J’ai observé la polémique Khadra/Daoud et je dois dire que ça ne me regarde pas, ça ne me captive guère et je crois que le commun des Algériens s’en moque.
Il est vrai qu’en rentrant de la couverture d’une émeute provoquée par l’attribution de logements sociaux, dans une wilaya victime naturelle du réchauffement climatique, on n’a pas trop envie de se gaver de mauvais spectacle de cannibalisme littéraire.
Sont-ils vraiment parmi nous, nos deux hommes de lettres ? Je ne le pense pas. L’un croit tenir sa revanche sur l’Algérie qui ne le comprend pas, l’autre s’attribue une mission philanthropique de moraliste complètement hors cadre, puisqu’il accuse le premier de ne pas comprendre ceux qui ne le comprennent pas, sans qu’il fasse lui-même l’effort de comprendre les deux.
Que retenir de tout ça ? Rien de révolutionnaire, nos «élites» ne sont définitivement pas ce qu’elles prétendent être, parce qu’écrire des livres n’a jamais fait d’intellectuels et participer à une marche de la CNCD, en affirmant le faire en tant que journaliste, n’est vraiment pas une preuve d’engagement politique.
Même s’ils ne se souviennent pas de moi, j’ai eu à discuter avec les deux personnages. Bien qu’ils se chamaillent à coup de réponses obscènes, Khadra et Daoud partagent le même mépris atavique de l’Algérien d’en bas qu’ils considèrent comme fainéant, râleur et sans valeur ajoutée, c’est-à-dire la même vision que développe Ould Kablia et le Pouvoir en général, mais en plus savant et exprimée avec une esthétique littéraire.
Pourquoi se font-il la guerre alors ? C’est un combat pour le territoire je présume, à l’image de ce que nous enseigne l’éthologie sur la théorie des mâles dominants qui, arrivés l’un à maturité et l’autre à épuisement, n’ont pas besoin nécessairement de raisons pour engager l’ultime combat pour le règne.
Daoud doit absoluments cesser de jouer les gauchistes romantiques, un rôle qui ne lui colle pas, Khadra doit cesser de se prendre pour le prophète étranger dans son pays. Sinon les deux sont d’authentiques et illustres hommes de lettres et on aimerait bien qu’ils s’y limitent.