Impact du néo-libéralisme. La nouvelle politique algérienne de renationalisation face aux transactions boursières mondiales

Redaction

Comme je l’annonçai, il y a de cela plusieurs années entre 1994/1995 dans les colonnes du quotidien d’Oran El Watan, El Khabar, du Soir d’Algérie, et depuis 2009 dans FocusAlgerie.COM, il faut être attentif aux conséquences du néo-libéralisme pour éviter des erreurs de politique économique qui peuvent se chiffrer en dizaines de dollars. Il s’agit d’éviter de mauvaises solutions à des problèmes mal posés. Ce n’est plus une affaire entre l’Algérie et Orascom Télécom mais entre l’Algérie et le groupe russo-norvégien Vimpelcom.

La problématique de cette contribution est de poser l’évolution du droit des affaires au niveau international en donnant des précisions sur certaines notions que certains confondent et surtout de poser l’urgence d’une adaptation de l’Algérie face aux contraintes de la réalité amère des mutations mondiales. Et les responsables algériens semblent avoir un long chemin à faire pour pénétrer dans les arcanes de la nouvelle économie du fait du blocage culturel de certains responsables, dans la pratique des affaires n’existant pas de sentiments et les russes en réclamant environ 8 milliards de dollars pour la cession de Djeezy, comme ils se sont opposés par le passé à la réduction de la production, de gaz étant le concurrent direct de l’Algérie en Europe, le montent clairement ayant par ailleurs profité des réductions de l’OPEP pour devenir le premier exportateur mondial depuis juillet 2009. On ne peut faire que ce triste constat : une véritable cacophonie et incompétence gouvernementale dans la gestion de ce dossier largement médiatisé par les pouvoirs publics eux-mêmes ternissant l’image de l’Algérie. Comme je l’annonçais dans les colonnes de la presse nationale et internationale, l’Etat algérien ne pouvait bloquer la vente de Djeezy, filiale d’un holding international coté en bourse, alors que certains soi distants experts avec un chauvinisme malsain, ces experts organiques aux ordres selon l’expression heureuse de Antonio Gramsci , affirmaient haut et fort, le contraire, induisant en erreur les autorités du pays . Or un expert digne de ce nom et plus à fortiori un intellectuel n’est pas de produire des louanges par la soumission contre productive pour le pouvoir lui-même en contrepartie d’une distribution de la rente, mais d’émettre des idées constructives, par un discours de vérité.



I- SITUATION DE DJEZZY AU 31/12/2009

Selon son site 2009, présent au Moyen Orient, en Asie et en Afrique, Orascom Telecom Holding (O.T.H.) est un leader dans le domaine de la téléphonie et des nouvelles technologies. Implanté en Algérie, en Egypte, en Tunisie, au Pakistan, au Bengladesh, en Irak et, au Zimbabwe, comptant 50 Millions d’abonnés dans le monde. Par décret exécutif du n° 02-219 du 31 juillet 2001, l’Etat algérien a approuvé l’octroi d’une licence d’établissement et d’exploitation d’un réseau public de télécommunications cellulaire de norme GSM à la société Orascom Telecom Holding SAE agissant au nom et pour le compte de la société Orascom Telecom Algérie pour 737 millions USD. Suite a l’appel d’offre lancé en date du 27 décembre 2003 par l’Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications, Orascom Telecom Algérie a remporté également une licence VSAT en Algérie pour la somme de 2.050.000$ délivrée par le décret exécutif n° 04-107 du 13 avril 2004 portant approbation de licence d’établissement et d’exploitation d’un réseau public de télécommunications par satellite de type VSAT et de fourniture de services de télécommunications au public en précisant que l’opérateur Wataniya a remporté la troisième licence de téléphonie mobile la même année , en janvier 2004 pour 421 millions de dollars, Nedjma, marque commerciale de WTA, qui a débuté son exploitation commerciale le 25 août 2004. Orascom Télécom Algérie a pris des parts de marché croissants ce qui est logique pour toute entreprise privée, appartenant à l’Etat régulateur de jouer son rôle à travers des mécanismes transparents.

