Idir Tazerout est un jeune militant et l’un des principaux initiateurs du mouvement de contestation contre le 4e mandat d’Abdelaziz Bouteflika qui a été à l’origine de l’organisation, samedi dernier, d’un rassemblement devant l’université de Bouzaréah sur les hauteurs d’Alger. Un rassemlement qui visait à mobiliser les étudiants algériens contre une autre candidature à l’élection présidentielle de l’actuel Chef de l’Etat qui cumule d’ores et déjà trois mandats successifs. Un rassemblement qui a été aussi réprimé par les services de sécurité et Idir, ainsi que 5 autres organisateurs, ont été embarqués au commissariat de police et retenus pendant au moins 5 heures.
Dans cet entretien, Idir Tazerout revient sur les motivations de ce mouvement citoyen et annonce que le prochain rassemblement contre le 4e mandat aura lieu sur la Place Audin devant l’université d’Alger Benyoucef Benkhedda appelée communément « la Faculté Centrale ».
Comment avez-eu l’idée de créer un collectif pour se mobiliser contre le 4e mandat de Bouteflika ?
Nous sommes des citoyens anodins, on suit l’actualité comme tout le monde et on voyait que quelque chose se préparait contre l’Algérie, à savoir le maintien d’un président malade avec à son actif 3 mandats dont un 3ème qui est tout simplement anticonstitutionnel. On a vu le passage en force du 4ème mandat et on a décidé de faire savoir que nous étions opposés à ce projet. Nous nous sommes donc mobilisés pour cette cause.
Après vos arrestations par la police, allez-vous continuer à vous mobiliser ? Et de quelle manière ?
Oui nous allons poursuivre nos actions devant toutes les Universités d’Alger jusqu’à ce que Bouteflika et ceux qui le soutiennent pour des raisons obscures cèdent à nos revendications. Nous pouvons vous annoncer dores et déjà que le prochain rassemblement contre le 4e mandat se tiendra devant la Faculté Centrale d’Alger, au niveau de la place Audin à Alger-centre.
Etes-vous suffisamment nombreux pour sensibiliser l’opinion publique algérienne ?
En tant que citoyens condamnant le mandat de la Honte, nous sommes très nombreux. Nous représentons la majorité des Algériens. Nous ne sommes pas encore assez nombreux à manifester dans la rue à cause de la barrière de la peur que les partisans du 4ème mandat instrumentalisent afin d’imposer par la force leur projet dictatorial. Nous nous y opposerons et nous saurons donner du courage à ceux qui pensent que tout est joué d’avance. Non, notre peuple est conscient que l’Algérie risque l’instabilité avec un 4ème mandat d’un Monsieur qui doit savoir maintenant s’en aller. Il se vante d’avoir apporté la Paix ? Qu’il sache alors maintenir cette paix en respectant cette République sans la déstabiliser. Nous lui disons : merci Monsieur Bouteflika. Merci pour tout mais maintenant il est temps pour vous de partir. Partez dignement sans pousser notre pays à l’instabilité. Vous en avez assez fait comme ça. Ne permettez pas aux corrompus de se jouer de vous et de l’Algérie. Partez !
Croyez-vous que les Algériens ont réellement envie de manifester dans la rue ?
Les 15 ans de Bouteflikisme qui ont suivi la décennie d’horreur que nous avons vécu ont verrouillé les champs d’expression, de militantisme ainsi que les médias. Nous savons et nous respectons la peur de dire NON à la contestation dans la rue. Mais la plus grande PEUR que nous portons en nous est de voir l’Algérie vaciller après tant de douleurs, tant de sacrifices, tant d’espoirs perdus. Nous voulons espérer un avenir meilleur et cet espoir ne passe pas par un 4ème mandat. Larbi Ben M »hidi et tous ceux qui l’ont suivi ne sont pas morts pour que l’Algérie devienne une Dictature ou une Monarchie mais un Etat de Droit pour son peuple.
Quelle alternative proposez-vous à ce 4e mandat que vous contestez ?
L’Alternative ? Mais l’Alternative naîtra le jour ou ce Monsieur déclarera qu’il lâchera le pouvoir. De quelle alternative parlez-vous lorsqu’un Monsieur malade, qui a volé un troisième mandat et qui veut passer en force pour un quatrième, verrouille tout le jeu politique, depuis des semaines, des mois. Au lieu de faire connaissance avec les candidats potentiels, nous sommes en train de commander un Président qu’on ne voit pas, et on assiste, par presse interposée, à une guerre de clans de bas étage. Des clans qui n’ont pas l’Algérie dans leur cœur et ne pensent qu’à leur petits intérêts mesquins. Nous voulons un Président jeune qui a toutes ses capacités intellectuelles et physiques, nous voulons un Président sage qui a un parcours universitaire. Depuis 52 ans, l’Algérie n’a pas eu un seul Président titulaire au moins du Baccalauréat. C’est pour cette raison que nous organisons nos sit-in devant les universités car ces étudiants sont l’avenir de demain. Accepteriez-vous de monter dans un Avion ou le pilote n’a pas de diplôme ? Nous sommes en 2014. Les choses ont changé et le monde aussi. L’Algérie doit monter dans le train qui avance. Nos dirigeants n’ont pas le droit de nous retarder.
Propos recueillis par Abdou Semmar