Harga : pourquoi ?

Redaction

Par Nassim Brahimi

Il n’y a pas si longtemps, un de nos ministres a déclaré que le phénomène des harraga n’était pas problématique en soi. Il en a même déploré, comme on sait si bien le faire chez nous, une focalisation des médias, qui, estime-t-il, est intempestive. Croyant avoir la vision de l’ensemble, ce ministre a prôné une approche globale de l’émigration clandestine qui met à égalité harga et séjour illégal. Il n’en est rien. Ce discours, destiné exclusivement aux voisins européens, illustre l’incapacité de nos dirigeants à comprendre le drame national. Et après avoir joué la carte de la répression, en incriminant el harga, l’Etat algérien s’enfonce encore plus dans sa non-gestion, en optant, tout bonnement, pour le déni. Sous d’autres cieux, les chiffres d’el harga, ou de ses victimes, auraient amené à un plan d’urgence national, à une réflexion approfondie ou, au moins, à un dialogue. En Algérie, ils n’ont fait qu’accentuer le mutisme et la passivité d’un gouvernement totalement déconnecté de la réalité. Non. El harga n’est pas une forme d’émigration clandestine. C’est une forme de suicide qui a la particularité de présenter un côté bénéfique: celui d’arriver sain et sauf à bon port. A défaut, la mort serait moins douloureuse, pense-t-on. Prétendre que harga et «visa grillé» font partie du même registre, c’est assimiler la mort par noyade à un contrôle de police. Le risque n’est pas le même mais sa perception si. Et puis on oublie souvent que ceux qui embarquent ne sont pas bêtes. Ils savent très bien qu’ils ont une chance sur deux de périr en chemin. Et ils savent très bien que même arrivés en Europe, leurs chances de réussir seront divisées par mille. Pourquoi tentent-ils l’aventure alors? A cette question, aucun ex ou futur harrag ne vous répondra. La réplique est souvent aussi candide que la prise de risque elle-même: «je ne sais pas, je veux partir c’est tout», disent-ils. Alors moi j’ai trouvé la réponse: les harraga ne veulent pas partir en Europe. Ils veulent quitter l’Algérie. C’est différent.

N.B.

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