Nous ne sommes pas des marionnettes ou des guignols Par Abdou Semmar

Redaction

Algerie, samedi 22 octobre 2016 : Amar Saïdani patron du FLN, vient de démissionner. Branle-bas de combat dans les chancelleries occidentales, consternation dans le pays, flash spécial sur CNN, on attend l’ouverture de Wall Street. Soyons sérieux. C’est ce qu’on appelle un non-événement parce que nos mœurs politiques sont très spéciales. Un clou chasse l’autre ; voilà tout !

Il n’y a pas de mystère ; l’élite d’un pays, à savoir l’ensemble des hommes et des femmes appelés à le diriger, se recrute dans deux viviers : l’université et les syndicats. L’université pour former les grands commis de l’Etat destinés à servir le pays quelle que soit la coloration politique du gouvernement et les syndicats qui sont les seuls viviers où on apprend la démocratie.

On connaît l’état de délabrement de l’enseignement en général chez nous et quand on sait que le niveau des élites dépend de leur formation dès le primaire, on voit forcément s’éloigner la perspective du Nobel. En 1980 on exportait des ingénieurs spécialistes des hydrocarbures, aujourd’hui on les importe à prix d’or. Cherchez l’anomalie !

Pour ce qui concerne les syndicats, il faut rappeler qu’il y en a deux traditionnellement qui sont un passage obligé pour se former en politique : les syndicats étudiants et les syndicats dans les entreprises.

Chez nous, les syndicats étudiants ont disparu depuis longtemps. Seuls ne subsistent que des avatars d’organisations fantomatiques squattées par les équipes réserves où les partis au pouvoir vont chercher les remplaçants en fonction des départs en retraite ou des mises à l’écart. Nos étudiants aujourd’hui ignorent jusqu’à l’existence de leurs glorieuses UGEMA et UNEA, et les plus activistes  (et non pas les plus actifs) d’entre eux, appartiennent en majorité à des organisations fâchées avec la démocratie, l’Occident, le progrès, les libertés, l’émancipation de la femme etc…

Concernant les syndicats ouvriers, nous détenons le record de longévité du patron de l’UGTA, désigné « démocratiquement » par le Pouvoir et reconduit « démocratiquement » par les travailleurs. Seules quelques organisations syndicales essaient tant bien que mal d’échapper à la mainmise du Gouvernement.

On ne peut dès lors, si on accepte ce constat, s’étonner de toute cette mascarade autour du vaudeville joué à guichets fermés par le FLN, le RND et consorts. Le pas de deux de Amar Saïdani ne doit pas nous surprendre pas plus que cette comédie du pouvoir à laquelle on a fini par se résigner. Son arrivée à la tête du parti au pouvoir était l’illustration parfaite du déni de démocratie et du coup d’état permanent à la tête du Pouvoir. On a assisté sans trop s’alarmer à des opérations commandos par la dernière direction du FLN qui dépassent largement les frontières d’un parti politique au point d’avoir ébranlé sérieusement une institution vitale pour le pays et pour sa stabilité politique.

Il a fallu qu’il démissionne pour qu’aussitôt on dégaine les sabres et qu’on affûte les couteaux dans un désir collectif d’en découdre, non pas avec le Pouvoir dans sa globalité, mais avec son maillon le plus ridicule et par conséquent le plus faible. Rien n’a manqué à la mise en scène, pas même la désignation démocratique et à l’unanimité de son remplaçant. Un vrai bal des hypocrites. Et quand les lampions seront éteints, on nous réveillera pour suivre, impuissants le énième tour de passe-passe et on assistera encore aux mêmes mascarades et aux mêmes serments, la main sur le cœur en prenant à témoin les Chouahadas, et Novembre etc …

L’épisode Saïdani, n’est que le énième tableau d’un spectacle de marionnettes et de guignol et rien ne sert d’accuser le parti de l’Etranger, le complot de nos ennemis de l’extérieur et tout le reste. Nous sommes collectivement responsables de tous nos maux. La solution est entre nos mains. Commençons à éduquer nos enfants à l’amour de la liberté et de la démocratie, à la recherche du savoir et du progrès, à l’émancipation de la femme, et nous éliminerons en douceur nos pires ennemis, qui sont parmi nous et pas ailleurs.

Quitter la version mobile