Carnage en Norvège : le MRAP accable le FN et la Droite populaire française

Redaction

Cinq jours après la tuerie d’Oslo (lire aussi page 7), la prolifération des idées d’extrême droite islamophobe inquiète à travers l’Europe. En France, c’est le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap) qui a ouvert les vannes en mettant en cause «les partis populistes et les extrêmes droites» dans toute l’Europe qui «portent une lourde responsabilité dans le climat délétère qui pèse sur le continent tout entier». Parmi les coupables désignés, le Front national et la Droite populaire (aile droite de l’UMP). François Hollande, candidat à la primaire PS, a lui estimé hier que «l’extrême droite ferait mieux aujourd’hui de bien maîtriser son langage», même s’il refuse tout «amalgame».

«Visionnaire». Le FN, cité dans la liste des partis nationalistes que contient le manifeste publié par Anders Behring Breivik, auteur de la tuerie d’Oslo, se voit aujourd’hui reprocher d’avoir normalisé les idées islamophobes dans le débat public. Marine Le Pen n’a pas apprécié : «Le Front national est évidemment parfaitement étranger à la tuerie norvégienne, qui est l’œuvre d’un déséquilibré solitaire qui devra être châtié de façon impitoyable», a affirmé la présidente du parti d’extrême droite.

Pourtant, elle semble débordée par ses propres militants. Laurent Ozon, l’un des cadres du FN, expliquait le drame, lundi sur Twitter, par la montée de l’immigration en Norvège. «C’est un membre fraîchement arrivé», minimise Louis Alliot, vice-président du parti. Autant dire que cette sortie incontrôlée n’a pas plu à la direction. Un candidat frontiste aux cantonales de mars dans l’Yonne, Jacques Coutela, a lui aussi fait fort : il a publié sur son blog un billet qui fait de Breivik «un visionnaire face à la montée de l’islamisation de l’Europe». Réaction immédiate de la direction, Steeve Briois, secrétaire général du Front, a annoncé sa suspension.

Pour l’historien Nicolas Lebourg, «la stratégie du FN, c’est de psychologiser l’affaire. On dit que Breivik est fou pour retirer le caractère politique et raciste de son geste.» Ce spécialiste de l’extrême droite dénonce cependant une «surfocalisation» de gauche à droite, en passant par les médias, sur l’extrême droite «en feignant de croire qu’elle fut seule responsable du climat de stigmatisation des musulmans et de conspirationnisme islamophobe». La portée islamophobe de l’acte de Breivik dérange. «L’ensemble des acteurs politiques en France n’arrive pas à garder une ligne droite entre la condamnation de l’islamophobie et celle de l’islamisme radical, versant dans un camp ou l’autre», explique le chercheur à l’université de Perpignan.

Egalement mise en cause, la Droite populaire, peu habile dans l’exercice de l’autocritique, a préféré contre-attaquer. Lionnel Luca, député (UMP) des Alpes-Maritimes, s’est chargé du terrain idéologique : «Le premier responsable de ce climat délétère, c’est l’islamisme. C’est lui qui a créé l’islamophobie, récupérée ensuite par l’extrême droite, puis instrumentalisée par la gauche et le Mrap. Mais, à l’origine, c’est l’islamisme.» Bernard Carayon, député (UMP) du Tarn, et lui aussi membre de la Droite populaire, a demandé la suppression des subventions du Mrap attribuées par l’Etat.

Porosité. Au-delà des polémiques françaises, la relative normalisation du discours d’extrême droite est un phénomène européen. La porosité idéologique entre l’extrême droite et la droite classique a introduit dangereusement ces thèses dans le débat démocratique. C’est donc au niveau européen que Pouria Amirshahi, secrétaire du Parti socialiste aux droits de l’homme, a appelé à une réaction : «La seule réponse adaptée pour échapper aux idées radicales, c’est d’enseigner la mixité sociale et les valeurs républicaines à nos enfants. Face à l’extrémisme, une seule solution, l’éducation.»

Source : liberation.fr

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