Rassemblements interdits, conférences empêchées et des policiers aux aguets à tous les coins de rue. Depuis quelques semaines, les actes de répression se sont tellement multipliés qu’il devient difficile de ne pas croire à une véritable dérive totalitaire.
Ainsi, le jour de la célébration de la journée internationale des droits des femmes, des militantes féministes ont été empêchée de tenir un rassemblement sur l’esplanade de la Grande-Poste à Alger. Pourtant, elles ne voulaient que rappeler pacifiquement leurs revendications liées notamment à la protection des femmes. Des policiers, nerveux et belliqueux, leur ont intimé l’ordre de quitter les lieux avant même le début du rassemblement. Les militantes, faisant preuve d’un grand esprit de responsabilité, se sont dispersées dans le calme.
A un kilomètre de là, à la place du 1er-Mai, ce sont d’autres femmes qui ont été empêchées, le même jour et pratiquement à la même heure, de tenir un autre rassemblement. Les mères, sœurs et épouses de «disparus» des années 90 ont été priées de quitter la place publique. Elles n’étaient pas nombreuses. Mais les policiers n’ont laissé aucune chance aux manifestantes, cantonnées dans un espace réduit pour ne pas déborder sur la chaussée.
Par ailleurs, des étudiants en pharmacie et en chirurgie dentaire, qui ne demandent qu’un meilleur statut, ont été chassés manu-militari lorsqu’ils ont décidé de faire entendre leurs voix. Il en est de même pour les anciens militaires radiés du corps de l’armée sans indemnisations, ramassés comme des malfrats !
Alors que la police se limitait, jusque-là à disperser les manifestants, un nouveau procédé, antidémocratiquement ingénieux, est mis en oeuvre: la mobilisation d’un bus de l’ETUSA pour y faire monter des manifestants, de force, en cas de tentative de manifestation.
Les interdictions ne se limitent pas aux manifestations de rue. Des conférences, traitant pourtant de sujets culturels ou sociaux, sont souvent interdits sans aucun argument sécuritaire. C’est le cas de la conférence que devait animer l’écrivain Younès Adli à Aokas, la semaine dernière. La police est venue interdire une action autorisée par l’administration. Une semaine auparavant, une conférence du chercheur en religion, Saïd Djabelkheir, a également été annulée à la dernière minute. Il s’agit visiblement d’une dérive totalitaire à quelques semaines de l’élection législative. Les partis politiques et les personnalités qui y participent font mine de ne rien voir ni entendre.
Essaïd Wakli