Les forces françaises « ont torturé et assassiné » Ali Boumendjel pendant la guerre d’indépendance, a reconnu ce mardi le président Emmanuel Macron, « au nom de la France », en évoquant une mort qui avait été maquillée en un suicide.
« Au cœur de la bataille d’Alger, il fut arrêté par l’armée française, placé au secret, torturé, puis assassiné le 23 mars 1957. Paul Aussaresses (ancien responsable des services de renseignement à Alger, NDLR) avoua lui-même avoir ordonné à l’un de ses subordonnés de le tuer et de maquiller le crime en suicide », a détaillé l’Élysée dans un communiqué.
Le président français veut « regarder l’Histoire en face »
Macron a fait cet aveu lors d’une rencontre avec les quatre petits-enfants du chahid. Ce geste intervient quelques semaines après le refus de la France de présenter des excuses officielles pour les massacres commis en Algérie tout au long de l’ère coloniale. Ce geste « n’est pas un acte isolé », promet le président français dans ce communiqué. « Aucun crime, aucune atrocité commise par quiconque pendant la guerre d’Algérie ne peut être excusé ni occulté. ».
« Aujourd’hui, le président de la République a reçu au palais de l’Élysée quatre des petits-enfants d’Ali Boumendjel pour leur dire, au nom de la France, ce que Malika Boumendjel aurait voulu entendre : Ali Boumendjel ne s’est pas suicidé. Il a été torturé puis assassiné », précise le communiqué de la présidence française.
« Il leur a également dit sa volonté de poursuivre le travail engagé depuis plusieurs années pour recueillir les témoignages, encourager le travail des historiens par l’ouverture des archives, afin de donner à toutes les familles des disparus, des deux côtés de la Méditerranée, les moyens de connaître la vérité. » Macron a déclaré que « ce travail sera prolongé et approfondi au cours des prochains mois, afin que nous puissions avancer vers l’apaisement et la réconciliation », ainsi de « regarder l’Histoire en face, reconnaître la vérité des faits ».
« La génération des petits-enfants d’Ali Boumendjel doit pouvoir construire son destin, loin des deux ornières que sont l’amnésie et le ressentiment. C’est pour eux désormais, pour la jeunesse française et algérienne, qu’il nous faut avancer sur la voie de la vérité, la seule qui puisse conduire à la réconciliation des mémoires.
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L’Historien Benjamin Stora critiqué
Benjamin Stora a remis le 20 janvier, un rapport dans lequel il a soulevé de vives critiques, aussi bien en France qu’en Algérie, notamment pour ne pas avoir préconisé des « excuses » de Paris pour la colonisation. La puissante Organisation nationale des moudjahidine (ONM), les anciens combattants de la guerre d’indépendance (1954-1962), a accusé L’Historien d’avoir « occulté les crimes coloniaux » de la France en Algérie.
De même, Le Comité national de liaison des harkis (CNLH), des anciens combattants auxiliaires de l’armée française durant la guerre d’Algérie, a dénoncé ce rapport « minimaliste » et demandé que la France reconnaisse « l’abandon et le massacre des harkis, après les accords d’Evian et le cessez-le-feu du 19 mars 1962 ».
L’algérien a demandé, à maintes reprises, « la reconnaissance des crimes coloniaux » de la France. « Nous ne privilégierons pas de bonnes relations au détriment de l’histoire et de la mémoire, mais les problèmes se règlent avec intelligence et dans le calme, et non avec des slogans », a déclaré, ce lundi soir, le président Abdelmadjid Tebboune.
« La réconciliation entre Paris et Alger doit s’inscrire dans le cadre d’une reconnaissance mutuelle qui ne soit « ni le déni ni la repentance », a déclaré ce mardi matin l’ambassadeur de France en Algérie, François Gouyette, dans une interview au quotidien francophone L’Expression.
À l’approche du 60e anniversaire de la fin de la guerre et de l’indépendance de l’Algérie en 2022, Paris et Alger ont fait de cette « réconciliation des mémoires » un dossier prioritaire et MM. Macron et Tebboune se sont engagés à travailler ensemble sur ce dossier.