L’islam est sérieusement malmené depuis quelques temps. Et s’il sert de repoussoir actuellement dans le monde occidental c’est pour deux raisons principales : d’une part, parce que ce sont les musulmans eux-mêmes qui en donnent une image désastreuse et d’autre part parce qu’ils ne font rien pour la corriger.
Ainsi dans les années 90 en Algérie, on a vu des hordes barbares mettre le pays à feu et à sang et s’illustrer par les pires abominations au nom de l’islam, sans qu’aucune autorité politique ou religieuse, ni à La Mecque ni à Al Azhar n’ait eu le courage de les désigner comme hérétiques, ni de les combattre. Cela aurait permis d’épargner des vies humaines et de rétablir l’islam dans sa vérité tout simplement. Ce déferlement de sauvagerie a fait dire aux pays non musulmans que la violence et le meurtre constituent l’A.D.N de l’islam. Il est difficile aujourd’hui de les convaincre du contraire quand on voit que Daech n’hésite pas à armer de jeunes délinquants pour semer la terreur dans le monde et que son objectif final est de rétablir le califat et d’« islamiser » le monde à marche forcée. On égorge un vieux curé dans son église au nom de l’islam et des musulmans. Ce sont les directives et les souhaits de toute une mouvance de l’islam. On ne peut dès lors, faire admettre aux autres que l’islam est une religion de paix et d’amour quand on laisse faire ce genre d’abomination et on ne peut rétablir son image réelle dans le monde avant de l’avoir rétablie d’abord en terre d’islam.
Comment faire ?
Il faut prendre le mal à la racine ; c’est à dire là où les risques d’infection existent et là où se trouvent les corps les plus vulnérables, à savoir l’école coranique et la petite enfance. Nos imams, dans leur grande majorité ne lisent le Coran que pour faire la prière et non pour le comprendre. Les raisons sont connues : une éducation insuffisante et un niveau de scolarité bas et étroit. Il faut donc former nos imams et interdire aux personnes non autorisées de parler publiquement de l’islam.
Il faut rappeler que l’imam ou le prédicateur, quels que soient leurs niveaux d’éducation ou d’érudition n’ont pas le droit d’imposer leur interprétation du Coran et que chaque fidèle doit lui-même faire son propre effort pour comprendre le texte sacré. Le Prophète (Asws) nous a laissé le Coran pour que nous l’interprétions sans intermédiaire.
Il faut savoir que la jurisprudence (interprétation du Coran) qui a été imposée aux musulmans par les fameuses écoles jurisprudentielles
( madhahib) et qui est figée depuis des siècles, est devenue une tradition et empêche toute évolution de la pensée critique chez les musulmans. Avec le temps et suite au coup d’arrêt donné à l’ijtihad (effort raisonné d’interprétation), cette tradition a pris une dimension sacrée et sert encore aujourd’hui de moyen de légitimation des pouvoirs politiques.
Il est par conséquent devenu impossible d’exercer une réflexion critique sur l’islam dans les pays musulmans, parce les Etats arabes et islamiques tirent leur légitimité de la religion. Il leur est donc très facile de faire taire toute velléité de réforme en la faisant passer tout simplement pour une opposition à Dieu, et de faire passer toute tentative d’ouverture ou d’innovation pour de l’hérésie. « Je suis gardien des lieux saints et dépositaire de la légitimité. Contester mon pouvoir s’est s’opposer à Dieu » ; tel serait leur message en quelque sorte.
C’est tout du moins, la réponse opposée aujourd’hui par les gouvernements rétrogrades et les mouvements conservateurs aux musulmans qui appellent à une réforme de l’islam ; non pas dans son dogme mais tout simplement dans son interprétation. Et, contrairement à ce qu’on veut nous faire croire, le Prophète (Asws) n’a pas interprété le Coran et n’a pas cherché à imposer sa propre compréhension et sa propre lecture. L’interprétation du texte sacré doit être faite selon l’époque et l’espace, ce qui signifie qu’elle doit être contemporaine et accompagner l’évolution de la société.
Daech, les fondamentalistes et leurs commanditaires nous promettent l’apocalypse. Ils tirent leur inspiration de la jurisprudence islamique établie par les penseurs du 8ème et 9ème siècle et c’est la raison pour laquelle ils s’opposent avec les moyens considérables que l’on connaît, à toute tentative de lecture saine du Coran et à tout esprit critique. Peu leur importe que les sociétés islamiques restent à la traine et dépendent du bon vouloir de la science des « mécréants » ; l’essentiel étant qu’ils gardent le pouvoir.
Ils prétendent défendre l’islam. Il faut leur répondre que l’islam n’a pas besoin d’eux pour être défendu. La meilleure manière de défendre l’islam c’est de se comporter en bon musulman et de ne pas utiliser la religion à des fins politiques ou coercitives. On attend tout simplement des fidèles qui s’en réclament d’en respecter les fondements et de ne pas en dénaturer le message. On attend des responsables politiques et religieux qu’ils laissent leurs concitoyens exercer leur réflexion critique et qu’ils mettent à leur disposition les moyens pédagogiques nécessaires pour lire, comprendre et interpréter le Coran et non qu’ils l’interprètent à leur place.
Aziz Benyahia