Les étudiants : professeur quel est notre devenir dans 20 ans ?

Redaction

Les manifestations des étudiants à travers tout le territoire national ne devraient pas être prises à la légère par les pouvoirs publics algériens. Nos étudiants par ces manifestations traduisent leur inquiétude vis-à-vis de l’avenir à l’instar d’autres segments de la société. D’où l’urgence d’un discours de vérité, car que sera l’Algérie dans 20 ans et que sera son avenir avec une population qui approchera 50 millions d’habitants et où l’Algérie dépassera les trois (3) millions d’étudiants et où la demande additionnelle d’emplois annuels dépassera les 700.000/800.000, en tenant compte de l’emploi féminin en croissance ?

2030 c’est demain car l’Algérie est indépendante depuis 49 ans fonctionnant toujours sur la rente des hydrocarbures malgré des promesses sans lendemain. Telle a été a été la question qui m’a été posée par mes étudiants de 4ème année et de magister ? Cette même question a suscité un débat riche qui renvoie à deux hypothèses.

1- La première hypothèse serait le statu quo actuel et des discours d’autosatisfaction source de névrose collective déconnectée des
réalités tant locales que mondiales. L’âge moyen de mes étudiants de fin d’année de licence étant d’environ 22 ans, et 25 ans pour les magisters, ils auront alors entre 42 et 45 ans en 2030. Entre-temps ils auront pour exigences, comme tout Algérien, un emploi, un logement, se marier et avoir des enfants, et donc une demande sociale croissant.
Ceux qui travaillent actuellement, auront entre 60 et 70 ans et seront en retraite. De ce fait, il est à prévoir une forte probabilité d’épuisement des réserves de pétrole et de gaz rentables (25/30 ans), des besoins croissants et moins de devises pour importer. Dans ce cas il y aura forcément suppression du ministère des hydrocarbures et celui de la Solidarité nationale avec le risque d’implosion de la caisse de retraite, et sans de vises pas d’attrait de l’investissement. Il s’ensuivra un chômage croissant, des tensions sociales et une instabilité politique à l’instar des pays les plus pauvres de l’Afrique subsaharienne, et le risque d’intervention de puissances étrangères.

2- Quant à la deuxième hypothèse, elle se base sur les conditions de développement de l’Algérie où l’on aura préparé l’après-pétrole, avec des liens inextricables entre réformes et démocratie tenant compte de notre anthropologie culturelle. L’on aura révisé profondément la
politique socio-économique en misant sur des segments de savoir. Sinon on forme des diplômés chromeurs en évitant l’instabilité juridique, le manque de cohérence et de visibilité. La corruption qui devient dramatique généralisable à tous les secteurs, source d’une démobilisation générale, serait alors combattu par de véritables contrepoids démocratiques et non par des organes techniques aux ordres de peu d’efficacité, dans les faits et non par des textes. Dès lors la sphère informelle intimement liée à la logique rentière, produit de la bureaucratie et des dysfonctionnements des appareils de
l’Etat qui favorise cette corruption, serait intégrée progressivement au sein de la sphère réelle. Le développement, en revanche, se fonderait sur les piliers du développement du XXIe siècle, tels que la revalorisation du savoir, de l’Etat de droit et une nouvelle gouvernance par la réhabilitation du management stratégique de l’entreprise et des institutions, par une libéralisation maîtrisée grâce au rôle central de l’Etat régulateur. Le dialogue politique,
économique et social évitant la concentration excessive du revenu national au profit des rentes spéculatives destructrices de richesses aurait remplacé les décisions autoritaires.

L’on aurait mis fin au gaspillage de la rente des hydrocarbures, de ces dépenses monétaires sans se préoccuper des impacts pour une paix sociale fictive, en gardant une partie de cette rente pour les générations futures, et en ayant mis en place un nouveau modèle de consommation énergétique reposant sur les énergies renouvelables. L’on aurait promu des segments en réhabilitant l’entreprise, loin de tout monopole, seule source de création de richesses permanentes avec des allocations ciblées d’investissement dans le cadre des avantages comparatifs mondiaux en ce monde impitoyable où toute Nation qui n’avance pas recule.

En bref pour que ces conditions se réalisent, l’on aurait réalisé une véritable transition démocratique pacifique.

Professeur Dr Abderrahmane MEBTOUL