Me Ali Yahia Abdenour connaît-il la Constitution ? Lors d’une conférence de presse de la CNCD, tenue à l’hôtel «Sofitel», ce juriste chevronné a lancé une phrase plus que polémique. «Si le président de la République est reconnu comme ne pouvant pas assurer ses fonctions, ce sera à l’armée de prendre sa responsabilité», lance Ali Yahia Abdenour.
Dans le fond, la requête du Président d’honneur de la LADDH est ce qu’on appelle plus couramment un appel au putsch. Le militant propose ainsi un «changement» qui s’opère par un coup d’Etat militaire, en parfait déphasage avec la Constitution à laquelle il se réfère. Dans le fond aussi, le militant de la CNCD (partis politiques) commet une monumentale erreur politique et éthique.
Comment peut-on alors militer pour un changement démocratique en Algérie en appelant les militaires à destituer le Chef de l’Etat pour «incapacité», légitimant ainsi ce qu’a fait Ben Ali, 20 ans auparavant ? Les coups d’Etat apportent-ils la démocratie ? Le changement revendiqué n’implique pas-t-il l’institution militaire et son éviction définitive de la chose politique ?
Cet appel veut-il dire que l’Armée est plus républicaine et démocratique que Bouteflika ? Étrange requête qui passe pour le coup complètement inaperçue.
Sur la forme, Me Abdenour a tout faux. L’article 88 qu’invoque la CNCD est clair : «Lorsque le Président de la République, pour cause de maladie grave et durable, se trouve dans l’impossibilité totale d’exercer ses fonctions, le Conseil Constitutionnel, se réunit de plein droit, et après avoir vérifié la réalité de cet empêchement par tous moyens appropriés, propose, à l’unanimité, au Parlement de déclarer l’état d’empêchement. Le Parlement siégeant en chambres réunies déclare l’état d’empêchement du Président de la République, à la majorité des deux tiers (2/3) de ses membres et charge de l’intérim du Chef de l’Etat, pour une période maximale de quarante cinq (45) jours, le Président du Conseil de la Nation, qui exerce ses prérogatives dans le respect des dispositions de l’article 90 de la Constitution».
On se demande bien de quelle Constitution parle Me Ali Yahia puisque comme on peut le remarquer, l’Armée n’est jamais citée par l’article 88 de la Constitution comme alternative ou comme institution assumant la transition. Le contraire aurait même été absurde. Dans l’ordre naturel des choses, c’est au Conseil constitutionnel que le conférencier aurait du faire appel, bien que ce dernier soit inféodé au Président. Mais ceci justifie-t-il pour autant l’appel au putsch ? Non !
Connu pour être un bon avocat, cette déclaration du porte-parole de la CNCD est ainsi à considérer comme un lapsus plus que révélateur. Définitivement, le changement ne peut émaner de tels courants politiques, prônant la lutte des clans alors que le peuple exige leur départ. Tous !
Hicham A.