Ainsi, l’opérateur privé de téléphonie mobile Djezzy a réalisé un chiffre d’affaires de 1,86 milliard de dollars en 2009 soit une baisse de 8,5% par rapport à 2008 (2,04 milliards) selon son bilan financier annuel publié, officiellement sur son site. Toujours selon son bilan officiel que les bénéfices se sont élevés à 580 millions de dollars en 2008. L’Ebitda (revenus avant intérêts, impôts, dotations aux amortissements et provisions sur immobilisations) a enregistré une baisse de 17,3% passant à 1,06 milliards de dollars en 2009. La marge d’Ebitda est évaluée à 57,1% en 2009 contre 63,2% en 2008. Cette baisse s’explique essentiellement, selon OTA par la hausse des investissements de l’opérateur privé Djezzy, en 2009. Les investissements de Djezzy auraient augmenté, selon la même source, de 56%. Selon toujours son site, Djeezy aurait 14,8 millions d’abonnés et 59% du marché algérien à la fin de l’année 2009.

Était-il nécessaire , pour évaluer Djeezy, de vouloir dépenser la somme faramineuse de 70 milliards de centimes (7 millions d’euros ) attribué de surcroit de gré à gré, pratiques que les autorités dénoncent depuis des mois, pour évaluer simplement le goodwil ( c’est à dire la part de marché ) alors qu’il fallait uniquement et simplement analyser l’évolution de la cotation, boursière, fluctuante d’ailleurs selon les aléas du marché tant local qu’international, le montant de cette évaluation, selon mes estimations, ne devant pas dépasser 500 millions de centimes au plus 1 milliard de centimes. Et qu’en a été t-il également de l’évaluation du dossier de Lacom : quel mode de passation des marchés, quel est le montant, expertise totalement algérienne ou sous traitance avec des bureaux d’études étrangers avec transfert de devises ? Je rappelle que dans tous les cas de figure sont posées les techniques d’évaluation qui, quelque soit la technique, l’approche patrimoniale, le goodwill- les approches prospectives, donnent des résultats différents d’où la nécessité de tenir compte des variations imputables tant à la situation politique et économique interne qu’aux paramètres internationaux. L’enseignement majeur que l’on peut tirer est qu’il n’y a pas de modèle universel.

Un exemple concret des fluctuations boursières concernant justement le géant russe Gazprom. En 2006, Gazrprom est la troisième capitalisation boursière mondiale après Exxon Mobil et Général Electric avec une valeur boursière estimée à 300 milliards de dollars selon le rapport du professeur Christophe Defeuilley publié à sciences po le 05 avril 2009. En 2008 avant juste la crise , sa capitalisation était évaluée à 8,12 trillions de roubles (environ 340 milliards de dollars), devant China Mobile, évaluée à 337,2 milliards de dollars, selon les données de l’agence Bloomberg, dépassant l’américain General Electric, leader historique des Bourses mondiales, dont la capitalisation boursière avait atteint 325 milliards de dollars. Après la crise d’octobre 2008, confronté à une baisse de la demande de gaz sans précédent en Europe selon la société d’analyse américaine PFC Energy50 après que la capitalisation s’est établie à environ 75/80 milliards de dollars , la cotation a rebondi au 31 décembre 2009 à 144,2 milliards de dollars, Gazprom étant largement dépassé par la société chinoise PetroChina (353,1 milliards de dollars) qui a détrôné l’américain Exxon Mobil Corp. (323,7 milliards de dollars), l’australien BHP Billiton (201,1 milliards de dollars) arrivant à la 3ème place.

II-ÉVOLUTION DU FEUILLETON DJEZZY DE 2007 A OCTOBRE 2010

C’est dans ce cadre mouvementé qu’il est utile de rappeler que plusieurs rumeurs couraient, bien avant le match Algérie Egypte, concernant la vente d’Algérie Djezzy filiale d’Orascom Telecom Holding (OTH). Cela a concerné d’ abord Videndi SA en partenariat avec Cevital le partenaire français ayant démenti l’information, la presse financière s’étant fait également l’écho de cession à Sonatrach. Le PDG d’Orascom Naguib Sawaris, a déclaré le 06 mars 2010 au Journal émirati , The National, qu’il envisageait de céder une partie de son capital ou la possibilité d’une fusion avec l’Emirati Itasal et fin mars 2010, rapporté par le Financial Times, avec l’opérateur sud africain MTN, qui disposerait de 116 millions de clients, mais étant présent surtout en Afrique du Sud, au Nigeria et en Iran. Dans un flash répercuté par bon nombre d’agences de presse internationales le 02 juin 2010, la direction d’Orascom estimait que la firme sud-africaine MTN lui a offert 7,8 milliards de dollars pour racheter «Djezzy» contre une estimation de la Deutsche Bank le 9 aout 2010 de 3,6 milliards de dollars. Selon certaines sources le gouvernement algérien l’estimant entre 2 et 3 milliards de dollars et au maximum 4 milliards de dollars , a installé un comité au niveau du ministère des Finances pour étudier la question de l’évaluation du rachat en relation avec le Gouvernement, et selon la déclaration du Ministre en charge de ce secteur début septembre 2010, cette évaluation a été confiée à un bureau d ‘études algérien après avoir annulé en août 2010, un appel d’offres international pour la sélection d’un Bureau international d’Audit chargé d’évaluer «Djezzy» pour le compte du Gouvernement algérien. Rebondissement, plusieurs médias arabes rapportaient dimanche 3 octobre 2010 que «le processus d’évaluation de la valeur de Djezzy’, confié au cabinet algérien aurait a été suspendu ».

