Les ensorcelés de Fadéla Hebbaj. Un roman sur une famille algérienne oubliée de la justice française (+vidéo)

Redaction

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« Au commencement fut l’assassinat de ma mère et de ma sœur. » La première phrase des Ensorcelés a engendré ce livre, un cri de douleur prolongé. Elle annonce son lyrisme d’écorché que corrige, par moments, une violence froide. Il s’agit ici de « déraciner des plaintes » et, au-delà d’un fait divers sanglant, de flétrir plusieurs injustices. La narratrice, au moment des faits, a sept ans. Elle grandit en banlieue dans une famille venue de Kabylie, en Algérie. Son enfance est heureuse, libre. Elle vit entourée de garçons, d’une grande sœur, avec des parents qui l’aiment…

Tout s’effondre le 21 novembre 1972. Un voisin, un Algérien, se glisse dans leur appartement à l’heure du déjeuner. Il est armé. Il tue la mère, blesse mortellement la sœur. Le père, qui dormait dans une pièce à côté, veut s’interposer. Le meurtrier essaie de le poignarder. Il blesse le frère au thorax et remonte chez lui pour attendre la police. On l’interroge. Il prétend que ses voisins l’ont ensorcelé avec un drapeau israélien et un papier portant un texte en caractères hébraïques. La police, puis la justice, après une enquête bâclée, entrent dans son jeu sans rien trouver.

L’homme, certainement dérangé, est relâché.

Le père de la narratrice n’aura jamais une vraie réponse de l’Etat français.

Accablé par ce silence, ce déni, il sombrera dans un désespoir sans fin tandis que sa fille, en s’éloignant, emportera la certitude que sa parole, ce livre, sera écoutée.

Il s’agit d’un livre engagé, dont l’âpreté parfois baroque n’est pas éloignée de celle de l’œuvre d’un auteur dont Fadéla Hebbadj pourrait se sentir proche, Kateb Yacine.

Fadéla Hebbadj enseigne la philosophie. Elle a publié chez Buchet/Chastel un premier roman, L’arbre d’ébène.

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