Quelques jours après son appel vidéo contre la candidature du Président sortant, le rappeur originaire d’Annaba, Lotfi Double Kanon revient en chanson pour dénoncer une nouvelle fois la tournure que prend l’élection présidentielle. Dans un clip vidéo publié le 7 mars sur Youtube, il s’attaque aux « rapaces » à la tête de l’Algérie qui « pillent » les richesses du pays.
« Ils l’ont vidé », « l’ont pillé », « l’ont endormi », « ils ont pris toute la richesse et l’ont jeté dans puits ». Dans le refrain de sa nouvelle chanson, titrée « ils l’ont bouffé », le rappeur prisé par les jeunes algériens Lotfi Double Kanon ne mâche pas ses mots contre le pouvoir en place. Un ton virulent que le chanteur engagé adopte tout le long de sa nouvelle chanson. Dans ce clip vidéo, long de 4 minutes, le chanteur, aujourd’hui indésirable en Algérie, fraîchement exilé en France, s’en prend violemment aux « rapaces » qui gouvernent le pays dans leur intérêt personnel uniquement et ne craint pas de les désigner. On voit effectivement dans ce clip des coupures de presse relatant des multiples dossiers de corruption, qui entachent le pouvoir algérien, notamment l’affaire Sonatrach. D’ailleurs Lotfi Double Kanon, dans sa dernière chanson, aux allures de pamphlet politique, vise notamment Chakib Khelil, l’ancien ministres de l’Energie, résidant aujourd’hui à Washington, DC aux Etats-Unis. Un acteur clef de l’affaire Sonatrach. « De Tamanrasset à Adrar, ils ont pompé toutes nos ressources », dénonce ainsi Lotfi Double Kanon.
« Ils foutent en l’air le pays »
Assoiffés de pouvoir et obnubilés par leurs avantages et profits personnels, les hommes qui dirigent l’Algérie méprisent totalement les besoins élémentaires du peuple, renchérit le chanteur engagé. « Ils achètent des palaces et se payent des pétasses mais ne peuvent pas construire un hôpital comme celui de Val-de-Grâce », attaque encore Lotfi Double Kanon.
En plus de s’être servi, d’avoir détourné des fonds publics et dérobé pendant des années les richesses de l’Algérie, le clan présidentiel a conduit le pays à la crise économique, accuse le chanteur originaire d’Annaba, qui évoque tour à tour la dévaluation du dinar et le fort taux de chômage des jeunes. « Notre monnaie n’a plus de valeur à cause d’eux », lance-t-il. « Ils ont anéanti la production nationale et nous ont rendu victime de l’importation. On achète tout de l’étranger, on est même plus capable de produire nous-mêmes », assène-t-il encore. Ces « rapaces foutent en l’air le pays », lâche-t-il au milieu d’un couplet.
« Si j’avais une mitraillette… »
L’artiste dépeint ensuite une réalité noire de la jeunesse algérienne. « Les jeunes sont devenus des kamikazes. Ils se droguent et volent. Ils sont aveugles et ne se rendent pas compte de ce qui se passe vraiment. Les jeunes veulent faire la harga plutôt que rester ici », rappe Lotfi Double Kanon. Et les responsables de la désillusion de la jeunesse algérienne sont bien sûr le « clan mafieux » à la tête du pays. En joignant le geste à la parole, Lotfi Double Kanon va jusqu’à dire : « Si j’avais une mitraillette, je leur tirais dessus les uns après les autres » !
http://www.youtube.com/watch?v=M6fFFxM0n1g&feature=youtu.be
Virulentes, violentes, cruelles, ces paroles pourraient devenir le prochain hymne de l’opposition algérienne qui émerge face à la candidature d’Abdelaziz Bouteflika, le Président malade, qui à l’âge de 77 ans et après deux AVC brigue un 4è mandat. D’ailleurs, le dernier clip vidéo de Lotfi Double Kanon s’ouvre sur des images des manifestations à Alger du mouvement Barakat !, réprimée par les forces de police. Le clip se termine d’ailleurs sur d’autres moments du rassemblement du jeudi 6 mars à l’appel des fondateurs de Barakat ! On voit une femme implorer le Président-candidat de renoncer de lui-même à sa candidature et de quitter le pouvoir sur-le-champ : « Paix à ton âme mais dégage, dégage. On n’a pas besoin de lui ! Quand je regarde tes photos j’ai envie de te dire va te reposer tu me fais vraiment de la peine ».
Si Lotfi Double Kanon ne cache pas son hostilité au régime en place, il souhaite pour le moment rester indépendant et n’apporte pas encore un soutien franc à un quelconque mouvement d’opposition ou à un candidat adverse. Dans un entretien accordé à nos confrères de France 24, le chanteur engagé a dit ne pas entendre « organiser ni manifestation, ni boycott du scrutin. Je ne veux pas déstabiliser l’Algérie ». Va-t-il revenir sur sa position ? A suivre…