En même temps, l’agence Reuters, citant des traders, rapportait que la maison-mère de «Djezzy», «Orascom Telecom Holding», était proche d’un accord prévoyant la fusion de ses actifs avec le russe «Vimpelcom en vue du rachat de «Wind», le troisième opérateur mobile italien et d’une participation de 51% dans Orascom Telecom, des transactions qui représenteraient au total 6,5 milliards de dollars (4,7 milliards d’euros).

Ces différentes déclarations ont fait réagir le gouvernement algérien qui entend faire prévaloir le droit de préemption qui donne au gouvernement algérien la possibilité de racheter 51% au moins ou la totalité des parts détenus par OTH, soit près de 97%, les 3% du capital restant est détenu par le groupe privé Cevital. Ainsi le 05 octobre 2010, selon les responsables algériens, cités par l’APS les discussions amorcées entre Orascom Telecom (ORTE.CA) et Vimpelcom (VIP.N) ne modifient pas le projet de rachat par l’Algérie de Djezzy, la filiale locale d’Orascom,. Pour le ministre algérien de la Promotion de l’investissement, ce sont deux opérations distinctes. La première concerne une transaction entre deux holdings internationaux et la seconde concerne une procédure de cession de droits d’une société de droit algérien officiellement engagée entre les deux parties suite à la décision de l’Etat algérien d’exercer son droit de préemption prévu par la législation nationale sur les cessions d’actions de la société OTA envisagée par la société mère ».

L’abandon par Vimpelcom de sa position majoritaire dans OTA pour ne rester actionnaire qu’à 49% en gardant le management de la société sera à quel prix ? Le 8 septembre2010, à l’occasion de la visite justement du président russe Dmitri Medvedev en Algérie, le nouveau propriétaire Vimpelcom a offert de céder Djezzy à l’Etat algérien, à « un prix équitable de 7,8 milliards de dollars », étant en positon de force dans la négociation puisque Djezzy ne représente que 10% du business du nouvel ensemble issu de la fusion entre Vimpelcom et Weather. Et à l’issue de cette visite, le Ministre de la promotion, de l’investissement qui affirmait tout le contraire avec ses collègues des Finances et des télécommunications 24h avant, nous apprend qu’il n’était pas au courant et qu’il a appris ce montant par la presse. Le 09 octobre 2010, le fisc algérien réclame 230 millions de dollars à Djezzy et la banque d’Algérie 193 millions dollars pur transferts illégaux de capitaux soit au total 423 millions de dollars.

A cela s’ajoute la taxation sur la plus valeur prévue par la loi de finances 2009 en cas de vente par un opérateur étranger de 20% ce qui donnerait 1,6 milliards de dollars ,si l’on prend en référence 7,8 milliards de dollars réclamé par l’opérateur russe, donnant entre 1 et 2 milliards de dollars, la valeur du marché fluctuant en fonction d’un prix plancher et le maximum du goodwill entre 3,5 et 6 milliards de dollars. Montant que conteste Djezzy autant que la rétroactivité de la taxation non prévue dans le contrat initial datant de 2002. Toujours le 09 octobre 2010, selon le Financtial Times, la société russe des télécommunications Vimpelcom menace le gouvernement algérien de l’ester en justice au niveau des tribunaux internationaux si jamais il venait à nationaliser et à déprécier l’actif de Djezzy. Et dernier rebondissement en date du 11octobre 2010, le gouvernement, via le ministère des Finances, a lancé lundi 11 octobre le processus d’acquisition de Djezzy, filiale d’Orascom Telecom Holding (OTH).

