Eric Woerth toujours sous pression dans l’affaire Bettencourt

Redaction

La pression s’accentue sur Eric Woerth et l’exécutif au fil des rebondissements de l’affaire Liliane Bettencourt, dont l’un met en lumière les dérogations fiscales dont a bénéficié l’héritière de L’Oréal. Le ministre du Travail a démenti vendredi être intervenu pour le remboursement de 30 millions d’euros dont a bénéficié Liliane Bettencourt en mars 2008 au titre du bouclier fiscal, comme l’affirme Mediapart. « Un ministre du Budget n’intervient en aucun cas dans cette procédure. Contrairement à ce qui est dit, Eric Woerth, alors ministre du Budget, n’a donc pas ‘donné son aval » pour le versement du bouclier fiscal de Madame Bettencourt », précisent ses services dans un communiqué. Selon Mediapart, qui a diffusé l’information jeudi sur la base de sources « au courant du dossier », le chèque de ristourne accordé en mars 2008 à l’actionnaire principale de L’Oréal n’a pu se faire sans l’aval d’Eric Woerth. L’actuel ministre du Travail, qui est trésorier de l’UMP depuis 2002, est soupçonné de conflit d’intérêts dans le dossier Liliane Bettencourt, suspectée pour sa part d’évasion fiscale. Le président du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon, a estimé vendredi que cette affaire finirait « par tourner à la crise d’Etat ». « Le bouclier fiscal, c’est ça. Les gens vont maintenant comprendre de quoi il s’agit », a-t-il commenté sur i>Télé. « La loi doit revenir sur tous ces avantages, ces privilèges, ces espèces de statuts hors droit qu’ont toutes ces personnes à l’unique motif qu’elles sont très riches », a-t-il dit. 50.000 EUROS PAR SEMAINE Pour Jean-Luc Mélenchon, « ceux qui fraudent avec le fisc doivent être pourchassés jusqu’en enfer ». « Ceux qui se sont sauvés, ceux qui se sont planqués seront pourchassés pour rendre gorge ». Une nouvelle révélation a alimenté vendredi un feuilleton qui dure depuis quinze jours et ébranle l’exécutif. L’avocat de l’ex-comptable de Liliane Bettencourt a déclaré sur RMC que cette dernière autorisait sa cliente à retirer chaque semaine de son compte des sommes en espèces pour un montant maximum de 50.000 euros. « Cet argent était distribué », a déclaré Me Antoine Gillot. A la question de savoir si ces sommes avaient pu bénéficier à des personnalités politiques, l’avocat a répondu : « Ça fait partie des possibilités ». L’ancienne comptable, a-t-il précisé, notait précisément dans des carnets à qui l’argent était remis. Ces carnets ont été transmis à un avocat de Liliane Bettencourt, a-t-il dit. Des enregistrements clandestins de conversations entre Liliane Bettencourt et son gestionnaire de fortune, Patrice de Maistre, laissent entendre que des dons financiers ont été accordés à des personnalités de la majorité, notamment Valérie Pécresse et Eric Woerth. Pour l’ancien Premier ministre socialiste Laurent Fabius, la position d’Eric Woerth, maître d’oeuvre de la réforme des retraites, est difficilement tenable. INTERVIEW DE BETTENCOURT « Je pense que c’est très difficile quand on est dans sa situation de mener à bien une réforme importante comme celle-là », a-t-il déclaré sur RTL. Du moins lui sera-t-il « à peu près impossible de rester trésorier du parti majoritaire ». « Dans n’importe quelle démocratie, ça aurait des conséquences sur la composition du gouvernement, mais il se trouve que M. Woerth est en charge d’une réforme importante, donc il (Nicolas Sarkozy) le maintient », a ajouté Laurent Fabius. Le chef de l’Etat a confirmé mercredi qu’il attendrait octobre pour procéder à un remaniement du gouvernement et le secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant, déclare dans une interview au Figaro Magazine qu’il est exclu qu’Eric Woerth démissionne. La ministre de l’Enseignement supérieur, Valérie Pécresse, a défendu sur France 2 « un grand ministre », « quelqu’un d’honnête ». « Aujourd’hui, il est attaqué sur la base de rumeurs, d’insinuations et de calomnies », a-t-elle dit. Elle a estimé que l’enquête de l’Inspection des finances, diligentée par le ministre du Budget François Baroin, permettrait d' »apporter toutes les réponses ». La chaîne de télévision TF1 devait diffuser vendredi soir une interview de Liliane Bettencourt dans le cadre du journal de 20 heures. L’entretien a été réalisé mercredi dernier dans la propriété familiale de la milliardaire, en Bretagne. Elle y juge notamment « déprimant » le procès qui l’oppose à sa fille, Florence Meyers-Bettencourt. L’avocat de cette dernière, Me Olivier Metzner, a déclaré vendredi sur RMC et BFM TV qu’il s’agissait d’un « photomontage ». « Ce ne sera pas l’interview de Liliane Bettencourt, ce sera l’interview de ses conseillers qui ont préparé des petites fiches », a-t-il dit, affirmant que ce bref entretien avait nécessité « trois heures de préparation et d’enregistrement ». « On ne lui laisse aucune liberté tellement on a peur de ce qu’elle pourrait dire », a-t-il dit. Reuters