Sur le million d’enfants ayant subi la violence du terrorisme durant les années 90, seulement 50.000 ont été pris en charge psychologiquement. Cette statistique est, selon les spécialistes, révélatrice d’une tendance sociale enracinée qui risque de se perpétuer pendant des générations.
Seuls 50 000 enfants sur le million recensé comme ayant été exposé à la violence durant la décennie noire ont bénéficié d’un suivie psychologique. Un chiffre inquiétant et en même temps révélateur d’une réalité sociale incontestable : celle de la violence chronique.
Le Pr Mustapha Khiati, président de l’Association pour la promotion de la santé et de la recherche scientifique (Forem), a évoqué lors de son passage sur les ondes de la radio nationale, ce mercredi, cette question très délicate des enfants exposés à la violence durant les années de terrorisme. Selon lui, «les années de terrorisme ont joué un rôle important dans l’avènement de cette violence chronique, mais celle-ci a d’autres causes profondes et lointaines qui remontent à la guerre de libération et même avant ».
Dans son analyse, le Pr Khiati a expliqué que plusieurs générations d’Algériens ont été façonnées dans l’acceptation de la violence depuis 1830, ce qui a contribué à la rendre banale. Pour lui, cette violence a poursuivi son cheminement des années durant pour atteindre son point culminant durant la décennie noire.
Les enfants n’ont pas été épargnés par les violences des années 90, a-t-il indiqué, tout en soutenant que l’essentiel des actes violents commis actuellement sont le fait de ces mêmes enfants.
Ce phénomène qui ronge actuellement la société algérienne est donc la résultante d’une accumulation historique qui a fini par exploser durant les années 90. Une idée également soutenue par la communauté scientifique qui affirme qu’«on ne peut évoquer la question de la violence en Algérie sans revenir aux évènements qui ont marqué la décennie 1990-2000 », lit-on dans les conclusions d’un colloque national sous le thème « Figures de la violence en Algérie / Aspects psychologiques et sociologiques », qui s’est tenu en mai dernier.
Concernant la prise en charge psychologique de cette jeunesse traumatisée, l’intervenant a affirmé que le peu de victimes qui ont bénéficié d’un suivi s’en sortent relativement bien, mais le traumatisme les marquera à jamais. La prise en charge psychologique, explique-t-il, «n’efface pas ces traumatismes, mais elle les atténue un tant soit peu et les victimes ne peuvent que la perpétuer à des degrés divers», a-t-il ajouté.
Pour les autres, c’est-à-dire ceux qui n’ont pas bénéficié de suivi psychologique, le constat est alarmant. « Si les victimes ayant bénéficié de suivi ont pu un tant soit peu s’intégrer normalement dans la société, les choses sont totalement différentes pour les autres. Les enfants qui sont toujours hantés par les démons des années 90 sans avoir eu de soutien psychologique se livrent à des violences extrêmes. Pour eux, c’est un comportement normal », conclut-il.
Massi M.
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