L’Etat algérien va d’abord sélectionner une banque d’affaires qui va l’accompagner dans le processus de rachat de l’opérateur en partenariat avec un groupe étranger.On ne peut faire que ce triste constat : une véritable incompétence gouvernementale dans la gestion de ce dossier largement médiatisé par les pouvoirs publics eux-mêmes ternissant l’image de l’Algérie. Qu’en sera-t-il de la politique du gouvernement algérien des 49/51% alors qu’il aurait fallu privilégier une balance devises excédentaire et un transfert technologique et managérial plus bénéfique ? C’est que dans la pratique des affaires , il n’y a pas de sentiments ( business, business) et la Russie et le Qatar l’on bien fait sentir aux Algériens en s ‘opposant à la proposition algérienne lors de la dernière réunion mondiale du gaz à Oran en avril 2010, tant pour une OPEP/ GAZ qu’à une réduction de la production de gaz ne voulant pas perdre des parts de marché. Et comme preuve , lors de la conférence internationale tenue à Berlin le 21 mai 2010 ayant pour thème « dialogue énergétique: Russie-UE, aspect gazier », le président de GDF Suez Jean-François Cirelli, l’allemand E.ON Ruhrgas et le président de l’Union européenne de l’industrie du gaz naturel (Eurogas) Domenico Dispenza ont estimé que les accords à long terme sur la livraison de gaz à l ‘Europe doivent pouvoir subir des modifications compte tenu de la conjoncture économique et demandé à Gazprom de baisser le prix du gaz prévu par leur contrat à long terme ou de changer certaines clauses dans les contrats. Or, Gazprom, qui indexait jusqu’ici ses prix sur ceux du pétrole, a accepté de vendre une partie du gaz aux prix spot qui sont environ 25% inférieurs aux prix des contrats à long terme, l’écart pouvant être plus important si le prix du gaz sur le marché spot reste au niveau de 4/5 dollars le MBTU.

III- L’ALGÉRIE PEUT- ELLE INVOQUER LE DROIT DE PRÉEMPTION ET LA RÉTROACTIVE DES LOIS SANS VIOLER LE DROIT INTERNATIONAL ?

Aussi, il est utile de donner quelques précisions concernant le droit de préemption et la rétroactivité du droit. Une nationalisation (ou étatisation) est un transfert de la propriété privée à l’État, une substitution de la propriété publique à la propriété privée soit avec ou sans indemnités, pratique en voie de disparition, vision que même la majorité des tiers mondistes abandonnent, insistant sur le rôle de l’Etat social conciliant efficacité économique et une profonde justice sociale tant au niveau interne qu’au niveau mondial, la Russie et la Chine fondateurs du communisme allant vers une économie de marché maitrisée. L’expropriation est une procédure qui permet à une collectivité (Etat, collectivité territoriale ou organisme assumant une mission de service public) d’obliger une personne privée, particulier ou société, à lui céder ses droits immobiliers sous réserve d’une « juste et préalable » indemnité.

Le droit de préemption (ou droit de préférence) est un droit légal ou contractuel accordé à certaines personnes privées ou publiques d’acquérir un bien par priorité à toute autre personne, lorsque le propriétaire manifeste sa volonté de le vendre mais pas à n’importe quel prix, au prix du plus offrant. La clause de préemption, qu’elle soit prévue dans les statuts ou stipulée dans un pacte extrastatutaire, a pour objet de réserver aux associés existants, ou à certains d’entre eux, un droit de priorité sur les titres dont la cession est envisagée.

Dès lors qu’elle limite la libre négociabilité des titres, la clause de préemption doit être interprétée de façon restrictive. Par exemple, en doit des affaires les statuts d’une société peuvent prévoir un droit de préemption sur les parts sociales ou actions de l’entreprise au profit des associés ou des actionnaires, afin d’éviter qu’une personne non agréée puisse acheter une partie du capital social. Quand un droit de préemption existe, le propriétaire doit notifier, préalablement à la vente, son projet de vente au titulaire du droit de préemption. Le titulaire du droit de préemption a généralement un à deux mois pour faire connaitre sa réponse.

A défaut de réponse dans ce délai, il est réputé avoir renoncé à son droit de préemption et le propriétaire peut alors vendre son bien librement, mais aux mêmes conditions. (2). Si le bénéficiaire décide de préempter, il le fait aux conditions financières demandées par le vendeur. Il ne doit pas être confondu avec droit d’expropriation strictement encadré par la loi. La différence fondamentale entre un droit de préemption et une expropriation est que dans le premier cas, le propriétaire prend l’initiative de vendre (mais le bénéficiaire du droit de préemption se substitue à l’acheteur) alors que dans le cas d’une expropriation, le propriétaire n’est pas vendeur, et sa dépossession est effectuée d’autorité par l’expropriant, le « juste prix » est alors déterminé par une autorité impartiale.

