« Que dit ta conscience ? Tu dois devenir celui que tu es », Nietzsche.
Ils sont nombreux à vouloir quitter le pays, tous les moyens sont utiles pour s’enfuir ! Ils sont nombreux les jeunes algériens qui prennent le risque de traverser la Méditerrané ? Mais à quel prix ! Pourquoi en sommes-nous arrivés-là ? Pourquoi nous n’avons pas construit un idéal pour vivre dans notre pays ? Et pourtant notre pays est riche en potentialités : humaines et matériels ?
Le pourquoi du comment a été discuté à satiété : rabâché, reformulé, rediscuté, remis sur la place publique, mais les problèmes restent toujours les mêmes, « le pouvoir » préfère le statu quo et le citoyen reste toujours à sa faim. Les années passent et l’idéal d’aller ailleurs se renforce ! Quelques témoignages, qui nous parviennent dans les réseaux sociaux et dans notre entourage proche, le confirment. Le cas d’un jeune algérien, qui témoigne que l’idée de quitter le pays lui a traversé l’esprit à plusieurs moments de sa vie, mais d’un côté il résiste et de l’autre, il culpabilise de ne pas être parti à temps ! Il écrit que sa vie est suspendue entre le désir paradoxal : être soi ou être un autre ? Il a du mal à accepter ses conditions de vie : l’anarchie, la corruption, « le piston » auxquels il est confronté dans sa vie de tous les jours. Sans oublier les restrictions traditionnelles, y compris les us et coutumes. Il se retrouve exilé dans son propre « chez soi », l’idéal d’être « un autre » est devenu pour lui une nécessité et une sorte d’hygiène mentale ! C’est antinomique, le « chez soi » qui devient « l’autre » ! C’est-à-dire, l’évolution intérieure, le cheminement intérieur, éloigne l’individu de sa société, qui évolue sur un autre rythme que lui ! C’est le cas d’une partie de notre société, où des enfants ont été élevés dans des schémas de vie moderne, mais qui se retrouvent, étant jeunes adultes algériens, dans une société qui ne suit pas leur évolution ! Ils s’intègrent facilement dans les sociétés dites « occidentales » que dans leur propre environnement social !
Certains ont fait le choix de partir tôt, d’autres attendent, espèrent et par la suite se retrouvent avec des engagements qui les ramènent vers la réalité et vers leur fonction sociale. Ils regagnent des rôles où ils ne sont plus acteurs de leur vie, mais ils suivent les mouvements dominants. Se réaliser « soi-même» (vivre pour soi) est écarté pour y céder la place à vivre « pour l’autre » !
C’est courageux, pour un individu ou un citoyen algérien, dans notre société de mener une vie comme il le souhaite, et en particulier quand cet idéal de vie n’est pas partagé par la majeure partie de la société. L’idéal à construire : c’est de donner espoir, d’exister et d’être respecté, avec ses différences, dans notre société. Que la liberté ne soit pas un vain mot, creux par de beaux discours ! Que la liberté ne soit pas réduite à la limite de la liberté de l’autre ! Que la liberté ne soit pas jugée par la morale religieuse ! Que la liberté soit libératrice de nos peurs, de nos craintes, de nos idées dogmatiques ! Que notre liberté devienne une force vive de création, de novation et de rénovation et pas celle de glorification de notre passé glorieux ! C’est à cette liberté que nous aspirons et pas une liberté réfléchie, mesurée et modelée par « d’autres », qui sont en panne d’imagination pour construire un projet de société, qui se respecte !
Yazid HADDAR, neuropsychologue algérien