Environnement/ Grand retour d’un ministère dans le gouvernement Tebboune

Redaction

Updated on:

La création d’un ministère de l’Environnement et des Energies renouvelables et la nomination à sa tête d’une femme, Fatma-Zohra Zerouati, militante écologiste et ancienne journaliste, sont à la fois une grosse surprise et une innovation de taille dans le gouvernement d’Abdelmadjid Tebboune.

Peu d’observateurs s’attendaient au retour de l’Environnement dans la nomenclature de l’Exécutif comme ministère à part entière, et ceux qui n’excluaient  pas cette éventualité n’ont sans aucun doute jamais pensé que les Energies renouvelables «déménageraient» de la Tour du Val d’Hydra pour se loger aux Quatre Canons, dans le centre d’Alger, près du Palais du Gouvernement, dans le bâtiment qui abrite le ministère de l’Environnement.

Les énergies renouvelables rattachées à l’environnement

Il y a deux ans, en mai 2015, un remaniement gouvernemental partiel avait fait disparaître l’ancien ministère de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement (MATE) en dispersant ses deux départements, l’un, l’«Environnement», rattaché au ministère des Ressources en eau, alors que l’autre, l’«Aménagement du territoire», était érigé en ministère incluant aussi le Tourisme et l’Artisanat. Dans le bâtiment des Quatre Canons, au niveau du 5e étage, un mur a été placé sur les escaliers pour marquer la séparation entre l’Environnement, relégué dans la partie basse (qui va de la porte du bas, au rez de chaussée, au 5e étage) et l’Aménagement du territoire qui a pris la partie haute, «noble», se terminant au 10e où se trouve le bureau du ministre avec une vue imprenable sur la baie d’Alger. On raconte qu’une vraie course de vitesse a eu lieu entre les deux ministres concernés qui ont hérité des morceaux du MATE pour l’occupation du «vrai» bureau ministériel, et c’est l’Aménagement du territoire qui a gagné.

En mai 2017- quelle belle revanche sur le sort !- l’Environnement revient par la grande porte, et l’Aménagement du territoire quittera certainement les Quatre Canons, étant logé maintenant en troisième position dans le ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales. Logiquement, les Energies renouvelables devraient avoir leurs bureaux dans une partie du bâtiment des Quatre Canons.

Scepticisme

Mais, pour y faire quoi ? C’est plutôt le scepticisme dans le monde algérien de l’énergie, dominé, voire écrasé, par des spécialistes et experts très attachés aux ressources fossiles que sont les hydrocarbures; certains d’entre eux seraient même partisans de franchir le Rubicon sur la question de l’exploitation du gaz de schiste. Déjà, les pro-fossiles ne manquaient pas d’arguments pour semer le doute, sinon le discrédit, sur le programme de développement des énergies renouvelables. Ils pensent certainement avoir un argument supplémentaire avec cette sorte d’autonomie prise par les Energies renouvelables par rapport à la maison-mère l’Energie. En effet, sans les ressources financières de Sonatrach et de Sonelgaz, sans les moyens de réalisation et l’expertise du secteur traditionnel de l’énergie, le ministère de l’Environnement risque de traîner les énergies renouvelables comme un boulet inutile.

Pourtant, le tandem Environnement-Energies renouvelables pourrait ne pas être né d’une lubie. Dans le nouveau schéma, la motivation économique (épargner des quantités de gaz qui seraient destinées à l’exportation) est toujours présente mais devient secondaire par rapport aux considérations écologiques, qui la renforcent en lui ajoutant une dimension mondiale (le fameux «penser globalement, agir localement») avantageuse pour trouver les financements externes. En décembre 2009, à la COP15 de Copenhague (15ème conférence des Nations unies sur les changements climatiques), les pays développés ont promis 100 milliards de dollars par an, dès 2020, aux pays en développement pour les aider à faire face à la lutte contre le changement climatique. L’Algérie a fait part de son intention de solliciter ces ressources pour son plan de lutte contre les changements climatiques.

Une «importante et lourde responsabilité »

Le «transfert» des Energies renouvelables vers l’Environnement traduit-il, en profondeur, un changement de paradigme? La nouvelle ministre, Fatma-Zohra Zerouati, a qui a été attribuée la responsabilité- «importante et lourde», comme elle l’a qualifiée- de mener de front une double mission, a expliqué cette réorganisation par le caractère de «priorité nationale» que le président Bouteflika a conféré au programme de développement des énergies renouvelables. Il est utile de rappeler que la loi n° 04-09 du 14 août 2004 relative à la promotion des énergies renouvelables dans le cadre du développement durable (la première en Algérie dans ce domaine) est sortie des bureaux du ministère chargé de l’Environnement et non pas du ministère de l’Energie. Son exposé des motifs commence par des objectifs écologiques : protéger l’environnement, en favorisant le recours à des sources d’énergie non polluantes, et contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique en limitant les émissions de gaz à effet de serre; vient ensuite le souci pour les réserves en hydrocarbures: participer à un développement durable par la préservation et la conservation des énergies fossiles; enfin, contribuer à la politique nationale d’aménagement du territoire par la valorisation des gisements d’énergies renouvelables, en généralisant leurs utilisations. Juste retour des choses ?

M’hamed Rebah

Quitter la version mobile