d’achat entre 2009/2014 ?
Les rapports en date du 22 avril 2009 du FM et celui de l’OCDE du 14 mai 2009 , outre qu’il révise à la baisse la croissance de l’économie mondiale, influant sur la demande d’hydrocarbures, dont les recettes en devises sont de 98%, sont inquiétants pour l’Algérie pour trois raisons fondamentales.
Première raison, face à la croissance de la population active et une réduction du taux de chômage actuel cela implique un taux de croissance selon l’avis unanime des organismes internationaux entre 7/8% sur plusieurs années cumulées, taux d’ailleurs confirmé officiellement à maintes reprises par le gouvernement algérien, pour atténuer à terme les tensions sociales.
En effet la population en âge de travailler augmente chaque année de près de 3,4%. La pression sur le marché du travail est le fait des jeunes qui représentent 50% de la population active. La production et les exportations hors hydrocarbures y compris les services marchands, liées à l’approfondissement de la réforme globale sont la condition sine qua non pour la création d’emplois durables existant d’ailleurs un sureffectif au niveau des administrations et de certaines sphères économiques étatiques en comparaison avec des pays semblables.
Deuxième raison, le taux de croissance de 2,1% en 2009 et 3,5%en 2010, selon ces rapports le FMI est extrêmement faible comparé à la dépense publique. Comparé aux dépenses sur la population, des pays similaires en voie de développant dépensant le 1/3 de l’Algérie ont des taux de croissance plus importants. Ces dépenses ont été rendues possible essentiellement grâce aux recettes exceptionnelles des hydrocarbures entre 2007/2008 dont le cours moyen pour 2007 a été de 75/77 dollars et 100/110 dollars pour 2008.
Qu’en sera-t-il si le cours stagnent à 50/60 dollars ou encore moins entre 40/45 dollars, Sonatrach et Sonelgaz absorbant pour ses nouveaux investissements entre 2009/2013, à un cours de 50/60 dollars avec 50% de ses recettes des hydrocarbures et plus de 60% pour un cours entre 40/50 dollars et tenant compte d’un dollar constant 1 euro égale à 1,28/-1,30 dollar.
Comme cela rendrait non rentables certains projets gaziers et pétrochimiques hautement capitalistiques alors que dans d’autres pays, elles traversent une crise de demande bien que déjà amorties. Troisième raison. Il existe des lois économiques universelles applicables à tous les pays : le taux d’emploi dépend du taux de croissance et des structures des taux de productivité.
On ne crée pas des emplois par des lois et décrets : c’est l’entreprise qui crée l’emploi. Il s’ensuit qu’avec un taux de croissance de 3%, l’Algérie évitera les licenciements massifs, comme cela se passe de par le monde (plus de 20 millions en Chine depuis la crise). Or, Sonatrach ne créant pas d’emploi est déjà en sureffectifs, pour créer trois millions d’emplois, il faudra un taux de croissance entre 2009/2013 de 6/7% minimum par an.
Avec les taux de croissance 2/3%, l’on pourrait créer moins de 50% du programme à moins que le gouvernement ait des solutions innovatrices loin des actions de distribution de salaires fictifs au nom de la solidarité ou des milliers de jeunes s’adonnent temporairement à désherber les routes ou à faire et refaire des trottoirs. C’est dans ce cadre que je juge utile d’analyser le dernier rapport de l’ANDI (agence nationale de l’investissement) qui a annoncé pour 2008 un volume des investissements enregistrés en 2008 de 2 402 milliards de dinars, le montant global des IDE en partenariat, en Algérie, étant passé de 145,7 milliards de dinars en 2007, à 897,6 milliards de dinars, le tout en 2008 avec 16 925 projets et la création de 196 754 postes d’emploi. C’est que le bilan de l’ANDI ne tient pas compte de l’impact de la crise mondiale qui verra inéluctablement, confirmé par l’ensemble des rapports internationaux, une contraction des investissements directs étrangers et une baisse de la demande tant locale qu’internationale.
Par ailleurs ces déclaration sont en contradiction avec le bilan dressé à la réunion du Conseil national de l’investissement (CNI), fin mai 2008 où il a été établi que sur 11 400 projets d’investissements nationaux et étrangers enregistrés en 2007 par l’Agence nationale de développement de l’investissement (ANDI), pas moins de 8000 concernent un seul secteur plus de 70%: les transports de personnes et de marchandises. Et que sur les 11 400 projets agréées par l’ANDI – donc ouvrant droit à d’importantes mesures de soutien de l’Etat- sont concentrés au niveau d’une dizaine de wilaya du nord du pays. Plus inquiétant, sur tous les dossiers présentés, seuls 136 sont des investissements étrangers se concentrant surtout au niveau BTPH et les services avec une rentabilité à court terme, et donc étant attiré par les réserves de change étant sur d’être payé. Ainsi, les résultats des organismes chargés de l’emploi (ANDI l’ANSEJ , le CNAC-) sont mitigés malgré les nombreux avantages accordés.
En conclusion, il y a donc risque de tensions sociales croissantes en cas d’amenuisement des ressources financières, les dépenses 2008/2009 étant à hauteur de 78 dollars le baril selon le FMI ne posant pas de problèmes pour deux années 2009/2010 (mais que sont 140 milliards de dollars de réserves de change, une goutte dans l’océan des bulles financières mondiales). Car en cas de persistance de la crise qui influe sur la demande d’hydrocarbures, les tensions budgétaires devaient se manifester, si le cours du pétrole est entre 55/60dollars courant 2012, et pour un cours entre 40/45 dollars fin 2010 début 2011.
Avec en plus le risque d’un retour à l’inflation, principalement due à l’inefficacité de la dépense publique, vecteur de concentration des revenus au profit de couches spéculatives, qui ne peut qu’entraîner une détérioration plus poussée du pouvoir d’achat des Algériens et impliquant la hausse des taux d’intérêts des banques primaires, si elles veulent éviter la faillite, (ou à des recapitalisations de l’Etat) afin d’éviter de décourager l’investissement productif.
Cependant existent des possibilités pour augmenter le taux de croissance en Algérie qui recèlent d’importantes potentialités malgré la crise, d’au moins deux points, supposant une nouvelle gouvernance stratégique des institutions et des entreprises. D’où l’urgence d’une profonde mutation systémique loin des intérêts de la rente, le blocage essentiel de l’investissement local et étranger source de création de valeur, comme je l’ai montré dans une interview (fin 2008) au quotidien économique français les Echos, étant le terrorisme bureaucratique, l’instabilité juridique, produit de la démarche administrative autoritaire, qui se nourrit du manque de visibilité et de cohérence dans la réforme globale. AM –
Docteur Abderrahmane MEBTOUl Expert International
Professeur d’université en management stratégique (sciences Economiques)
NB- Abderrahmane Mebtoul a dirigé une équipe pluridisciplinaire composé d’ économistes, de sociologues, de démographes et de cadres de l’Etat entre janvier 2006 et mai 2007 relative à une importante audit pour les pouvoirs publics algériens , la première du genre en Algérie, qui a contribué à la revalorisation de la grille de la fonction publique : « Face aux mutations mondiales, propositions d’une politique de l’emploi et des salaires pour l’Algérie entre 2008/2014» (5 volumes 925 pages)