Nous souhaitons tous que l’Algérie décroche le maximum de médailles aux jeux de Rio. Cette ambition est légitime puisque notre participation dans des conditions conformes aux critères olympiques, traduit notre capacité à prétendre figurer au palmarès dans certaines disciplines. Si le nombre de ces disciplines est très petit, c’est parce que nos responsables n’ont pas jugé utile de doter le pays d’équipements adéquats et du personnel d’encadrement, ni d’encourager la pratique du sport. Cela est dû à l’absence d’une politique volontariste et non pas au manque de moyens financiers. L’Algérie n’est pas un pays pauvre ; sa population est jeune et compte environ 40 millions d’habitants. Au compteur des médailles de Rio elle arrive nettement derrière les Iles Fidji (900 000 habitants) et fait jeu égal avec Grenade (100 000 habitants). Cherchez l’anomalie.
Notre programme sportif, de plus en plus en recul par rapport au passé et complètement en décalage vis à vis des besoins de notre jeunesse, semble ignorer les vertus du sport pour son développement harmonieux et de son efficacité dans la lutte contre le désœuvrement et la délinquance. Pire encore; notre ministère donne l’impression d’être insensible au délabrement des structures sportives de l’ensemble du pays et à l’absence d’un minimum de moyens de soutien à ceux de nos sportifs qui continuent de se battre contre mille et une difficultés pour continuer à s’entraîner. Inutile de parler du manque de piscines, de stades, de terrains de sport, d’équipements sportifs, de la dévalorisation du métier de moniteur sportif et de l’absence d’encouragement en faveur de la filière sportive.
Lorsqu’on en entend Le coureur de 1500 m.Salim Kaddar coureur du1500 mètres dire : « j’ai été obligé de payer le billet Paris-Rio pour disputer ces JO, et c’est Makhloufi qui m’a aidé en réglant la note. C’était ça ou rater le déplacement au Brésil. », on a tout simplement honte.
Lorsqu’on entend le décathlonien Larbi Bourraba dire : « J’ai rencontré beaucoup de problèmes pour avoir à mes côtés mon entraîneur adjoint Hocine Mohamed…On manque de moyens pour atteindre le niveau mondial. Les Jeux olympiques se préparent pendant deux à trois ans et non pas en trois mois », et qu’on apprend que c’est son entraîneur qui lui sert de kiné, on est tout simplement abasourdi, eu égard aux sommes colossales qui sont gaspillées quotidiennement dans dépenses somptuaires.
On ne peut qu’être admiratif de nos athlètes pour leur abnégation et pour donner à notre jeunesse et au pays tout entier la plus belle image du patriotisme. On était persuadé de ne plus revivre les mésaventures de leurs aînés qui nous avaient déjà donné des leçons de courage et de volonté. On pense essentiellement à :
Hassiba Boulmerka, médaille d’or du 1500 m aux J.O de Barcelone en 1992 et têtue comme une mule, doit sa réussite à un travail de forçat, à une paire de basket d’entrainement achetée par l’ambassade de Cuba à Alger et à une prise en charge par Cuba pour sa préparation durant 6 mois à La Havane. Elle voulait aller jusqu’au bout de l’aventure parce qu’elle avait la détermination et surtout le courage de défier les obscurantistes qui avaient entrepris d’enfermer définitivement la femme en terre d’islam. On lui en veut jusqu’à ce jour d’avoir osé courir en short au lieu du niqab.
Noureddine Morsli, médaille d’or du 1500 m aux J.O d’Atlanta en 1996, était le seul avec une poignée de sportifs à croire en ses chances. L’Etat est venu au secours de la victoire, pour ensuite l’oublier définitivement. Au Maroc on a donné le nom de Saïd Aouita au train rapide Rabat-Casablanca et les médaillés bénéficient de beaucoup d’avantages pour services rendus à la nation. Pardon pour le parallèle.
Taoufik Makhloufi, médaille d’or du 1500 m aux J.O de Londres, en 2012 inconnu des Algériens jusque-là, s’est battu pour sa préparation aux prochains J.O avec le ministère de la jeunesse et des sports pour obtenir la prise en charge de sa préparation qui nous aurait coûté …0,005 centimes par habitant. Pour les jeux de Rio, il a failli de ne pas y aller parce qu’on lui avait mégoté les moyens techniques qu’il réclamait pour sa préparation physique.
Qui d’entre nous connaît ou se souvient de NouriaMérah-Benida, médaille d’or du 1500m aux J.O de Sidney, de Hocine Soltani, le golden boy de la boxe anglaise, le seul sportif algérien doublement médaillé aux J.O d’Atlanta en 1996 et à ceux de Barcelone en 1992.
Partout dans le monde, les champions sportifs sont célébrés comme des héros, de vrais héros, parce qu’ils illustrent l’abnégation ou tout simplement l’esprit sportif. Ils sont glorifiés de leur vivant et après leur mort. D’abord par reconnaissance de la nation et ensuite pour l’exemple qu’ils donnent à la jeunesse.
On pensait que nos responsables allaient enfin comprendre que nos sportifs étaient nos meilleurs ambassadeurs et les meilleurs modèles pour notre jeunesse. On n’imaginait pas un seul instant qu’on arriverait à un tel degré de désinvolture et d’irresponsabilité au point de sacrifier un idéal aussi beau que le sport.
Aziz Benyahia