Bouteflika-Toufik : Je t’aime. Moi non plus.

Redaction

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Depuis quelques mois, une partie de la presse privée algérienne, relayée par la presse internationale, se fait l’écho de scandales financiers dans lesquels sont directement impliqués de hauts cadres de l’Etat et des responsables d’entreprises publiques, qui auraient agi à l’ombre d’hommes politiques véreux et de dissensions subséquentes au sommet de l’Etat.

Fait nouveau, les enquêtes menées pour élucider les tenants et les aboutissants de ces scandales graves ont été principalement confiées non pas à la police judiciaire ou à la justice mais au Département de Recherche et de Sécurité, le DRS, du Ministère de la Défense Nationale, en raison de l’ampleur que la corruption a prise en Algérie, ces dix dernières années, au point de devenir un cancer et une véritable menace sur la sécurité nationale.

Dans leurs nombreuses contributions, des personnalités politiques, des intellectuels et les dizaines de milliers d’internautes qui interviennent quotidiennement dans les forums de débat qui leur sont généreusement offerts par les versions électroniques des quotidiens nationaux indépendants, sont quasi-unanimes que le fléau de la corruption s’est « généralisé » ( Dr Benbitour ), « socialisé » ( Dr Mebtoul ) ou « massifié » ( Dr Abassa ), à cause de l’inertie des pouvoirs publics, qui ont paralysé les mécanismes de contrôle existants sur les plans réglementaire et judiciaire.
C’est notamment le cas de la Cour des Comptes, dont les fonctions de contrôle et de sanction ont été gelées par le Président Bouteflika depuis 1999, pour des considérations personnelles que nous connaissons tous.

En l’absence de mécanismes crédibles et efficients, la lutte contre la corruption prend des allures de règlement de comptes entre les différents qui se partagent le pouvoir en Algérie.

De nombreux observateurs de la vie politique, économique et sociale algérienne doutent que ce soient vraiment des considérations purement patriotiques ou nationalistes qui poussent le clan Toufik-Ouyahia, qui a aussi ses propres brebis galeuses, à affronter aujourd’hui ouvertement ce que Chakib Khelil a appelé « le clan présidentiel », qu’il a contribué, par ailleurs, avec Nezzar, Lamari Mohamed, et les défunts Belkheir et Lamari Smaïn, à installer au pouvoir en 1999 et qu’il a reconduit en 2004 et 2009.

Les véritables causes doivent donc être cherchées ailleurs.

Le contrôle de la rente et la survie du clan en sont les deux principales.

En ce qui concerne la rente, je recommande aux internautes de lire l’article publié par M. Ahmed Djezaïri, dans le monde de Janvier 2010 sous le titre :  » Luttes d’influence autour de la Sonatrach « .
Et repris par LeMatindz du 21 Janvier 2010 sous le titre de « BOUTELIKA – TOUFIK : Luttes d’influence autour de la Sonatrach ».

S’agissant de la survie du clan, il conviendrait de signaler que, d’homme lige du fameux « cabinet noir », qui l’a imposé au peuple algérien, Bouteflika a, en dix ans, acquis une indépendance et une marge de manœuvre non négligeables par rapport à ses tuteurs et ceci grâce à un jeu de chaises et de coulisses, dont il excelle, et à une baraka, qui lui a rarement fait défaut : éviction de Boumaza du Conseil de la Nation, neutralisation de Nezzar, Benflis, Belkheir et Lamari Mohamed et décés de Lamari Smaïn.

De fait, Toufik se retrouve aujourd’hui seul face à un clan présidentiel de plus en plus dominateur, méprisant et surtout, qui a envie de perdurer au pouvoir auquel il a pris goût, même après la mort de son chef.
C’est trahir un secret de polichinelle que de dire que les amis et alliés fidèles de Toufik, comme ceux de Nezzar ou de Lamari Mohamed d’ailleurs , avaient certainement essayé, en vain, d’attirer leur attention sur le risque énorme qu’ils encouraient en adoubant, en 1999, Bouteflika , connu pour sa susceptibilité à fleur de peau et qui n’allait pas se contenter de faire de la figuration ni d’être « un trois quart de président » même s’il a été lynché par Nezzar, qui l’a traité de « canasson » et par Mohamed Lamari, qui l’a qualifié de « candidat le moins mauvais », avant d’être installé à El Mouradia.

Les amis et alliés fidèles de Bouteflika lui ont certainement prodigué les mêmes conseils de méfiance et de prudence au sujet des membres du cabinet noir.

C’est parce que la guerre des clans, à laquelle nous assistons actuellement, est menée pour la survie de chacun de ces deux clans qu’aucun compromis ne serait plus possible entre eux.

La rupture est consommée et dirigée.

Comme les grands prédateurs de la faune et de la flore, un clan doit aujourd’hui détruire l’autre.

Le clan Toufik-Ouyahia aurait l’avantage de la surprise et de ne pas compter dans ses rangs autant de corrompus que le clan adverse, de plus en plus isolé sur les plans national et international pour l’image exécrable qui en est donné dans les médias crédibles.

En tout état de cause, la confrontation, qui va se radicaliser dans les mois à venir, entre ces deux clans, ne doit pas prendre en otage le peuple algérien, qui vit déjà le calvaire au quotidien car celle qui a opposé Zéroual au cabinet noir, entre 1997 et 1998, a profité aux terroristes qui avaient commis des massacres horribles, dont les populations de certaines villes et villages du pays portent encore les séquelles indélibiles.

Qui sera le dernier des Mohicans ?

Amine Benrabah, Bloggeur