C’est un scandale presque fabriqué de toutes pièces. Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, s’est retrouvé au coeur d’une vive polémique. Sur les réseaux sociaux, depuis le 2 novembre dernier, il était « accusé » d’avoir un frère aîné établi en France, mais pas seulement en sa qualité de simple et ordinaire ressortissant français. Ce mystérieux frère serait un élu dans une mairie française située au Sud de l’Hexagone. Un Premier ministre algérien dont le frère est un élu et membre d’un conseil municipal d’une ville française ! Cette information controversée a suffi pour déclencher un inimaginable scandale cybernétique.
Les réseaux sociaux s’enflamment. Et des milliers de commentateurs descendent en flamme un Premier ministre « harki » qui aurait entretenu une relation « incestueuse » avec l’ancien occupant colonialiste. C’est un journaliste algérien en exil à Londres qui a jeté le pavé dans la mare. Mohamed Tamalt est un journaliste réputé pour ses dénonciations systématiques des pratiques scandaleuses du régime algérien. Sauf que ce reporter sulfureux proche des milieux islamistes s’en prend systématiquement à la vie privée des dirigeants algériens quelle que soit sa fonction. Et cette fois-ci, il sort ce qu’il appelle un scoop et révèle que le frère aîné d’Abdelmalek Sellal, un certain Tahar Sellal, travaille comme maire adjoint délégué dans la ville de Saint-Paul-Trois-Châteaux, située dans le département de la Drôme, en région Rhône-Alpes.
En quelques heures, l’information a soulevé une vague d’indignation sur les réseaux sociaux. Face à l’ampleur des réactions, nous avons mené une enquête pour vérifier l’authenticité de cette information. Et après avoir recoupé toutes nos sources, nous sommes arrivés à la conclusion suivante : cette information n’est qu’un « faux scandale ». Un scénario digne d’un film de Bollywood. En effet, monsieur Tahar Sellal existe bel et bien. Il travaille effectivement comme « adjoint délégué à l’espace public, aux réseaux et à l’agriculture » à l’Hôtel de ville de Saint-Paul-Trois-Châteaux. Il a été élu lors des élections municipales françaises organisées en mars 2014. Tahar Sellal, retraité, figure sur la liste du maire socialiste Jean-Michel CATELINOIS. Il est aussi l’époux de Simone Servais, une française originaire de Saint-Paul-Trois-Châteaux. Mais Simone et son mari Tahar Sellal n’habitent dans cette ville que depuis l’année 2000. Selon ses propres aveux, il s’est engagé dans la politique locale afin « de préserver un cadre convivial pour tous et refuser l’exclusion ».
Nous avons appelé la mairie de Saint-Paul-Trois-Châteaux. Une fonctionnaire de cette mairie nous a confirmé que Tahar Sellal travaille bien dans cette mairie en tant qu’adjoint délégué. Cependant, nous n’avons pas pu le joindre personnellement. Mais ce Tahar Sellal est-il réellement le frère de notre Premier ministre, Abdelmalek Sellal ? « Non », répondent à l’unanimité toutes les personnes proches et d’autres qui entretiennent un lien de parenté avec la famille Sellal. Aucune source fiable n’a confirmé le moindre lien de parenté entre cet élu français et le premier responsable du gouvernement algérien. « Abdelmalek Sellal a un seul frère, oui. Mais il vit ici en Algérie entre Alger et Constantine. Il n’a jamais quitté l’Algérie pour vivre en France. Ce frère a tenté de se lancer dans les affaires, mais il n’avait jamais réussi à mener à bien ses projets », nous confirme une source haut placée dans le Gouvernement. « D’ailleurs, Abdelmalek ne s’entend pas du tout avec ce frère qui lui a causé quelques ennuis auparavant », certifie notre source.
Aucun élément ne permet donc d’authentifier le « roman » raconté par ce journaliste en exil. Bien au contraire, aucun indice réel et vérifiable, excepté le même nom de famille, ne permet d’établir un lien de parenté entre Tahar et Abdelmalek Sellal. La « trahison » dont serait coupable monsieur Abdelmalek Sellal n’est-elle donc qu’une simple accusation fantasmagorique ? C’est fort probable…