La situation va de mal en pis à El Hoceïma, dans la province du Rif, au nord du Maroc. La population dénonce, depuis cinq mois la corruption, la gabegie, la marginalisation et une répression militaire violente pour faire avorter «Harak», un mouvement de protestation déterminé à aboutir à l’émancipation du Rif.
La situation connaît un niveau de pourrissement très avancé dans le Rif marocain. Les partisans de Nasser Zefzafi, chef de fil du mouvement de protestation, ont investi le terrain depuis plusieurs mois pour dénoncer les dérives de la monarchie. Pacifiques, ces derniers ont promis une manifestation grandiose pour le 20 juillet prochain, une manifestation, disent-ils, qui va faire trembler le royaume.
Les autorités marocaines sont désemparées. La situation semble échapper à leur contrôle. Malgré un déploiement massif de l’armée et des services de renseignement, les protestataires n’en démordent pas et comptent aller jusqu’au bout.
Pas plus loin qu’hier, les services de sécurité marocains ont tenté d’arrêter Zefzafi. Ce dernier a fait une incursion à l’intérieur d’une mosquée ou il a interrompu le prêche du vendredi pour dénoncer le discours de l’imam accusé d’être à la solde du Makhzen. Suite à quoi, le procureur du roi a lancé un mandat d’arrêt contre lui pour «troubles occasionnés dans une mosquée ayant gravement nui à la liberté de culte et au bon déroulement de la prière du vendredi». Le mouvement de protestation s’est radicalisé suite à cette manœuvre du gouvernement, tournant pour la première fois, à la confrontation directe entre protestataires et forces de l’ordre.
Dans le Rif, la protestation est devenue quasi quotidienne depuis la mort, fin octobre 2016, d’un vendeur de poisson broyé par une benne à ordures. Le mouvement de protestation qui revêtait, au début, un caractère socio-économique tend peu à peu à devenir politique. Après s’être attaqués aux départements ministériels ayant échoué à réaliser des projets de développement, la fronde vise désormais le Makhzen et à sa politique de répression.
Incapable de stopper cette dynamique de protestation, le gouvernement marocain entre dans une cacophonie généralisée. Réuni le 18 mai dernier, le Conseil de gouvernement a fait le point sur les événements d’El Hoceïma, suite à la visite effectuée par des ministres dans la région. Mustapha El Khalfi, porte-parole du gouvernement, a insisté sur «la normalité de la situation». Pour lui, «les réunions autour de l’état d’avancement des projets s’inscrivent dans le suivi de ces chantiers lancés durant les dernières années». Le responsable a aussi accusé des parties, sans les nommer, «d’instrumentaliser la bonne foi des citoyens en faisant la promotion de thèses erronées, comme c’est le cas de ceux qui évoquent une militarisation de cette zone . Le porte-parole du gouvernement marocain a également usé de menaces à l’encontre des leaders du mouvement «Harak».
Une tentative d’apaisement vaine car le gouvernement a perdu toute crédibilité aux yeux des protestataires. L’ancien président de l’Organisation marocaine des droits humains (OMDH), Mohamed Nachnach, est, pour sa part, entré en scène pour tenter de sauver la situation. Il est chargé d’établir le contact avec les meneurs du mouvement «Harak», afin d’asseoir un dialogue avec les autorités. Un plan compromis par le mandat d’arrêt émis contre Nasser Zefzafi. Le Maroc se dirige d’un pas ferme vers un avenir incertain. Son unité territoriale est menacée
Massi M.