Pourquoi le livre de Saïd Sadi provoque-t-il autant de réactions ? C’est la question que se posent beaucoup Algériens. Tout comme Ali Kafi, Benachenhou et le reste de la classe fossile, je n’ai pu lire l’ouvrage du patron du RCD, sauf que ce n’est pas pour les mêmes raisons (calculs de primates : le prix d’un livre équivaut à 20 jours de cigarettes et de café presse, encore faut-il le trouver, le livre).
Le peu que j’en connaisse, donc, provient des quelques lectures de presse à travers les répliques que donnent quotidiennement les mercenaires de la mémoire. Détrompez-vous, je ne vais pas défendre là le livre de Sadi, ni sa version des faits encore moins sa personne. Je ne connais pas, d’ailleurs, Sadi, ni le RCD, tout comme je ne connais rien aux mouvements politiques ou aux turbulences historiques de la guerre de libération. Il est indéniable, cependant, que cet homme, qu’on donnait pour mort politiquement (comme s’il y avait des vivants sur la scène politique) s’est attiré, grâce à son live, les foudres des anciens indélébiles qui se distinguent par des sigles bizarres auxquels je ne pige aussi absolument rien (MALG, GPRA et compagnie). Et ça en soi constitue, pour moi, une preuve que le patron du RCD connaît bien les failles du systèmes et les rouages de la bonne promotion éditoriale. Il maîtrise la technique du buzz, à défaut de pratiquer celle d’el bezz (coup de poing) politique.
C’est la déduction par inversion. En effet, le véritable mérite de Sadi dans cette histoire c’est de faire vibrer le sérail à un moment où on commençait franchement à s’ennuyer et à se demander si on avait bien un pays ou juste des frontières. La petite histoire se rappellera de Saïd comme étant l’homme qui a redonné un peu d’activité physique à Ali Kafi et comme celui qui a mis partiellement à nu les satellites du système et les résidus pourris du temps qui ne veut plus passer.
Quant à dire que le livre en soi ait relancé le débat sur une période sensible de notre histoire, c’est se leurrer affreusement. Au cas où personne ne l’aurait remarqué, il n’y a aucun débat sur la scène publique, il y a juste des attaques de tous bords orientées contre quelques phrases rédigées sur un papier qui aura réussi à ébranler l’arrière-garde des apparatchiks indétachables.
La vérité est que ce pays n’arrive plus à voir plus loin que son nez et se défoule, donc, sur le rétroviseur pour se donner un semblant d’existence. Ce qui me fait vraiment mal ce n’est pas tant qu’on remue aléatoirement les excréments de notre histoire, mais bien plus le fait qu’on ne puisse trouver d’autres qualificatifs pour notre avenir et celui de nos enfants, que celui de chaos.
Nina A.