Dans ce cadre du droit de préemption, une loi peut – elle être rétroactive ? Selon l’éminent juriste Portalis « l’office de la loi est de régler l’avenir ; le passé n’est plus en son pouvoir. Partout où la rétroactivité serait admise, non seulement la sûreté n’existerait plus, mais son ombre même… Que deviendrait donc la liberté civile, si le citoyen pouvait craindre qu’après coup il serait exposé au danger d’être recherché dans ses actions ou troublé dans ses droits acquis, par une loi postérieure ? Le droit se méfie de la rétroactivité (effets d’un acte présent remontant au passé), car elle semble souvent contraire à la sécurité juridique ».Sauf rares exceptions, en droit international, un acte administratif rétroactif est irrégulier et peut donc être annulé en tant qu’il est rétroactif et ne doit entrer en vigueur que postérieurement à son édiction, devant être, en principe plus favorable pour le client afin d’éviter de pénaliser les clients déjà présents. Un exemple récent la condamnation de la France pour rétroactivité d’une loi de finances par la cour européenne des droits de l’Homme (Affaire Joubert c.France – requête no 30345/05) en date du 23 juillet 2009 invoquant l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention qui se lit comme suit « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens.

Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ».Qu’en sera t-il de l’application des dispositions de la loi de finances complémentaire 2009 algérienne qui stipule un taux d’imposition à 20% du taux de l’IRG applicable aux plus values de cession de la partie étrangère (Article 47 Loi de finances 2009) et qu’en vertu de l’article 62 «toute transaction qui ne respecte pas les dispositions légales ne sera pas avalisée par les pouvoirs publics et sera déclarée nulle, article précisant que «l’Etat ainsi que les entreprises publiques économiques disposent d’un droit de préemption sur toutes les cessions de participations des actionnaires étrangers ou au profit d’actionnaires étrangers».

Le grand problème est que cela doit figurer dans le contrat initial et de s’entendre sur la totalité ou une fraction de la vente et sur le prix de cession. Or cela pose problème lorsque cette société est cotée en bourse et qu’elle cède la totalité ou des ventes d’actions partiellement, pratique quotidienne au niveau des bourses mondiales où s’échangent chaque jour des centaines de milliards de dollars (fusion et cession des grandes compagnies ) , qui est le principe du fonctionnement de l’économie mondiale. Cela posera d’ailleurs le même problème pour les autres secteurs où Orascom ou d’autres sociétés étrangères ont a investi en cas de cession au niveau boursier et l’Etat algérien ne peut s’opposer à ces pratiques financières internationales d’autant plus qu’il a ratifié bon nombre de conventions internationales sur la protection de la propriété privée. Comment ne pas rappeler l’histoire de l’entrée du groupe français Lafarge dans les cimenteries algériennes ayant racheté les parts d’Orascom , cette dernière ayant réalisé une importante plus value mais dont la responsabilité entière du préjudice financier subi par l’Algérie relève du Ministère de la promotion de l’investissement qui a mal négocié et non Orascom et Lafarge qui n’ont fait qu’appliquer la pratique commerciale légale en droit des affaires.

Tout en reconnaissant qu’à la différence des entreprises commerciales, en droit des télécommunications, la licence octroyée encadre l’activité de l’opérateur qui en a bénéficié et définit ses droits et obligations et est attribuée pour une durée limitée, étant assortie de conditions spécifiques. Tout au plus, l’Algérie peut donc faire prévaloir les clauses contenues dans le cahier des charges où l’autorité de régulation doit être averti avant toute transaction en application l’article 19 du décret exécutif n°01-124 du 9 mai 2001 que tout projet de cession par le titulaire de la licence des droits découlant de la licence doit faire l’objet d’une demande auprès de l’Autorité de régulation, de l’article 3 du décret 01-219 qui régit le marché du GSM qui note que la licence acquise dans ce cadre « est personnelle et ne peut être cédée ou transférée sans l’autorisation de l’ autorité de régulation(1) .Se pose cette question stratégique : l’autorité de régulation algérienne a-t-elle été destinataire d’un écrit officiel d’Orascom Télécom et lui a-t-elle dans ce cas répondu dans les délais impartis, une non réponse équivalant dans ce cas à un libre consentement car, il ne faut jouer avec le droit.

