Comme dans toutes les villes algériennes, où l’activité associative est presque réduite à néant, Constantine n’échappe pas à cette inertie qui frappe le mouvement associatif dans notre pays. Le peu qui existe est presque marginalisé. « L’association Santé pour tous » a créé un concept original pour toucher quasiment tous les citoyens dans le but de les mobiliser dans leurs quartiers.
En ce mois de décembre pluvieux, la ville des ponts suspendus se prépare à faire sa mue. Dans quasiment tous les quartiers de la ville, toutes les rues se sont transformées en chantiers. L’antique capitale du royaume de Numidie, Cirta, se prépare à accueillir la manifestation «Constantine, capitale de la culture arabe ».
L’association Santé pour tous, installée dans le célèbre quartier populaire Daksi, dans la circonscription administrative de Sidi Rached, est l’une des plus dynamiques des associations constantinoises. Les membres de cette association, qui a été créée en 2008, ont conçu un projet des plus ambitieux pour concevoir une animation positive dans leur quartier. Intitulé « Ma cité en mouvement », ce projet lancé en 2012 rencontre un grand succès. « Notre projet a l’adhésion de dix associations. Nous travaillons en totale symbiose sur des thèmes choisis en concertation et qui ont des impacts positifs directs ou indirects sur les habitants de notre ville. Nous avons 17 projets autour de différents thèmes, à savoir ; la santé, l’environnement, la solidarité, la citoyenneté, la sensibilisation, la responsabilité et beaucoup d’autres encore», explique à ce sujet le Dr Benayoune Assia, chef de ce projet. Notre interlocutrice est la cheville ouvrière de ce collectif qui regroupe des associations de différents genres. Dr Benayoune, médecin de travail de profession, coordonne les actions du collectif et chapeaute ses activités. Avec une voix calme et sereine, un regard pudique et fort, elle incarne « la force tranquille » de ce mouvement. Elle est épaulée par des hommes de différents âges, formant ainsi un collectif très homogène.
L’originalité de ce concept réside dans le fait que l’impact de ce collectif d’associations peut atteindre toutes les tranches de la société : du petit enfant écolier jusqu’à l’homme le plus âgé de la cité, en passant par les femmes au foyer, les jeunes filles et les fidèles dans la mosquée sans oublier les commerçants du plus grand marché de Constantine. « Ma cité en mouvement» ratisse très large.
Partout présents
«Nous menons des actions de sensibilisation envers toutes les tranches de la société. Et grâce à la variété des vocations des associations qui forment notre collectif, nous pouvons atteindre toutes les tranches de la société. Nous comptons parmi nous l’association du comité du quartier, l’association religieuse, l’association sportive, l’association des commerçants, celle des parents d’élèves et de l’environnement et autres. Et quand nous faisons des actions sur le terrain, beaucoup de gens se joignent à nous», affirme-elle encore. «Nous recevons des encouragements de toute la population locale, et c’est ce qui nous motive également à aller de l’avant. D’ailleurs, le projet qui est initialement limité dans le temps, devra se poursuivre et s’améliorer encore plus au regard de l’adhésion des citoyens du quartier à notre projet » ajoute-elle.
Tout le monde adhère,… sauf la mairie
« C’est un projet qui ne demande pas d’avoir des moyens colossaux. Nous avons le soutien et l’adhésion de la population, c’est ce qui est important pour nous», argue un autre membre du collectif. Mais cela ne suffit pas pour mener à bien toutes les actions. «La dernière fois, on a appelé à une journée de nettoyage général de notre cité. Des dizaines de personnes ont répondu à notre appel. Mais ce qui est malheureux, c’est la réaction de l’APC de Constantine qui n’a donné aucune suite à notre sollicitation. Nous avions demandé d’avoir des camions poubelles afin d’évacuer les sacs des ordures ramassés. C’est une APC voisine qui nous a fournis ces camions», s’indigne le même interlocuteur. Malgré le manque de coopération des autorités locales, les membres de ce collectif citoyen activent et poursuivent leurs efforts sans se résigner. Preuve en est, le planning des actions à mener est toujours chargé. «Nous voulons organiser des journées de lecture pour les jeunes. Nous n’avons pas suffisamment de livres. Nous lançons un appel à toutes les personnes, associations, ou organisations qui peuvent nous fournir des livres de prendre contact avec nous. Nous en avons vraiment besoin», lance à ce propos la Dr Benayoune selon laquelle leur demande adressée aux autorités locales afin de leur fournir une tente pour abriter leurs activités est restée lettre morte.
Aller au-delà de l’action immédiate
L’un des principaux buts de ce collectif d’associations, c’est d’aller au-delà des actions menées sur le terrain. «Notre but est d’inculquer les valeurs de citoyenneté, de respect de l’autre, de l’environnement et de la santé pour qu’elles soient adoptées au quotidien par la population. Nous souhaitons voir notre projet adopté par tous les citoyens à l’avenir. Nous souhaitons que la population s’approprie ce projet », confie la chef de ce projet qui ne formule qu’un seul espoir : donner la liberté aux jeunes de travailler, de former des associations. « Il faut les responsabiliser. Ils sont capables de relever le défi et de se prendre en charge. Les jeunes ne doivent pas être marginalisés, c’est eux l’avenir du pays », lance un habitant du vieux quartier populaire Daksi.