C’est une information qui est passée inaperçue. Le 8 septembre dernier, le chef de l’Etat a inauguré à Alger, le Centre international des Conférences baptisé au nom d’Abdelatif Rahal, ancien conseiller diplomatique et ami du chef de l’Etat. Ami seulement ? Pas vraiment. Il s’avère, selon des informations que peu d’officiels algériens osent confirmer, qu’Abdelatif Rahal entretenait des liens de parenté avec Abdelaziz Bouteflika.
Jusque-là rien d’extraordinaire me diriez-vous ? En vérité, ce n’est pas le lien de parenté qui interpelle ou cause problème. C’est plutôt l’honneur réservé à Abdelatif Rahal qui suscite des interrogations. Jusqu’à preuve du contraire, Abdelatif Rahal, en dépit de son parcours respectable, n’est guère une personnalité nationale de premier plan. L’envergure de l’ancien conseiller diplomatique d’Abdelaziz Bouteflika est loin d’égaler celle d’un Hocine Aït Ahmed, un des pères fondateurs de la Révolution algérienne, ou celle de Ferhat Abbas, une figure incontournable de notre histoire contemporaine. Le choix de baptiser le tout nouveau Palais des Congrès d’Alger au nom d’Abdelatif Rahal n’obéit, en réalité, à aucune considération historique ou politique rationnelle.
Parce qu’il est cousin lointain avec le Chef de l’Etat, parce qu’il est originaire de la wilaya de Tlemcen comme lui, on lui rend hommage et on l’honore pour la postérité. Quant à Hocine Aït Ahmed, Ferhat Abbes et les autres personnalités nationales qui demeurent occultées, voire vouées aux gémonies, elles n’appartiennent pas au « arch » du tout puissant Chef de l’Etat et ne méritent de ce fait pas qu’on leur dédie des palais construits à 500 millions de dollars.
C’est, malheureusement, une vérité que très peu d’Algériens osent reconnaître: « l’arouchisme » est un pratique profondément enracinée au sein de notre régime politique. Une pratique si banalisée qu’elle n’indigne plus personne. Certains hauts responsables tentent même de justifier cet archaïsme par la complexité de l’histoire de notre pays. Dans le sérail, on jure par « l’accord de Tripoli » qui fait référence au congrès de Tripoli de 1963 où la gouvernance de l’Algérie indépendante a été pensée et réfléchie en fonction de critères claniques pour satisfaire les factions « révolutionnaires ».
Aujourd’hui encore, c’est le sacro-saint critère régionaliste qui détermine les nominations au sommet de l’Etat. Si le Premier ministre est issu de l’Est, il faut qu’un autre poste sensible, comme celui du ministère de l’Intérieur, revienne à une personne de l’Ouest. Si le chef d’Etat-Major est chaoui, le chef du parlement doit être kabyle. L’équilibre « régionaliste » prime sur toute autre considération de compétence et de mérite. Preuve en est, dans le gouvernement actuel dirigé par Sellal, les observateurs les plus avertis savent pertinemment que le maintien d’Abdesslam Bouchouareb, ministre de l’Industrie, ne correspond à aucun paramètre politique digne de ce nom. Il sert uniquement de caution car issu d’un « arch » puissant des Aurès qui compte également de nombreux officiers de l’armée nationale.
Idem pour Aïcha Tabagou, ministre déléguée auprès du ministre du Tourisme et de l’
Les exemples sont légions. On peut passer des longues heures à citer les multiples cas où le pouvoir est confié selon l’appartenance régionale, clanique et ethnique. Cette vérité est mise sous le boisseau au nom de l’unité nationale. Paradoxalment, ce « arouchisme » est lui-même une menace pour l’unité de la nation puisqu’il étouffe les authentiques compétences à même de conduire le pays vers le développement. Un développement qui nécessite du mérite, de l’intelligence et de l’abnégation dans l’effort. Des notions que le régime ignore royalement puisqu’il n’y a que les liens familiaux et tribaux qui comptent…