IV- LA NOUVELLE CARACTÉRISTIQUE DES RELATIONS ÉCONOMIQUES INTERNATIONALES

La mondialisation, processus historique complexe, produit du développement du capitalisme, processus non encore achevé est une réalité. Actuellement l’argent, la technologie, les marchandises franchissent les frontières avec une rapidité et une facilité sans précédent, et ce aidés par la révolution dans les télécommunications, mettant fin à certains mythes d’économie dite « nationale ». Comme cela remet en cause certaines catégories comptables qui ont une portée opératoire de plus en plus limitée comme la production intérieure brute (PIB), le taux d’épargne, le taux de chômage, la productivité dite nationale comme si c’était un phénomène qui dépendait de la seule volonté des gouvernants internes. Aussi, l’Algérie est –elle soumise, comme tout autre pays, face à ses choix d’investissements, aux contraintes internationales.

Ce n’est plus le temps où la richesse d’une Nation s’identifiait aux grandes firmes des Nations , celles-ci ayant été calquées sur l’organisation militaire et ayant été décrites dans les mêmes termes : chaîne de commandement –classification des emplois- portée du contrôle avec leurs chefs- procédures opératoires et standards pour guider tous les dossiers. Tous les emplois étaient définis à l’avance par des règles et des responsabilités pré- établis. Comme dans la hiérarchie militaire les organigrammes déterminaient les hiérarchies internes et une grande importance était accordée à la permanence du contrôle, la discipline et l’obéissance.

Cette rigueur était indispensable afin de mettre en œuvre les plans avec exactitude pour bénéficier des économies d’échelle dans la production de masse et pour assurer un contrôle strict des prix sur le marché. Comme dans le fonctionnement de l’armée, la planification stratégique demandait une décision sur l’endroit où vous voulez aller, un suivi par un plan pour mobiliser les ressources et les troupes pour y arriver. La production était guidée par des objectifs pré- établis et les ventes par des quotas déterminés à l’avance. Les innovations n’étaient pas introduites par petits progrès, mais par des sauts technologiques du fait de la rigidité de l’organisation.

Au sommet de vastes bureaucraties occupaient le rectangle de l’organigramme, au milieu des cadres moyens et en bas les ouvriers L’enseignement , du primaire au supérieur en passant par le secondaire, n’était que le reflet de ce processus, les ordres étant transmis par la hiérarchie, les écoles et universités de grandes tailles pour favoriser également les économies d’échelle. Actuellement une nouvelle organisation est en train de s’opérer montrant les limites de l’ancienne organisation avec l’émergence d’une dynamique nouvelle des secteurs afin de s’adapter à la nouvelle configuration mondiale. Nous assistons au passage successif de l’organisation dite tayloriste marquée par une intégration poussée, à l’organisation divisionnelle, puis matricielle qui sont des organisations intermédiaires et enfin à l’organisation récente en réseaux où la firme concentre son management stratégique sur trois segments : la recherche développement (cœur de la valeur ajoutée), le marketing et la communication et sous traite l’ensemble des autres composants, avec des organisations de plus en plus oligopolistiques, quelques firmes contrôlant la production, la finance et la commercialisation au niveau mondial tissant des réseaux comme une toile d’araignée. Les firmes ne sont plus nationales, même celles dites petites et moyennes entreprises reliées par des réseaux de sous traitants aux grandes. Les firmes prospères sont passées de la production de masse à la production personnalisée (professeur Robert Reich de Harvard ).

Ainsi, les grandes firmes n’exportent plus seulement leurs produits mais leur méthode de marketing, leur savoir faire sous formes d’usines, de points de vente et de publicité. Parallèlement à mesure de l’insertion dans la division internationale du travail, la manipulation de symboles dans les domaines juridiques et financiers s’accroît proportionnellement à cette production personnalisée.

Indépendamment du classement officiel de l’emploi, la position compétitive réelle dans l’économie mondiale dépend de la fonction que l’on exerce. Au fur et à mesure que les coûts de transport baissent, les produits standards et de l’information qui les concernent, la marge de profit sur la production se rétrécit en raison de l’absence de barrières à l’entrée et la production standardisée se dirige inéluctablement là où le travail est compétitif, moins cher et le plus accessible. Mais fait nouveau, depuis la fin du XXème siècle, la qualification devient un facteur déterminant. L’éclatement des vieilles bureaucraties industrielles en réseaux mondiaux leur a fait perdre leur pouvoir de négociation expliquant également la crise de l’Etat providence (avec le surendettement des Etats) et de l’ancien modèle social démocrate qui se trouve confronté à la dure réalité de la gestion gouvernementale.

