Le scrutin présidentiel a semé le trouble autour du Square Port-Saïd qui abrite à Alger le plus important marché parallèle de devises. Depuis quelques jours, le Dinar algérien perd de manière vertigineuse de sa valeur face à l’Euro. Preuve en est, aujourd’hui l’Euro est coté sur le marché parallèle à 159 Da. Un record rarement égalé auparavant, reconnaissent les cambistes du Square, véritable plaque tournante du change parallèle.
Mais qu’est-ce qui explique cette brutale « flambée de l’Euro » en Algérie ? De nombreux cambistes qui proposent cette monnaie précieuse dans la rue expliquent ce record par les événements politiques que traversent le pays. « Au début, tout le monde croyait que le 4e mandat de Bouteflika passera comme une lettre à la poste. Aujourd’hui, les émeutes déclenchées un peu partout à travers le pays contre les représentants de Bouteflika font craindre le pire aux détenteurs des gros capitaux. Les importateurs qui viennent s’approvisionner chez nous décident d’acheter en masse des euros pour les placer à l’étranger au cas où la situation dégénère pour leur business », explique tout de go un des cambistes les plus actifs de ce marché noir.
Un de ses acolytes assure qu’en cette période troublante empreinte d’incertitude, « les devises étrangères considérées comme monnaies refuges sont très demandées ». « Les fortunés savent que si le vent tourne en défaveur de Bouteflika, leurs biens sont menacés. Ils ne supportent aucun risque d’instabilité. Par conséquent, ils viennent jusqu’ici pour acheter tout ce qu’ils peuvent trouver », témoigne encore notre interlocuteur d’après lequel la valeur de l’euro va encore augmenter d’ici le 17 avril prochain. Certains cambistes s’attendent à ce que le prix d’un seul Euro atteigne et dépasse les 160 Da. D’autres connaisseurs qui fréquentent ce marché noir révèlent que des hauts responsables de l’Etat ont suscité la panique lorsqu’ils ont échangé de grosses sommes d’argent.
« Un ministre en poste au gouvernement a converti en euros pas moins de deux milliards de centimes », jurent quelques cambistes qui ont refusé catégoriquement de révéler l’identité exacte de ce ministre. Cependant, ils indiquent que désormais au regard de la très forte demande pour les grosses sommes, en millions d’euros, demandées, « une partie est livrée ici à Alger et la deuxième, l’autre moitié, est expédiée au client en France pour éviter toutes les tracasseries avec les services de sécurité », relève enfin un des acteurs majeurs du Square Port Saïd.