Suite à l’entretien vidéo avec Lakhdar Brahimi, Bernard Kouchner, ancien chef de la diplomatie française – que nous avons rencontré à Madrid à l’occasion d’un séminaire organisé du 10 au 12 janvier par l’organisation Casa Mediterraeo – s’exprime sur la position de la France vis à vis du “génocide arménien”. Une prochaine vidéo exclusive de B. Kouchner sera disponible sur sa position par rapport aux propos d’Erdogan sur le “génocide algérien”.
Le 22 décembre dernier, l’Assemblée nationale française vote une loi pénalisant la négation du «génocide» arménien de 1915. Le lendemain, la Turquie décide le gel de sa coopération politique et militaire avec la France et menace Paris de nouvelles mesures de rétorsion. Ankara rappelle même son Ambassadeur à Paris pour «consultations», revenu depuis à son poste, en attendant l’examen par le Sénat français de cette même loi le 23 janvier prochain.
Interrogé par Algérie-Focus, Bernard Kouchner est d’accord avec le parlement français : « il y a eu un côté systématique dans les meurtres multiples, dans les meurtres de masse contre les arméniens ». L’ancien chef de la diplomatie française pense que les turcs ont tort de ne pas ouvrir tous les dossiers « Je crois que les turcs ont tort de ne pas ouvrir tous les dossiers comme nous l’avons fait au quai d’Orsay lorsque j’étais ministre des affaires étrangères ».
Pourquoi les arméniens et pas les autres ?
Certes, mais ne serait-ce pas plus crédible si la France avait agi avec la même insistance et de manière systématique pour tous les autres massacres dans le monde. Les 800 000 morts au Rwanda ou encore les 300 000 morts du Darfour pour ne citer qu’eux ne méritent pas une loi ? Sont-ils moins importants ? Il semblerait que les échéances électorales ont joué un rôle dans la promulgation de cette nouvelle loi… et Bernard Kouchner semble d’accord sur ce point.
« qu’il y ait eu un caractère électorale à ce moment la, cela n’est pas douteux ».
N’est-ce pas le rôle des historiens ?
Dans le même temps il précise que « si on pouvait se passer de la loi ce serait mieux. Les historiens sont mieux placés… » et remet en cause le rôle du parlement : « et on si on pouvait se passer du parlement, car ce n’est pas vraiment son rôle ».
Pourquoi s’occuper de l’histoire des autres avant la sienne ?
Avec un passé colonial aussi lourd que celui de la France et des débordements multiples qu’on classe sous le mot « guerre », la France ne se doit-elle pas d’abord reconnaître les erreurs de son histoire, de purger les sujets qui restent tabou avec ses anciennes colonies, avant de passer des lois pour dénoncer les erreurs des autres…
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