Ce qui explique que certains pays du Tiers Monde qui tirent la locomotive de l’économie mondiale, se spécialisent de plus en plus dans ces segments nouveaux, préfigurant horizon 2020 de profonds bouleversements géostratégiques recomposant le pouvoir économique mondial avec la percée de la Chine , de l’Inde , du Brésil , de la Russie et de certains pays émergents expliquant le passage d’ailleurs du G8 au 20 dans les grandes réunions économiques internationales. La chute des syndicats corporatistes souvent appendice de pouvoirs bureaucratiques s’accompagne d’un nombre croissant d’accords collectifs.

Les emplois dans la production courante tendent à disparaître comme les agents de maîtrise et d’encadrement impliquant une mobilité des travailleurs, la généralisation de l’emploi temporaire, et donc une flexibilité permanente du marché du travail avec des recyclages permanents étant appelés à l’avenir à changer plusieurs fois d’emplois dans notre vie. Ainsi, apparaissent en force d’autres emplois dont la percée des producteurs de symboles dont la valeur conceptuelle est plus élevée par rapport à la valeur ajoutée tirée des économies d’échelle classiques, remettant en cause les anciennes théories et politiques économiques héritées de l’époque de l’ère mécanique comme l’ancienne politique des industries industrialisantes en Algérie calquée sur le modèle de l’ancien empire soviétique. A mesure que la firme se transforme en réseau mondial, impossible de distinguer les individus concernés par leurs activités, qui deviennent un groupe vaste, diffus, répartis dans le monde. La théorie de l’intelligence économique met nettement en relief ces mutations en insistant sur le fait que c’est plutôt l’ intelligence collective (IC) et non individuelle qu’il s’agit de privilégier afin de favoriser l’émergence et l’interaction positive des différentes parties prenantes composant les organisations, que ces parties prenantes soient internes (salariés, managers) ou externes (fournisseurs, clients), du fait que l’économie est de plus en plus ouverte et que les firmes travaillent avec des parties prenantes éparpillées à travers le monde.

D’où l’importance du management des connaissances (knowledge management ou KM) qui requiert plus que jamais la maîtrise appropriée de technologies de l’information et de la communication (TIC). Dans cette perspective dynamique, d’adaptation à ces mutations , les réponses apportées par les pouvoirs publics sont caractérisées par le rapprochement au niveau régional entre les entreprises, les individus et le savoir , les évolutions récentes de la politique régionale, de la politique des sciences/technologie et de la politique industrielle des entreprises, afin de favoriser les pôles d’activités compétitifs et dynamiques.

Cela a des incidences sur le futur système d’organisation à tous les niveaux, politique, économique et social, supposant un bon management stratégique c’est-à-dire la capacité de coopérer, c’est à dire de dialoguer d’une façon permanente, de communiquer des concepts abstraits , d’animer des groupes complexes, et de prendre les décisions au bon moment rapidement afin d’atteindre un Smig dans le consensus entre les différents éléments composants tant la société que l’entreprise. Aussi, face à une économie internationale de plus en plus complexe, dynamique et imprévisible, les entreprises en quête de progrès et de développement sont confrontées à plusieurs défis : comment conforter leurs positions concurrentielles actuelles, pérenniser leurs activités et conquérir de nouveaux marchés ? Ces questions, se posent avec plus d’acuité, aujourd’hui qu’auparavant, au vu du changement des paradigmes de gestion suscités par la dernière crise mondiale qui préfigurent de profonds bouleversements géo économiques stratégiques horizon 2015/2020.

La transaction entre «Orascom Telecom Holding et Vimpelcom répond à cette logique financière internationale et à une stratégie de pénétration de nouveaux marchés car en rachetant 100% l’italien Wind Italie et 51% l’égyptien Orascom, le groupe russo-norvégien Vimpelcom accède au cinquième rang mondial dans cette filière derrière les géants que sont AT&T, Verizon, Deutsche Telekom et avant Orange (France) . VimpelCom pèsera 21,5 milliards de dollars de revenus avec un excédent brut d’exploitation de 9,5 milliards de dollars et une capitalisation de 17,5 milliards de dollars. Contre une capitalisation boursière par exemple de Deutsche Telekom, courant 2010 45 milliard d’euros soit 57/58 milliards de dollars. Notons que le fondateur de l’Alfa Group Consortium (un conglomérat industriel et financier) est Mikhaïl Fridman, proche tant du président que du premier ministre russe, le cinquième homme le plus riche de Russie avec une fortune qui s’élève à 14,3 milliards de dollars (selon le site russie.net).

