Charia et cheria.

Redaction

Peut-on employer le vocable de corruption pour désigner la nature transgressive aux lois juridictionnelles ou divines qui aux premières heures de l’indépendance a vite touché certains premiers responsables. Ces derniers, loin d’avoir l’étoffe de gouvernants ont vu tombés entre leurs mains des richesses disproportionnées dont ils n’ont pu mesurer de leurs têtes légères les conséquences d’un acquis éparpillé dès son toucher.

Bien employé[i], cette manne inopinée aurait fait d’El Jazaïr retrouvée ou sinon découverte après cinq siècles d’occupation étrangère, une nation nouvelle en voie expresse d’extension, forte d’une jeunesse avide de conquêtes et de liberté d’entreprendre à toute brassée, créant ainsi un pays dynamique et sain. Malencontreusement ces quelques pseudos intellectuels de la première heure, issus pour la plupart des campagnes incultes pour ce qui est de l’esprit, victimes des lourdes aliénations de la colonisation française, se sont laissés emportés par les vents faciles et interdits de la spéculation personnelle.

N’a-t-on pas vu ou entendu ces personnes démunies qui se sont retrouvés, du jour au lendemain, hauts propriétaires en fracturant impunément et sans jugement les portes des bâtisses et les domaines des colons fuyant la haine aveugle et la razzia. Pourtant bien avant, il y eu aussi des propriétaires indigènes qui à cause de l’arbitraire des forces françaises ont tout perdu et que par éthique et par dignité ne se sont pas acharnés à occuper les lieux abandonnés par ces mêmes français.

A retenir !

Une étrange faculté d’amalgamer la loi et la sharia à la falsification était née dans ce pays.

La loi du plus brute est apparue comme une évidence à employer et leurs acteurs ne savaient pas qu’ils offensaient plutôt leurs compatriotes et l’État naissant que le gaouri et cafir qu’il fallait à tout prix chasser. On peut constater qu’à la base les événements ont pris une tournure défavorable pour l’intégrité absolue du nouveau citoyen algérien doté de son céleste drapeau de couleurs ; vert paradis et blanc immaculé pour l’atteindre, apposé du rouge pour l’étoile et le croissant lunaire symbole d’univers de calcul du temps et de la perception de l’intemporel dans l’accomplissement d’une tâche terrestre juste et ardente.

Une étrange faculté d’amalgamer la loi et la sharia à la falsification était née dans ce pays, c’est comme qui dirait, bénir clairement les écarts. Dieu est certes ghafour mais le juge doit faire appliquer les règles absolues. Les pays européens ainsi que la France ne sont pas épargnés par une justice à double vitesse, on y prétend que lutter contre le blanchiment d’argent et les sombres affaires politico-économiques sont difficiles à endiguer par manque de moyens…

Ce comportement hybride s’installe dans la société algérienne et se développe au fil des années et de sa jeunesse si bien qu’au bout du compte cette pratique de s’offrir des fonctionnaires et des silences en échange des services rendus est devenu intrinsèque dans le cœur des gens et dans les mœurs. Donc le terme « corruption » est bien éloigné de la raison et ne peut être exprimé qu’en dehors du territoire national pour en désigner globalement les carences vis-vis des pays touchés par le poison.

On a commencé à entendre avec une honorable redondance l’expression « avoir du Ktef », les épaules plus ou moins larges qui permettaient au détenteur d’en user pour obtenir par le biais du relationnel toutes sortes de faveurs allant parfois même jusqu’au cœur de l’État. Ceux qui n’en ont pas ont tout simplement recours à l’inévitable rachoua, étrangement pas loin du mot rachat, payer un auxiliaire ou un détenteur de Ktef pour un service rendu.

Singulièrement sous toutes les couches sociales on s’enorgueillit manifestement d’avoir un contact dans telle ou telle cellule officielle qui faciliterait les impossibles transactions parce que la surenchère a largement pris le pas en occultant au passage les actions courantes alors qu’un service citoyen devrait être un droit inviolable dans une république démocratique. Ces actes obscurs n’ont bien sûr pas épargné les divers domaines que représente le pays par ses appareils institutionnels. Furent touché le système éducatif et les diplômes.

Les sujets d’examens pouvaient banalement être achetés. Touchés également les douanes lorsqu’un pot de vin facilitait le transit d’un container alors qu’il était bien plus compliqué de passer par la voie usuelle. L’armée n’était pas épargnée par ces pratiques « brigandines » où il suffisait d’avoir une relation auprès de quelques officiers pourris qui en échange d’une poignée de dinars pouvaient faire signer sans donner de détails n’importe quel papelard. Remarquez que je résume cela au passé par égard à ma patrie dont les hautes autorités, je pense, luttent fermement contre ces pratiques maffieuses et tentent avec leurs moyens d’assainir les institutions.

On arrive à devoir donner 200 DA pour l’obtention rapide d’un extrait de naissance et là je l’exprime au présent !

[i] A l’exception de l’intègre Président Boumedienne qui a bienheureusement pris le train en marche et a permis tant bien que mal à l’Algérie de remettre le pays sur de bons rails mais le mauvais pli était à l’origine bien pris et se creusa davantage après la mort du Raïs.

Lazreg Ould Ahmed

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