V- L’ALGÉRIE FACE AUX MUTATIONS MONDIALES

Aussi y a t-il urgence pour l’Algérie de s’adapter aux nouvelles mutations mondiales et aux pratiques du commerce international si elle veut éviter des pertes qui peuvent se chiffrer en milliards de dollars. A différence de bon nombre de pays émergents, l’Algérie vit toujours sur un système financier administratifs sclérosé, totalement déconnecté des réseaux internationaux, n’ayant pas de bourses, un véritable inceste économique des entreprises d’Etat déficitaires structurellement cotées artificiellement à la bourse d’Alger achetant des entreprises déficitaires renflouées par le canal des assainissements répétées via la rente es hydrocarbures d’où les recapitalisations répétées des banques Et là se pose pour les générations futures une stratégie inexistante hors hydrocarbures. Et nous revenons toujours à la bonne gouvernance, à l’Etat de droit, l’instauration de la démocratie tenant compte de notre anthropologie culturelle étant le but suprême, et à la ressource humaine, au savoir, richesse bien plus importante que cette ressource éphémère, les hydrocarbures qui d’ici 20/25 ans au maximum iront à l’épuisement.

La publication du 02 octobre 2010 de l’Indice Mo Ibrahim de la gouvernance africaine classe l’Algérie à la dix-neuvième place sur 53 pays évalués., venant derrière, le Botswana (3e), le Cap-Vert (4e), l’Afrique du Sud (5e), le Ghana (7e), la Tunisie (8e), le Lesotho (9e), l’Egypte (10e), le Maroc (14e), la Tanzanie (15e), la Zambie (16e), le Mali (17e) et le Burkina Faso (18e). Dans la pratique des affaires tant locales et surtout internationales et les différentes réévaluations des projets dans tous les secteurs avec les partenaires étrangers montrent clairement. qu’il ne suffit pas de signer un contrat sans maturation ( mentalité de nos bureaucrates mus par l’unique dépense monétaire ) mais de bien suivre son cheminement , impliquant un management stratégique tant central que local de hauts niveaux supposant une moralité sans faille des négociateurs En bref, du fait du blocage culturel de certains responsables croyant être toujours dans les années 1970, l’Algérie semble avoir du chemin à faire pour pénétrer dans les arcanes de la nouvelle économie risquant d’hypothéquer l’avenir du pays.

Docteur Abderrahmane MEBTOUL expert international professeur d’Université


NB- Abderrahmane MEBTOUL Expert International professeur d’Université en management docteur d’ Etat (1974) et diplômé » de l’Institut supérieur de gestion de Lille- France – (1973)Ancien président du Conseil algérien des privatisations et directeur et premier conseiller à la cour des Comptes Algérie- Directeur d‘Etudes –Ministères Energie/Sonatrach 1974/1979-1990/1996-2000/2006-

(1)Abderrahmane Mebtoul – Interview à Radio France Internationale(RFI) les nouvelles dispositions de l’investissement en Algérie 5 juin 2009 – Interviews télévision internationale Al Djazeera 23 décembre 2009 « quel avenir pour les investissements étrangers en Algérie » Al Djazeera – le 10 juin 2010 « quel avenir pour Djeezy en Algérie ? » – Jeune Afrique 15 juin 2010 quel est le prix de cession de Djeezy ? En plus de plusieurs interviews dans les organes nationaux de presse et à la radio algérienne, où nous avons averti les autorités sur la cession de Djeezy et d’autres sociétés étrangères à travers le canal boursier où l’Etat algérien ne peut s’y opposer dans la détermination des prix qui dépendent du marché. Voir également contribution juin 2009 Alter Info- le conflit Orascom Télécom/gouvernement algérien – 9 octobre 2009 nos contributions Quotidien d’Oran – Le financier – Nouvelle république – Focus Algérie – 9 octobre 2010 : L’Algérie après la vente de Djeezy par Orascom Télécom, face au groupe russo-norvégien Vimpelcom -voir également Mebtoul- la mondialisation en marche soir d’Algérie novembre 1994 et L’Algérie face aux défis de la mondialisation édition Dar Garb 2004- 148 pages en arabe- français et anglais -diffusion nationale et international.e
(2) René Hostiou et J.-F. Struillou, « Les droits de préemption des collectivités publiques », dans Études foncières, N°135 (septembre-octobre 2008) (ISSN 0183-5912) -Le droit de préemption, La documentation française, coll. « Études du Conseil d’État français », 2008, 118 p. (ISBN 978-2-11-007116-3). – Jean-Étienne-Marie Portalis devant le Corps législatif en 1803, présentant l’article 2 du Code civil français.

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